De la coopérative de couscous bio au développement du tourisme durable, Abdellah Azouz, le jeune maire de Fask, au sud du Maroc, a prouvé aux habitants de sa commune que la richesse n’est pas toujours à chercher dans l’exode.
Au milieu du désert, à 200 kilomètres au sud d’Agadir, la petite oasis de Fask souffre d’un taux de pauvreté élevé. La majorité des habitants y vivent de l’élevage ou de l’agriculture. Mais les sécheresses qui frappent régulièrement la région rendent cette activité très aléatoire. Quant à l’autre source principale de rentrées, à savoir l’argent envoyé par les migrants, elle est aussi en train de se tarir. « Au début des années ’60, de nombreux habitants de Fask ont migré, notamment en Belgique. A partir de la fin des années ’90, ces migrants qui ont travaillé dur pour envoyer de l’argent à leurs familles sont rentrés pour prendre leur retraite. Certains même sont morts. Et plusieurs familles se sont alors trouvées sans revenu. Ils ont pu acquérir des infrastructures, l’accès à l’eau et à l’électricité, mais ils n’ont aujourd’hui plus de ressources pour payer les factures », explique le maire, lauréat coup de cœur du prix Harubuntu 2011. Une situation aggravée par la crise économique qui a laissé nombre de migrants sans emploi. « Notre problème, c’est qu’il y a des jeunes qui sont ici avec leur cœur et avec leur corps. Mais leur esprit est volé, parce qu’ils ne pensent qu’à partir ailleurs », regrette Abdellah Azouz. Qui, du haut de ses 35 ans, est convaincu que l’avenir est à construire ici, dans le sud du Maroc : « Fask, c’est une commune qui est riche. Mais pas financièrement. La richesse de Fask, c’est sa culture, à cheval entre Berbères et Sahraouis. C’est aussi son potentiel touristique, ses dunes, ses cascades… La richesse elle est chez nous, on ne la voit pas, mais elle est partout. »
Fantasia et huile d’Argan
Pour Abdellah Azouz, l’autre richesse de sa commune ce sont les femmes. Pendant que les paysans s’apitoient sur les récoltes brûlées et que les jeunes n’envisagent d’avenir meilleur qu’ailleurs, c’est à elles que le jeune maire pense pour développer l’économie de l’oasis. « Les femmes, c’est notre force. Elles sont sérieuses et volontaires. Elles sont le moteur de la famille et c’est par elles que l’on doit passer pour enclencher une dynamique. C’est en parvenant à faire sortir les femmes de la maison pour travailler que l’on donne aux hommes l’envie d’entreprendre », s’enthousiasme-t-il.
Des cours d’alphabétisation sont proposés. Des coopératives sont mises en place pour remettre en valeur les savoir-faire traditionnels : fabrication d’huile d’Argan, confection de couscous bio précuit, vannerie, broderie, dressage des chevaux pour les spectacles équestres de la Fantasia… L’enthousiasme est au rendez-vous. Le tourisme durable se développe. Des maisons abandonnées sont transformées en gîtes par une coopérative formée de jeunes bacheliers au chômage. « Il faut voir les femmes de Fask aujourd’hui. Il y a dix ans, elles restaient à la maison. Aujourd’hui, elles vendent leurs produits au souk, négocient, font de la publicité, voyagent pour faire les marchés dans les autres provinces. Pour nous, c’est quelque chose d’original. »