Les Roms, Manouches et Gitans, regroupés sous le terme générique de « Tziganes », ont repris la route en ce début de printemps. Leurs caravanes auront,à un moment donné, besoin de se poser durant quelques jours. Quel accueil les communes wallonnes réserveront-elles à ces 20 000 personnes, pour la plupart denationalité belge ? Telle était la question centrale du colloque organisé à Mons, le 15 avril dernier, par l’asbl Picardie laïque, le Centre de médiationdes gens du voyage (CMGV)1 et la Ville de Mons.
Depuis quelques années, la Région wallonne s’intéresse à cette matière délicate. On retiendra la création (en 2002) et le soutienrenforcé (convention-cadre, en 2007) du CMGV, une association qui contribue au dialogue entre les acteurs : gens du voyage, communes et riverains. On retiendra également lacréation récente (juin 2007) d’un groupe de travail intercabinets (Action sociale, Logement, Aménagement du territoire, Environnement,…) chargé, selon leministre Didier Donfut, en charge de l’Action sociale, de la Santé et de l’Égalité des chances, « d’explorer les pistes de moyens à développer pourorganiser le plus harmonieusement possible l’accueil et le séjour des gens du voyage ».
Tensions et solutions
Sur le terrain, les tensions demeurent. C’est l’une des observations tirées de l’« État des lieux des difficultés et des besoins rencontrés parles communes » réalisé par le CMGV. Si une commune sur trois fait l’objet d’un séjour des gens du voyage, la moitié d’entre elles seulement disposed’un terrain d’accueil. Et une fois sur deux, celui-ci n’offre ni équipement ni service (eau, électricité, ramassage des déchets, toilettes, …).Faute d’espaces publics, beaucoup de groupes nomades occupent des terrains privés, souvent sous-équipés et excessivement chers, créant au sein même de lacommunauté tzigane une dualité sociale.
Alors que la France impose à toute commune de plus de 5 000 habitants de prévoir une aire d’accueil et que la Flandre dispose d’une trentaine de terrains, en Wallonie,les rares espaces aménagés mis à disposition des caravanes tziganes émanent de la seule volonté de quelques communes qui osent l’accueil. Cela, alors que dansle cadre du plan d’ancrage communal relatif à la mise en œuvre du droit à un logement décent, une administration locale peut obtenir un subside pourl’aménagement d’un terrain d’accueil…
Trois communes (Hotton, Namur et Ottignies-Louvain-la-Neuve) ont partagé leur expérience. Un constat : plus le séjour est préparé et géré, mieux ilse déroule et les relations avec les riverains, principale source de tension, s’améliorent. Les « recettes » sont les suivantes :
• préparation d’un terrain équipé au mieux (eau, électricité, WC, container à ordures, etc.) ;
• désignation d’une personne relais (agent communal, médiateur, etc.) ;
• signature d’une convention entre l’administration et les gens du voyage précisant les droits et devoirs (durée du séjour, tarif d’occupation, servicesrendus, états des lieux, etc.) ;
• information aux citoyens (articles dans le bulletin communal, courriers aux riverains directs, porte-à-porte de l’agent de quartier, etc.).
Comme le souligne Françoise Jeanmart, bourgmestre f.f. de Hotton : « Nous ne rencontrons pas plus de problèmes avec les gens du voyage qu’avec d’autres groupes (lesscouts, par exemple) mais les préjugés de la population à leur égard sont beaucoup plus importants. » Des expériences parmi d’autres sontrelatées dans un guide de bonnes pratiques2 édité par le CMGV.
Manque de solidarité intercommunale
À l’unanimité, les représentants des villes volontaristes regrettent le manque de solidarité entre communes : « Au sein du Brabant wallon, témoigneCécile Lecharlier, échevine de l’Intégration, nous sommes les seuls qui menons une politique accueillante et encadrée. Les autres communes ne font aucun effort. Ilfaudrait une mutualisation de la problématique. »
L’enjeu pour la société, comme l’a expliqué le philosophe et juriste Nicolas Bernard, est de s’adapter aux gens du voyage, de respecter leur mode de vietraditionnel. Un mode de vie paradoxalement dans l’air du temps, notamment en matière de mobilité – une valeur revendiquée aujourd’hui – ou enmatière de recyclage – l’un des métiers des communautés nomades.
1. CMGV :
– adresse : rue des Relis namurwès, 1 à 5000 Namur
– tél. : 081 24 18 14
– courriel : gensduvoyage@skynet.be
– site : www.cmgv.be
2. La gestion du séjour des Gens du Voyage, avril 2008.