Dans un communiqué du 19 mars intitulé « Cherche désespérément main-d’œuvre qualifiée », Agoria Bruxelles1 souligne le taux de chômageparticulièrement élevé des jeunes bruxellois : 31% des 18 à 25 ans y sont demandeurs d’emploi (contre des taux de respectivement 27 et 11% pour la Wallonie et la Flandre).Sur les plus de 76.000 chômeurs que compte la Région bruxelloise, 8.357 ont moins de 25 ans; ce qui constitue une augmentation de 6,1% par rapport à février 2001. Or,souligne la fédération multisectorielle de l’industrie technologique, les entreprises ne parviennent pas à surmonter leurs difficultés à trouver du personnelqualifié pour pourvoir leurs postes vacants.
L’explication? Pour la fédération patronale, elle est à trouver du côté de l’enseignement, ou plutôt de « la qualité déplorable de l’enseignementet d’un dysfonctionnement dans la politique en matière de formation permanente ». Le problème principal concerne, selon elle, le degré de scolarité trop faible. Plus de 60%des demandeurs d’emploi actuels ne détiennent même pas de diplôme du secondaire supérieur. « La qualité de l’enseignement à Bruxelles laisse àdésirer », estime Dominique Michel, secrétaire général d’Agoria Bruxelles. « Les écoles ne parviennent manifestement pas à fournir un nombre acceptable dediplômés. Le problème se situe essentiellement dans l’enseignement technique et professionnel, qui accueille plus de 40% des jeunes Bruxellois. Pas moins de 20% d’entre euxquittent les bancs de l’école sans diplôme! »
Agoria « se félicite néanmoins de la motivation qui continue d’animer malgré tout le corps enseignant actuel ». « Les employeurs bruxellois ne voient rien d’étonnant àla pénurie de professeurs dans l’enseignement secondaire. Les professeurs actuels ont peu de chance de rester à niveau techniquement. Et les énormes formalitésadministratives enlèvent toute envie de se recycler en permanence ou de suivre des stages temporaires en entreprise ».
Trois pistes
C’est dans cette optique qu’Agoria Bruxelles propose de conclure un partenariat entre les entreprises et les pouvoirs publics : les premières ouvriraient leurs portes aux professeurs pour desstages ou donneraient la possibilité à leurs techniciens d’aller donner cours dans les écoles pendant un an ou deux. Cet aspect est actuellement traité par un groupe detravail réunissant le cabinet du ministre Hazette2 et Agoria. Par ailleurs, Dominique Michel annonce avoir déjà pu dégager 300 places de stage pour lesélèves bruxellois et propose de renforcer l’alternance en une combinaison « deux jours d’école, trois jours en entreprise », face à quoi le ministre Hazette affirme vouloird’abord tenter d’ancrer la formule actuelle qui équilibre enseignement et pratique à parts égales.
Deuxième piste du patronat : agir sur les moyens. Non pas les moyens de l’enseignement en général « suffisants » selon D. Michel mais ceux des écoles qualifiantes par lamise en place d’un fonds bruxellois d’équipement, à l’instar de ce qui se fait en Wallonie (ainsi qu’en Flandre), par une plus grande spécialisation des établissements car »trop d’écoles essaient de faire un peu de tout » et par un partenariat plus performant avec les entreprises.
Troisième piste : l’amélioration de la formation permanente, notamment par l’introduction à l’instar des autres Régions d’un système de chèques-formation,projet qui a l’oreille du ministre bruxellois en charge de la formation Éric Tomas.
À noter que ce dernier prépare avec les partenaires sociaux un « pacte social pour l’emploi ». Les premières négociations ont déjà abordé la mise surpied des centres de compétences et des fonds d’équipement avec l’appui de l’ensemble des acteurs. Agoria entend-elle, avec cette sortie, se positionner comme le meilleurélève patronal dans cette négociation encore en coulisses? La suite le dira.
Réaction Écolo
À la suite de cette sortie d’Agoria, des députés bruxellois Écolo3 lui ont proposé l’organisation d’une table ronde à laquelle D. Michel répondrapositivement si elle rassemble l’ensemble des pouvoirs politiques et notamment les ministres compétents. Écolo appelle également les employeurs à « évaluer leursexigences d’embauche des jeunes » ainsi que « leur propre investissement dans la formation et l’insertion », en citant une convention établie entre les missions locales et Agoria…restée pratiquement sans résultat faute de prise en charge financière de la part du patronat. D. Michel explique à cet égard qu’Agoria et les missions locales ne sesont jamais réunies que pour des séances d’information en lien avec des formations et des stages destinés aux jeunes, ce qui a débouché voici deux ans sur unecentaine de stages. Il serait prévu que l’initiative soit renouvelée sous peu. Enfin, D. Michel précise qu’il n’a jamais demandé explicitement de « renforcer lecontrôle des chômeurs quant à leur volonté de travailler » mais qu’il s’est interrogé sur leur motivation.
1 Agoria Bruxelles, boulevard Reyers 80 à 1030 Bruxelles, tél. : 02 706 78 20, site Web : http://www.agoria.be/Bruxelles/fr/home.htm
2 Cabinet Hazette, boulevard du Régent 37-40 à 1000 Bruxelles, tél. : 02 213 17 00.
3 Rue Charles VI 12 à 1210 Bruxelles, tél. : 02 218 30 35.
Archives
"Agoria Bruxelles s'alarme de la situation de l'enseignement et de la formation"
Donat Carlier
02-04-2002
Alter Échos n° 117
Donat Carlier
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