De rebondissement en rebondissement, l’affaire de la Carolorégienne a secoué l’actualité des dernières semaines. Des têtes sont tombées et le secteur dulogement social n’a plus qu’à bien se tenir. « L’affaire de la Carolorégienne » a considérablement mobilisé les médias ces derniers jours. Ce feuilletonde la rentrée a remis à l’ordre du jour le problème de la gestion des sociétés de logement de service public (SLSP), en soulignant tout particulièrement lesabus pratiqués par certains mandataires. Plus généralement, cette affaire pose aussi la question d’une certaine gestion publique. Mais contentons-nous aujourd’hui du secteur dulogement social…
Les reproches
En gros, ce qui est reproché aux mandataires de la Carolorégienne, ce sont des dépenses excessives et injustifiées, ou encore des jetons de présenceindûment attribués. Mais le plus choquant des « abus » pratiqués par la Carolorégienne est sans doute la redevance mensuelle illégale de 5 eurosperçue auprès des 2.800 locataires, comme l’expliquaient nos confrères du Soir, le 23 septembre.
Mais la Carolorégienne n’est pas la seule. Un audit réalisé au niveau du « Home waremmien » a mis en évidence des problèmes de clientélisme ouencore de confusion de patrimoine. La Société wallonne du logement (SWL)1 a également informé le procureur du Roi et déposé plainte contre leFoyer hensitois, l’Habitation sociale de Binche et environs, le Foyer taminois, l’Habitation moderne du Brabant wallon et le Foyer des Hauts Pays (Quiévrain).
Certaines se sont déjà vu notifier l’envoi d’un commissaire spécial du gouvernement pour élaborer un plan de gestion en vue de redresser leur situationfinancière. Cette dernière mesure ne concerne toutefois pas que les SLSP où ont été commises des irrégularités, mais aussi des sociétésparfois tout simplement en difficultés (ex. : La Maison liégeoise, Toit et moi [ex-Sorelobo] à Mons).
Mesures spécifiques à la Carolorégienne
Ce 22 septembre, André Antoine, ministre wallon du Logement2, décidait de l’envoi de Patrick Evrard en qualité de commissaire spécial auprès de« La Carolorégienne ». Sa mission, d’une durée initiale de 6 mois renouvelable, consistera à :
• « prendre ou faire prendre toutes les mesures nécessaires pour remédier aux carences de gestion relevées notamment dans le rapport d’audit et les rapportsde suivi d’audit établis par la SWL (Société wallonne du logement), quant aux aspects administratifs, comptables, financiers et techniques ;
• examiner de manière étayée les engagements pris par La Carolorégienne envers des tiers, notamment par rapport à l’objet social de lasociété et au regard des autorisations de tutelle nécessaires ;
• établir un plan de gestion décrivant les objectifs à atteindre à court et moyen termes, ainsi que les mesures à prendre pour atteindre ces objectifs, enprenant en référence l’objet social de la société ;
• assurer un suivi méthodique de la programmation des travaux dans le cadre du PEI (programme exceptionnel d’investissement) ;
• se substituer, sans préjudice de l’exercice par la SWL de ses pouvoirs de tutelle et de contrôle, aux organes de la Carolorégienne, les organes continuant à seréunir régulièrement, afin d’assurer la transition à la fin de la mission du commissaire. »
Enfin, « le commissaire spécial produira trimestriellement à l’attention de la SWL et du ministre du Logement, un rapport relatif notamment à ses activitéset à l’état d’avancement de sa mission. »
Mesures pour l’ensemble du secteur
On le sait, la santé financière du secteur du logement social est loin d’être au beau fixe. Lors d’une conférence de presse organisée le 20 septembre, AndréAntoine l’a encore démontré au travers d’un audit réalisé en avril 2005 pour l’ensemble du secteur. Il y présentait « ses faiblesses et qualités dansune perspective d’amélioration structurelle et qualitative ». C’est une mise en oeuvre concrète de la proposition de résolution parlementaire du 12 mai 2004 sur lapolitique du logement en Wallonie, adoptée sous la précédente législature.
D’un autre côté, au travers de la dernière réforme du Code du logement adoptée cet été, différentes mesures ont été prises envue de la responsabilisation des mandataires des SLSP. Le ministre du Logement rappelle qu’elles portent sur :
• « le pluralisme obligatoire dans la représentation des partis démocratiques dans les conseils d’administration des SLSP ». Ceux-ci serontdésignés à la proportionnelle dans les conseils des Provinces, Communes et CPAS, dans les six mois du renouvellement après les élections de 2006 ;
• « un contrôle annuel de la gestion des SLSP par les conseils communaux » sur la base des comptes et bilans et d’une note stratégique relative àl’évaluation des programmes d’investissement et de la politique de vente des logements ;
• « le renforcement des règles d’accompagnement et de tutelle de la SWL sur les SLSP, par la détermination de standards de gestion quotidienne (aspects administratifs,techniques et financiers), et la mise en œuvre de programmes de gestion par les directeurs-gérants, avec évaluation directe par les conseils d’administration ». Il yaura donc des standards de frais de gestion ;
• « la fixation par le gouvernement wallon des modalités d’engagement et du régime pécuniaire du personnel des SLSP » ;
• « une meilleure définition du profil et des règles d’évaluation des commissaires du gouvernement auprès des SLSP » ;
• « un système d’information immédiate du ministre de toute infraction commise par une SLSP, et une obligation pour la SWL de prise de sanction dans le mois.»
Les mesures adoptées devraient vraisemblablement répondre – à terme – aux problèmes de gestion du secteur.
Prévention
Par ailleurs, dans le cadre de sa mission de conseil et de contrôle des sociétés locales, la SWL va poursuivre sa politique d’audit lancée en 2002 et visant toutes lessociétés. Comme le rappelle la SWL dans un communiqué, « cette procédure, menée de manière contradictoire avec les responsables dessociétés de logement, a pour but l’amélioration des procédures internes de gestion en mettant en évidence tant les points forts que les points faibles de celles-ci.Conçu comme un outil à la disposition de toutes les sociétés, l’audit se veut avant tout constructif dans la mesure où il vise à soutenir lenécessaire effort de professionnalisme déjà présent au sein de nombreuses sociétés. » Les audits devraient donc aussi jouer un rôlepréventif.
Pour terminer, à l’heure où nous écrivons ces lignes, le ministre André Antoine annonçait qu’il allait déposer au gouvernement wallon du 29 septembre« un large plan sectoriel de redéploiement des SLSP, dans une optique de gestion performante et contrôlée. »
1. SWL, rue de l’Écluse, 21 à 6000 Charleroi – tél. : 071 20 02 11 – fax : 071 20 03 98 – Site :
2. Cabinet du ministre wallon du Logement, rue d’Harscamp, 22 à 5000 Namur – tél. : 081 25 38 11 – fax : 081 25 39 99.