Association belge de recherche et d’expertise des organisations de consommateurs, l’AB-REOC se fait très discrète. Ce sont ses statuts qui le stipulent pour éviter les dérives du passé. En juin 2015, le ministre de l’Emploi, de l’Économie et… des Consommateurs, Kris Peeters, signait un nouveau contrat de gestion pour cet organisme au service des organisations de consommateurs. À la tête de son conseil d’administration, Jean-Philippe Ducart, de Test-Achats, répond à nos questions.
Si vous cherchez un site Internet où vous pourriez trouver les noms des travailleurs et les travaux en cours au sein de l’AB-REOC, il est normal que vous ne trouviez pas ces informations sur la Toile. Les statuts de l’asbl sont clairs: «L’association n’est pas elle-même une association de consommateurs. [Elle] ne fait pas d’enquête marketing et ne communique pas directement à l’égard des médias.» Le décor est planté de manière assez curieuse, à première vue. En réalité ce passage des statuts publiés au Moniteur belge est significatif de l’historique de cette structure. Construite sur le passé et la fin houleuse du CRIOC et des dérives dénoncées de son ex-directeur, notamment quant à la mise en œuvre et la médiatisation d’études à la qualité douteuse, AB-REOC se doit donc d’être discrète et exclusivement au service des organisations de consommateurs qui composent son conseil d’administration. À savoir les syndicats FGTB, CGSLB-ACLV, la Ligue des familles et son homologue flamand, le Gezinsbond, le MOC, les mutualités chrétiennes, libérales et socialistes, Test-Achats et le VSZ (Verbaucherschutzzentrale).
Du passé, faire table rase?
Comme l’explique Jean-Philippe Ducart, président du CA de l’AB-REOC et Manager Public Affairs et Media Relations chez Test-Achats, «pour les organisations de consommateurs, il était important de maintenir une structure assurant un rôle d’expertise et de représentation des organisations de consommateurs auprès d’instances à différents niveaux de pouvoir (européen, fédéral, régional, communautaire ou local). Il s’agit essentiellement de commissions consultatives sur des questions portant sur la consommation. Elles sont nombreuses et les organisations de consommateurs ne peuvent pas être présentes partout: donc il était important de conserver un organisme pour nous y représenter, de préparer des avis, d’effectuer des veilles sur des sujets juridiques».
Construite sur le passé et la fin houleuse du CRIOC, AB-REOC se doit d’être discrète et exclusivement au service des organisations de consommateurs qui composent son conseil d’administration.
Mais, alors qu’en 2014 un projet de contrat de gestion avait été négocié avec le gouvernement précédent, en l’occurrence le ministre des Consommateurs de l’époque, Johan Vande Lanotte, tout a été remis en cause avec l’arrivée de l’actuel gouvernement. La négociation initiale portait sur un financement assez identique à celui du CRIOC (à savoir autour d’1,7 million); le changement de gouvernement a bouleversé les équilibres, et l’existence même de la structure est mise en cause. À force de lobbying des organisations de conso, le ministre Peeters a finalement concédé du bout des lèvres un budget raboté des deux tiers et imposé un fonctionnement corseté de l’organisation. Pas de visibilité, pas de communication, une équipe réduite, logée au sein du SPF Économie, quelque part sous surveillance étroite du pouvoir subsidiant.
Et pourtant…
Même si l’asbl est réduite à cinq membres du personnel, dont sa secrétaire générale Leen De Cort et deux anciens membres du personnel du CRIOC (ils étaient 22 en son temps), et son budget, de 506.000 euros, AB-REOC est opérationnelle depuis septembre 2015 et travaille sur ses sujets de prédilection, dont la consommation. Et ce, au sein de commissions consultatives multiples et variées, comme la commission des clauses abusives au sein du Conseil de la consommation, le Comité d’attribution du label écologique européen, le Bureau de tarification automobile ou encore l’AFSC.
Elle a également, à la demande d’organisations de consommateurs, réalisé diverses études sur les assurances dans le domaine de l’économie collaborative, le gaspillage alimentaire qui a fait l’objet d’ateliers (lire les Échos du crédit et de l’endettement n°51, juillet/août/septembre 2016, «Haro sur le gaspillage alimentaire» par Marie-Christine Calmant). Elle a travaillé sur la question des facilités de paiement, des intérêts de retard et les procédures de rappel, et aussi sur le règlement extrajudiciaire de conflits. Une étude sur les jeunes et l’argent réalisée en 2016 par ses soins a été médiatisée au sein de la Ligue des familles et du Gezinsbond, et le travail effectué sur les factures d’énergie et leur impact sur le budget des ménages pourrait l’être également. L’on voit également apparaître le logo de l’AB-REOC sur le site du SPF Économie pour une campagne lancée contre les fraudes à la facture (fraudefacture.belgique.be), lancée avec d’autres partenaires comme B Post, l’UCM, la FEB ou encore la Ligue des familles.
Pour le président du conseil d’administration d’AB-REOC, «la prochaine législature sera peut-être l’occasion de revoir à la hausse les moyens de cette structure pour lui permettre d’être plus présente dans les commissions, de renforcer l’expertise de son personnel et de pérenniser son action, au service des organisations de consommateurs».
- Article publié dans Les Échos du crédit et de l’endettement n°54 avril/mai/juin 2017.
En savoir plus
Alter Echos (site), «Le CRIOC, tel le Phénix?», Nathalie Cobbaut, 18 mai 2015