Les jeunes belges n’auraient pas suffisamment le goût d’entreprendre, dixit des études très sérieuses comme celles du Global Entrepreneurship Monitorou de l’Euromonitor. Pour y remédier, le gouvernement wallon a chargé la toute jeune Agence de stimulation économique (ASE)1 de prêcher l’espritd’entreprise dans les écoles. Premier bilan.
« Sensibiliser à l’esprit d’entreprendre et à la création d’activités » est une des deux missions confiées par le plan Marshallà l’Agence de stimulation économique lors de sa création en octobre 2006. La première étant, pour rappel, de réformer la stimulation économiqueen proposant des dispositifs de soutien aux entreprises. Et apparemment ça marche puisque la révolution mentale des jeunes wallons semble prendre de l’altitude, du moinss’il faut en croire le titre de la conférence de presse : « Esprit d’entreprise en Wallonie : ça décolle ! », sans doute un trait d’humourlié au fait que le président de l’ASE, Luc Partoune, n’est autre que le directeur de Liège Airport… Mais revenons à l’objet de laconférence de presse de l’ASE : « Afin de diffuser plus largement les actions de sensibilisation à l’esprit d’entreprendre et de résorber le manque desynergies existantes, explique le président en question, l’ASE a été chargée d’élaborer, avec l’expertise de la Fondation pour la recherche etl’enseignement de l’esprit d’entreprendre (Free)2, un programme wallon Esprit d’entreprendre pour les écoles, opérationnel depuis le 1erseptembre 2007 ». Le programme a été validé par un comité d’accompagnement créé en mars 2007, composé de représentants de laDirection générale de l’enseignement, de chaque niveau de l’enseignement et des opérateurs de la formation (IFAPME et Forem).
Quand les enseignants parlent aux enseignants
Cœur de cible des actions : les jeunes. Tous les niveaux d’enseignement sont visés : primaire, secondaire, supérieur de type court et long. Les enseignants et lesresponsables des établissements sont aussi concernés « parce qu’ils sont les principaux acteurs de la transmission des savoirs ». L’équipe chargéede propager la bonne parole est composée de cinq enseignants détachés de la Communauté française et rebaptisés « agents de sensibilisation ». Ilsont suivi une formation accélérée (bagages en techniques de vente + formation sur le plan Marshall et l’ASE) pour devenir les relais du programme dans toutes lesécoles de Wallonie. Ils ont jusqu’ici contacté 450 établissements et entamé 165 collaborations avec les directeurs et enseignants. Quant à savoir pourquoichoisir des enseignants et pas des entrepreneurs, il semble que le courant passerait mieux avec les écoles en agissant de la sorte.
Des freins culturels
Côté experts, le choix s’est porté sur la Fondation Free, réunissant le gratin du capitalisme belge derrière la promotion de l’esprit d’entreprise chez les jeunesWallons et Bruxellois… Mise sur les fonts baptismaux sous le haut patronage du gouvernement wallon, la Fondation Free bénéficie en effet du soutien de « sept figuresemblématiques de l’entrepreneuriat » : Jean-Pierre Berghmans, le baron Albert Frère, Jean-Pierre Hansen, Christian Jacqmin, le comte Maurice Lippens, le baron JeanStéphenne et Francis Verheughe. Leurs sept sociétés – Électrabel, Fortis Banque, GlaxoSmithKline Biologicals, Lhoist, Siemens, la Compagnie nationale àportefeuille et Sonaca – en sont les fondatrices. Et si vous êtes un lecteur fidèle d’Alter Échos ou de feu Alter Éduc, ce nom doit vous direquelque chose, nous avons en effet à plusieurs reprises parlé de programmes pour les écoles promus par cette fondation : Dream (Alter Éduc n°139), Cap’Ten(Alter Éduc n°89), les mini-entreprises, mais aussi, et c’est moins glorieux, l’affaire portée sur la place publique par le collectif « Flexblues »(cf. Alter Échos n° 204). Si la Fondation se défend de vouloir être le cheval de Troie du capitalisme dans les classes de la Communauté française, ellecompte bien mettre fin au frein culturel qui empêche les jeunes Wallons de développer l’esprit d’entreprendre.
Le budget consacré aux actions de sensibilisation à l’esprit d’entreprendre est passé de 700 000 euros à 1,6 millions d’euros pourl’année académique 2007-2008. L’agrément de 11 opérateurs3 et la labellisation de différentes actions4 ont étéréalisés ainsi que le lancement d’actions de consolidation pour 2008. Parallèlement un appel à projets a été lancé cette année pourpermettre aux jeunes de rencontrer les « Wallons qui gagnent », de développer leur créativité, de les mettre en situation entrepreneuriale ou encore dedévelopper leur connaissance de la réalité des entreprises marchandes ou non-marchandes. Plus de 50 dossiers ont été rentrés et sont actuellement en cours detraitement à l’ASE. À la clé : 5 000 euros maximum par projet accepté. Exemple concret : l’école provinciale St Quentin à Ciney a rentréun projet pour le 2e degré baptisé « Agribassadeurs » destiné à réfléchir avec les élèves sur lesdébouchés possibles pour certains produits agricoles. Les élèves sont invités à présenter leurs idées sous forme d’élocutions,d’ateliers développés et animés par les élèves représentés par des «agribassadeurs» c’est-à-dire des jeunesambassadeurs de l’agriculture.
Les projets rentrés dans le cadre de l’appel doivent couvrir une année scolaire, un appel qui sera donc renouvelé chaque année.
1.Agence de stimulation économique (ASE) :
– adresse : rue du Vertbois, 13b à 4000 Liège
– tél. : 04 220 51 00.
2. Fondation Free
– adresse : chaussée de Louvain, 484 à 5004 Bouge (Namur)
– tél. : 081 20 66 10
– courriel : renseignements@freefondation.be
– site : http://www.freefondation.be
3. Onze opérateurs ont été agréés par l’ASE :
Ichec PME, Les jeunes entreprises, Cide-Socran, UCM, Cascade, Grou
pe One, Association club étudiants entrepreneurs, BEP, Héraclès, LME, Grappe jeunes Luxembourg 2010.
4. Quinze actions dont trois nouvelles ont été labellisées : Les jeunes ont du talent – Mon métier.be ; Back to school et J’entreprends@school.