Avec ou sans sel est un court métrage réalisé au retour d’un voyage à Auschwitz, « par des jeunes, pour des jeunes » comme le soulignent lesservices d’aide en milieu ouvert (AMO) qui l’ont encadré. L’œuvre et la démarche qui y a mené s’éloignent des commémorations plus habituellesou d’un certain pathos, ou encore d’un discours formel, pour entrer dans un véritable travail de citoyenneté. Le film se fait révélateur des traits que desjeunes se donnent à eux-mêmes.
Que « certains jeunes, dont des jeunes issus de l’immigration, tiennent des propos racistes qui peuvent aller jusqu’à la valorisation de Hitler et de son discours »a interpellé des travailleurs de rue d’AMO verviétoises et liégeoises. « Nos pratiques professionnelles nous montrent l’absolue nécessité deconsacrer du temps, de l’énergie et des moyens financiers pour former des citoyens libres, autonomes, responsables et capables de s’investir dans un collectif solidaire »,précisent-ils.
Au-delà des affiliations à telle ou telle fédération, mais profitant plutôt de leur proximité géographique, Cap, Cap Sud, Latitude J, Arkadas etReliance, toutes cinq AMO1, se sont rassemblées pour construire ensemble le projet aujourd’hui concrétisé en DVD. Luc Médard de l’AMO Cap Sud, liele projet à l’axe collectif du travail des AMO, et entend bien valoriser la démarche, alors que l’on sait cet axe de travail remis en question dans le cadre del’écriture d’un nouvel arrêté pour les AMO (voir AÉducn°142). « Le collectif est un outil pour mener à bien les actions individuelles et communautaires, défend Luc Médard. Les jeunes issus de l’accompagnementindividuel ont avec le film créé un message pour tous les autres jeunes, un support qui sert à interpeller. »
Du second degré
« On reconnaît les jeunes à leurs boutons, les jeunes traînent les pieds, mangent des frites (…) Mais surtout on reconnaît les jeunes aux choix qu’ilsfont », visualise-t-on en litanie dans Avec ou sans sel. L’écriture cinématographique est comme un « patchwork », remarque Caméra-etc2,partenaire du projet spécialisé dans la production de films d’animation. Se mêlent prises de vue réelles, images d’archives, cinéma d’animation,pour former un film qui détonne, qui appelle à la tolérance et dresse en filigranes, sur un mode de répétition, le portrait de la jeunessed’aujourd’hui.
Maniant le second degré, les jeunes invitent le spectateur à réfléchir à l’importance de ses actes, principalement de l’exercice du droit de vote.« Le film n’est pas moralisateur, fait-on remarquer du côté des Territoires de la mémoire3, autre partenaire du projet, il laisse à chacun ladécision de porter ses propres choix, mais insiste sur les conséquences une fois le choix posé. »
Le projet a exigé beaucoup d’investissement, en temps, en énergie, témoignent deux jeunes qui présentent le film et compte parmi les 35 réalisateurs enherbe. Ils iront jusqu’à écrire et interpréter le générique du film, qui déclame : « Ne provoque jamais la haine, elle se retournera contre toi.Regarde où la haine te mène, reste droit, garde la foi… »
Le film dans la boîte, l’engagement est encore au rendez-vous. Comme pour cette jeune participante qui a projeté Avec ou sans sel dans sa classe et, à la demande deprofesseurs, répétera l’expérience dans son école.
1. AMO :
Arkadas (Beyne-Heusay, Fléron, Soumagne et Blégny) – tél. : 04 358 03 39 ;
Cap (Verviers) – tél. : 087 33 33 88 ;
Cap Sud (Stavelot, Malmedy, Lierneux, Waimes, Trois-Ponts et Stoumont) — tél. : 080 86 31 24 ;
Latitude J (Olne, Battice, Herve, Thimister-Clermont, Aubel, Plombières et Welkenraedt)– tél. : 087 35 09 61 ;
Reliance (Visé, Dalhem, Bassenge, Oupeye et Juprelle) – tél. : 04 374 18 00.
2. Un extrait du film est visible sur le site de Caméra-etc (anciennement Caméra enfants admis), rue de Visé490 à 4020 Liège – tél. : 04 253 59 97.
3. Territoires de la mémoire – tél. : 04 232 70 40.