Malgré son devoir de réserve, le directeur général de la Société wallonne du logement (SWL) n’a pas sa langue en poche. Avec son équipe decommissaires, la SWL aura la vision la plus complète du secteur.
Alter Echos : Comment la SWL appréhende-t-elle cette nouvelle réforme ?
Alain Rosenoer : Cette réforme est à la fois globale et ambitieuse. L’ambition est de faire 7 000 nouveaux logements sur la période 2010-2014. On va versle renchérissement du crédit immobilier, donc l’augmentation de l’endettement et le renforcement de la difficulté d’accès au logement.
Un récent rapport de l’OCDE, pourtant d’orientation libérale, recommande clairement de mettre l’accent sur le secteur du logement, particulièrement du logementpublic. Les chiffres sont durs. Nous étions à 104 000 logements, nous ne sommes plus qu’à 102 000. L’offre s’atténue car les SLSP vendent leurpatrimoine. L’offre est plutôt réduite, on a donc peu de moyens pour réguler le marché.
AE : Qu’en retenez-vous principalement ?
AR : L’élément-clé pour nous est le renforcement du rôle des commissaires. Devenus agents de la SWL depuis la réforme précédente, ilssont désormais un atout majeur dans la réalisation de nos missions. Avant, nous n’obtenions qu’environ un tiers de réponses à nos questions. Le pool decommissaires est une réussite. A la Carolo, il a remis sur pied les services techniques qui dysfonctionnaient totalement. Ils seront les pivots du suivi de la gestion et disposeront d’un‘back office’ à la SWL. Il faut souligner que, dans leur pratique, ils privilégient aussi le conseil plutôt que le contrôle. Cela sera facilité parl’externalisation de la direction de l’audit qui se fera après la fin du premier cycle d’audit.
AE : La multiplication de ces commissaires est-elle vraiment une bonne chose ? N’est-ce pas le signe d’un malaise ?
AR : Il faut bien distinguer les commissaires des commissaires spéciaux dont le bilan n’est pas extrêmement positif. Il n’y avait pas de règles pour cesmissions spéciales où l’on sortait des règles du Code du logement. Il y a de bons exemples mais aussi des échecs cuisants. Rien n’a évoluéfondamentalement sous leur responsabilité. J’en parle à l’aise. J’ai été le premier commissaire spécial en 1994.
AE : Quels sont les autres éléments importants du point de vue de la SWL ?
AR : Ses principaux points positifs sont l’élargissement des activités, la possibilité de prise en gestion et la réforme du financement. La questionsensible reste la hauteur des moyens attribués.
AE : Que pensez-vous du passage du concept de logement social vers le concept de logement public ?
AR : Les pays qui ont un parc plus important pèsent davantage sur le prix de l’immobilier. En Wallonie, il y a 7,5 % de logement public. C’est le même taux quel’Irlande. En France, c’est 18 % ; aux Pays-Bas, 32 % ! En Belgique, on a toujours privilégié l’accès à la propriété via lesavantages fiscaux à l’acquisition. Une politique de logement ne peut se mener qu’à long terme !
AE : La réforme crée le référent social. Qu’en pensez-vous ?
AR : Au-delà des modalités, la conclusion est que le boulot de la société ne se limite pas à la remise des clés. Il faut faire rentrer les Plansde cohésion sociale (PCS) et le lien social dans le travail des sociétés de logement. Ces dernières ont des attitudes très variées vis-à-vis deslocataires. Je connais une société qui organisait un grand barbecue quand elle démarrait un chantier sur un site. Les liens sociaux permettaient alors que les locataires laissentfacilement entrer les ouvriers dans leur logement. Il existe des immeubles où les entrepreneurs n’arrivent pas à rentrer. Il faut avoir une vision plus large du locatairebasée sur l’idée de service. Le locataire n’est pas l’emmerdeur !