La ministre wallonne de l’Action sociale, Christiane Vienne (PS)1, a plaidé ce 4 avril à Namur en faveur d’une politique d’intégration des personnesétrangères ou d’origine étrangère plus dynamique et moins favorable « aux rentes de situation ». Elle propose également à la Communauté françaisede sceller un accord de coopération pour un financement croisé des écoles de devoirs.
L’année 2005 s’était très mal terminée pour le monde des associations de terrain travaillant à une meilleure intégration des étrangersen Wallonie. Sur 147 associations, seules 82 associations étaient encore subsidiées (cf. Alter Échos n°199 et 200). Poussée dans le dos par un budgetréduit, la ministre wallonne de l’Action sociale avait dû effectuer quelques coupes claires dans le secteur. Séisme et mécontentement général.Christiane Vienne s’était pourtant voulue rassurante, arguant qu’un nouvel appel à projets avec un budget revenu à sa taille initiale, c’est-à-dire cellede 2004, allait arriver très prochainement. Parole tenue, depuis ce 5 avril, l’appel est publié au Moniteur (formulaire disponible sur http://mrw.wallonie.be/dgass). Les budgets sont confirmés (1 million d’euros). Deux publics cibles ont étéidentifiés : les primo-arrivants et les femmes. Une priorité sera en outre accordée aux projets :
• s’inscrivant dans une action d’ensemble, de meilleure cohabitation dans un quartier, une commune ;
• visant à développer la promotion de la diversité et de l’égalité des chances ;
• visant à développer un parcours d’intégration sociale et citoyenne ;
• porteurs d’emploi ;
• développant des partenariats avec d’autres associations et le secteur public, en concertation avec les Centres régionaux d’intégration des personnesétrangères ou d’origine étrangère, agréés par la Région wallonne.
Les associations ont jusqu’au 10 mai pour rentrer un dossier. Les décisions seront formalisées avant le 15 juillet.
Aspects budgétaires
Les projets sélectionnés seront subventionnés dans la limite du crédit budgétaire de 1 million d’euros
réservé à cet effet et, selon les modalités suivantes :
• un seul projet sera retenu par association ;
• le montant maximum accordé par projet sera de 20.000 euros ;
• le cas échéant, il sera veillé à articuler pour un même opérateur, le projet proposé avec celui retenu dans le cadre du Fipi ;
• le subside est accordé, en principe, pour une année, soit l’année civile 2006, sauf pour ce qui concerne les projets à mettre en œuvre de manièrenouvelle ;
• des projets en cours, évalués positivement et développant des actions à plus long terme, pourront se voir proposer une convention pluriannuelle, limitéeà trois ans ;
• le subside est destiné à couvrir des frais de fonctionnement et de personnel liés à la mise en œuvre du projet ou à l’organisation desactivités présentées, à l’exclusion des frais de matériel durable (mobilier, ordinateurs, …) ou d’acquisition et d’aménagement delocaux ;
• le subside est versé en deux tranches, l’une de 70 % après signature et engagement de l’arrêté ministériel de subvention, le solde aprèsprésentation et vérification du dossier justificatif des dépenses tel qu’établi selon les indications contenues dans la circulaire ad hoc.
Les actions ponctuelles qui se développent pendant une durée limitée, les recherches, études ou publications ainsi que les projets relevant de la compétenced’un autre niveau de pouvoir que la Région wallonne ne sont pas visés.
» Plus de favoritisme ! «
Un objectif : étendre la couverture territoriale en faisant émerger de nouveaux projets » car jusqu’ici, note la ministre, il n’y avait pas vraiment de politique d’intégrationen Région wallonne. On agissait par habitude ou tradition » et la ministre de poursuivre : » En prenant en charge le secteur il y a un an et demi, j’ai découvert ‘des appelsà projets discrets’ qui permettaient de ‘redistribuer les cartes entre initiés’ « . Pour ne pas dire entre amis…
Elle s’étonne, par exemple, que le budget de l’intégration des étrangers finance des cours de danse africaine ou de langue grecque. Elle devient même caustique : « J’attends toujours une explication rationnelle sur le fait que la province de Namur se taille la part du lion en termes de subsides à l’intégration alors que le gros de la populationd’origine étrangère se trouve dans le Hainaut. » Voilà qui devrait faire plaisir aux associations namuroises… La ministre n’y voit qu’une explication : les relationsde proximité entre l’administration, basée à Namur, et les associations namuroises… » Ce n’est pas parce qu’on a toujours fait comme cela qu’il faut continuer « , insisteChristiane Vienne.
La ministre a donc défini une » colonne vertébrale » (parcours d’intégration, partenariats, cohabitation dans les quartiers…) à laquelle devront se rattacher lesactions subsidiées en faveur de l’intégration. » La logique de l’appel à projets permet de créer une dynamique dans un secteur en constante évolution, car lespopulations changent, explique la ministre. Il n’y aura plus de rentes de situation pour mener des actions toujours les mêmes. » Les actions peuvent toutefois s’inscrire dans la durée ensignant une convention de trois ans. Les Centres régionaux d’intégration sont invités à susciter des projets dans leur zone. Leur rôle dans le choix des projets selimitera à un avis de notoriété sur les associations candidates.
Au Centre d’action interculturelle de la province de Namur (CRI de Namur)2, on s’étonne des propos de la ministre. « Nous avons des projets qui fonctionnent, unenécessité plus grande en milieu rural qu’en ville de lutter contre le racisme et nous avons effectivement un projet pilote qui a reçu plusieurs postes PTP mais le cabinet Viennesoutient ce projet et y tient, explique Benoîte Dessicy, directrice du CAI. Et puis, franchement, de quoi parle-t-on ici ? Le budget de la Région wallonne consacré auxassociations wallonnes d’aide aux immigrés est minuscule. Nous diminuer des subsides de seulement 5.000 euros parfois par association, moi, je veux bien, mais il ne restera que des ronds decarottes… »
Les écoles de devoirs
Le secteur des écoles de devoirs a également été touché par la diminution de subsides pour 2005 (cf. Alter Échos n°200). Ainsi laFédération francophone des écoles de devoirs (FFEDD)3 évaluait à 175.000 euros les pertes cumulées en 2005, soit 4.150 euros en moyenne parassociation alors que des sommes avaient déjà été engagées sur base de la récurrence effective de ce subside depuis une dizaine d’années voireplus pour une bonne partie d’entre elles. La Fédération accusait ainsi la ministre de mettre le secteur en péril, un secteur plus exposé que d’autres auxrenvois d’ascenseurs puisqu’il grappille des subsides à la région (Intégration) et à la Communauté (Enfance). Le cabinet de la ministre Vienne lesinvitant de son côté à désormais se tourner vers la Communauté française mais sans autre forme de concertation préalable.
Ce 4 avril, lors de la conférence de presse de l’appel à projets, la ministre de l’Action sociale en a profité pour répondre aux différentesinterpellations médiatiques de la FFEDD et faire une mise au point. » Les écoles de devoirs me font un mauvais procès, s’insurge la ministre. Il suffit de regarder leschiffres. Sur 177 écoles reconnues et agréées par la Communauté pour la région wallonne en 2005, trente seulement avaient rentré un projet et 28 ontété retenues dans le cadre de l’intégration des personnes d’origine étrangère. Elles ont reçu 114.750 euros (avec des subsides variant entre 1.450 et 12.000euros), beaucoup plus que leur subvention de base de la Communauté (moyenne de 3.000 euros). Les écoles de devoirs représentent 30 % des subsides wallons alloués. Ellesdoivent comprendre qu’elles ne peuvent pas être un opérateur privilégié de l’intégration. » Elle demande donc qu’un accord de coopération soit envisagéavec la Communauté pour stabiliser le secteur sur le long terme et fait clairement un appel du pied à sa collègue Catherine Fonck, avec laquelle, par ailleurs, aucun contactn’a encore été pris. Christiane Vienne rappelle également que l’appel à projets 2006 est ouvert aux écoles de devoirs. Reste que, l’appel ciblantles primo-arrivants et les femmes, nombre d’écoles de devoirs ne pourront vraisemblablement y trouver une porte d’entrée.
1. Cabinet Vienne, rue des Brigades d’Irlande, 4 à 5100 Jambes – tél. : 081 32 34 11 –presse-vienne@gov.wallonie.be
2. CAI de la province de Namur, rue Dr Haibe, 2 à 5002 Saint-Servais – tél.: 081 71 35 13 – fax : 081 73 04 41 –info@cainamur.be
3. FFEDD, rue Relis Namurwès, 1 à 5000 Namur – tél./fax : 081 74 72 50 – ffedd@swing.be