Alter Échosr
Regard critique · Justice sociale

Archives

Asile : 850 places qui n'empêcheront pas l'asphyxie

Le réseau d’accueil des demandeurs d’asile est saturé. L’annonce de la création de 850 nouvelles places est une véritable respiration; mais, àterme, on sait déjà que cela ne suffira pas.

30-01-2009 Alter Échos n° 266

Le réseau d’accueil des demandeurs d’asile a atteint la saturation depuis plusieurs mois. L’annonce de la création de 850 nouvelles places bénéficiantd’un accueil digne de ce nom est une véritable respiration. Mais à terme, on sait déjà que cela ne suffira pas.

Nous vous en parlions dans l’Alter Échos n° 263, les conditions d’accueil des demandeurs d’asile restent préoccupantes. Depuis des mois, un graveproblème de saturation touche le réseau d’accueil des demandeurs d’asile. Certains d’entre eux sont hébergés dans des structures d’urgenceoù les conditions d’accueil et d’encadrement sont très sommaires, tant d’un point de vue sanitaire que social.

« Il est exact que les places d’accueil d’urgence ont été critiquées lors de ces dernières semaines, répond Marie Arena, ministre del’Intégration sociale (PS)1. J’ai envie de dire « à juste titre » au regard de ce que nous avons comme exigences en matière de qualité del’accueil. En revanche, l’alternative qui se présentait à nous, c’est-à-dire la rue, a pu être évitée. » La ministre si ellereconnaît les lacunes, se veut rassurante : « Afin d’éviter un refus technique dans la procédure d’asile des résidents d’un accueil d’urgence,causé par un accompagnement administratif défectueux, le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides a pris différentes mesures pourcontrôler ceci et pour rouvrir le dossier dans le cas où cela s’avérerait nécessaire2. »

Une pause avant une nouvelle saturation ?

Actuellement, 16 300 demandeurs d’asile et des étrangers d’autres catégories sont accueillis dans les centres d’accueil de Fedasil et de ses partenaires, alors quela capacité normale du réseau ne prévoit que 15 850 places. Les places d’accueil d’urgence incluses, cela revient à une capacité d’occupation de103 %, alors qu’il est question de saturation du réseau d’accueil lorsque celui-ci avoisine les 95 %… « Les places supplémentaires ne suffiront paspour répondre à la surcapacité actuelle, à l’accueil d’urgence et au nombre élevé d’entrées, explique Marie Arena. Nous devonsadopter une autre stratégie. C’est pour cette raison que, sur la base de ma proposition, le kern du 16 janvier a approuvé une augmentation de 850 places de lacapacité d’accueil. À cette fin, 5 millions d’euros seront mis à disposition de Fedasil. Je souhaite toutefois insister sur le fait que pour sortir de cette crise, ilva falloir aussi adopter d’autres mesures ; sinon, nous aurons à nouveau besoin de places d’accueil supplémentaires dans quelques mois. Pour prendre un seul exemple, quandil s’agit d’une demande de séjour pour raison médicale, l’Office des étrangers doit analyser le dossier en étant aidé par des médecins. Ilfaut savoir que l’Office connaît une telle carence de médecins qu’un tel dossier ne peut pas être examiné. En attendant, les personnes ne reçoiventqu’une aide matérielle. »

Au rythme actuel, on estime à 1 700 places les besoins en capacité d’accueil en 2009, soit quelque 10 % supplémentaires. Les 850 places obtenues de haute lutte– le changement de premier ministre semble avoir eu ses effets – représentent donc seulement la moitié de l’augmentation prévue et demandée pour 2009.« Nous verrons en juin s’il faudra continuer dans ce sens », précise la ministre à qui il a été demandé de dresser tous les mois un étatdes lieux afin de voir si la situation se stabilise.

Fedasil et la Croix-Rouge cherchent des lieux ; on recense les initiatives locales d’accueil (ILA) des CPAS qui pourraient être réactivées… Il s’agira cettefois de « vraies » places d’accueil, où les demandeurs d’asile recevront un accompagnement, où on leur exposera leurs droits et devoirs, les possibilitésd’un retour volontaire, etc.

On sait par ailleurs qu’une série de tables rondes ont été organisées en vue d’évaluer la loi de 2007 sur l’accueil3. Uneévaluation qui aurait déjà dû être présentée, ainsi que la loi l’exige, au Parlement. « J’ai simplement postposél’urgence de l’évaluation, répond Marie Arena, car aujourd’hui, les travailleurs de Fedasil sont au bout du rouleau. Venir leur imposer un travail nécessaire,mais plus administratif, d’évaluation, alors même qu’ils sont confrontés à des urgences pragmatiques d’accueil de personnes qui sont aujourd’huidans des conditions déplorables, c’était mettre la pression et peut-être les déconnecter de la réalité. »

1. Cabinet Arena :
– adresse : rue Ernest Blérot, 1 à 1070 Bruxelles
– tél. : 02 238 28 11
– courriel : marie.arena@minsoc.fed.be
2. Chambre des Représentants – Commission de la Santé publique – Réunion du 21 janvier 2009 – Extrait du compte rendu intégral (CRIV 52 – COM0423), réponse de la ministre Arena à une question de la parlementaire Écolo, Zoé Genot.
3. Selon la Loi du 12 janvier 2007 sur l’accueil des demandeurs d’asile et certaines autres catégories d’étrangers (« loi accueil »), entrée envigueur le 1er juin 2007.

catherinem

Pssstt, visiteur, visiteuse du site d'Alter Échos !

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, notamment ceux en lien avec le Covid-19, pour le partage, pour l'intérêt qu'ils représentent pour la collectivité, et pour répondre à notre mission d'éducation permanente. Mais produire une information critique de qualité a un coût. Soutenez-nous ! Abonnez-vous ! Et parlez-en autour de vous.
Profitez de notre offre découverte 19€ pour 3 mois (accès web aux contenus/archives en ligne + édition papier)