Alter Echos : Une formation en photographie en prison, c’est une formation un peu inhabituelle dans un tel cadre, non ?
Amandine Jansen : L’idée est née d’une volonté de détenus de se former en audiovisuel. Cela changeait des formations habituelles, en effet. De fil en aiguille, j’ai contacté l’École de photographie et de techniques visuelles Agnès Varda à Bruxelles, école de promotion sociale qui permet à des personnes qui n’ont pas leur CESS d’accéder à une formation. C’est comme cela que la formation est née, en étant plus axée sur la photo. On a pu former de la sorte une dizaine de détenus, un nombre non négligeable, sachant qu’en prison, suivre une formation en général demande un rythme particulier.
Alter Echos : Comment est née la collaboration avec le Musée de la Photographie ?
Anne-Flore Mary : Lorsque que j’ai proposé aux détenus de venir visiter le musée, tout simplement. De là est née la collaboration avec le Musée de la Photographie de Charleroi. Sans même voir les images, le Musée était partant d’accueillir le travail des détenus. C’était merveilleux ! Ce n’est pas tellement le résultat qui intéressait le musée, mais le projet en lui-même.
Amandine Jansen : L’exposition risque aussi d’être itinérante, du moins on l’espère. D’autres personnes se sont montrées intéressées.
Alter Echos : Pour vous, Anne-Flore, c’est la première fois que vous collaboriez avec des détenus ?
Anne-Flore Mary : C’est une première, en effet. J’ai découvert tout un univers. Mais je suis arrivée dans ce projet comme face à une page blanche, en n’ayant aucun préjugé. A la base, ma mission était simple : faire une formation en initiation à la photographie. Finalement, avec deux matinées par semaine, avec, en outre les aléas de la prison, c’est presque un peu juste. Les détenus sont d’ailleurs demandeurs de pouvoir bénéficier d’un autre module pour approfondir certains aspects comme Photoshop. C’était en tout cas très intense, et humainement, ce fut d’une richesse assez exceptionnelle. C’est difficile aussi de ne pas s’attacher car on rencontre des individus qui vivent une situation très lourde, celle de l’enfermement. Il y a beaucoup d’empathie quand on se lance dans un tel projet.
Amandine Jansen : La formation leur offre aussi une porte sur l’extérieur, en leur permettant de se rencontrer dans un autre cadre, autrement que dans le cellulaire. Les détenus découvrent une autre facette de leur détention. Ils se sont d’ailleurs énormément impliqués dans ce projet. Lors de la visite du musée, ils posaient 1000 questions. Ils étaient scotchés par les images de grands photographes et surtout très fiers de pouvoir être exposés à côté de grands noms.
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https://www.museephoto.be/