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Regard critique · Justice sociale

Bons ou mauvais élèves : se défaire des étiquettes

Colloque de CGé sur le thème « bons ou mauvais élèves : qu’est-ce que ça veut dire aujourd’hui ? ». Où les stéréotypes ontla vie dure

27-04-2010 Alter Échos n° 293

Changements pour l’égalité (CGÉ) a posé la question dans le cadre d’un colloque : « bons ou mauvais élèves : qu’est-ce que ça veutdire aujourd’hui ? ». Une question qui met en cause les stéréotypes qui collent à la peau et induisent des dynamiques d’échec. Mais surtout, une façon deparler de l’inégalité scolaire autrement.

Qu’est-ce qu’un bon élève ou un mauvais élève ? Ces étiquettes n’influent-elles pas sur ma perception des qualités humaines de l’enfant ? Commentdépasser ces clivages ? Voici quelques questions que l’on pouvait se poser le 27 mars lors de la journée organisée à Liège par le mouvement sociopédagogiqueCGÉ1. Une bonne trentaine de participants avait décidé d’esquiver les ripailles du week-end pour se pencher sur ces questions. Des formateurs, instituteurs,professeurs d’écoles de devoirs ou parents d’élèves étaient mobilisés pour une demi-journée divisée en deux ateliers. Tout d’abord, les participantsétaient conviés à réfléchir à des expériences vécues où le « label » bon ou mauvais élève avait pu influer surle parcours de l’élève. Puis, dans un second temps, un colloque plus classique était proposé avec des interventions de pointures de la pédagogie comme MarcelCrahay, professeur à l’Université de psychologie et des sciences de l’éducation de Genève ou Patrick Picard, chargé d’études à l’Institutfrançais de recherche pédagogique.

Parler des inégalités à l’école n’attire plus vraiment les enseignants. C’est ce qu’a constaté Gaëtanne Chapelle, formatrice au CGÉ : « Notremouvement essaye de réduire les inégalités à l’école depuis quarante ans. Face à une relative désaffection du public, il fallait trouver une autremanière d’aborder ce problème. Nous avons opté pour un angle psychologie sociale en posant la question suivante aux enseignants : comment, malgré soi, on fait rentrerdes élèves dans une spirale négative ? » Il y a évidemment une dimension sociale dans ce propos, car souvent ceux qui sont qualifiés de mauvaisélèves viennent de milieux défavorisés. Pour sensibiliser sur les nombreux stéréotypes associés aux mauvais élèves, CGÉ amené une enquête sur la base d’un questionnaire auprès de 350 enseignants. Les premiers résultats sont frappants « les qualificatifs employés à proposdes mauvais élèves sont presque tous négatifs sur des tas de choses qui n’ont rien à voir avec les résultats scolaires et qui concernent la personnalité del’élève. » Ainsi, lorsqu’on évoque un mauvais élève, de nombreux enseignants estimeront qu’il est aussi « égoïste, insouciant oudistant ».

Des étiquettes qui collent à la peau

Comment se débarrasser de ces étiquettes qui collent à la peau ? Les dynamiques inégalitaires à l’école sont tellement complexes qu’il n’y a pas deréponse simple. Néanmoins, CGÉ s’adresse clairement, avec cette journée d’étude, au monde enseignant : « L’objectif général est de voir commentmodifier nos pratiques pédagogiques afin de diminuer l’impact des stéréotypes. » Pour Marcel Crahay, « l’échec scolaire est le résultat d’un processusd’évaluation. Beaucoup de professeurs croient que c’est un fait extérieur, comme s’ils ne participaient pas à ce processus. Il faut une révolution cognitive des processusde formation. » Un point de vue que semble partager Gaëtanne Chapelle pour qui « il est important de réfléchir sur le dispositif pédagogique qui faitémerger la notion de bon ou mauvais élève plutôt que de dire à la rentrée « je vais agir en priorité sur les mauvais élèves » car ladistinction est faite. »

Ce rôle de l’enseignant est primordial pour Marcel Crahay : « L’enseignant peut instituer certaines normes sociales dans le groupe, surtout au primaire où soninfluence est plus directe. Il est possible de mettre en place une culture de classe différente, notamment par rapport à l’erreur, en l’acceptant, en s’en servant comme d’un outil deconnaissance, sans se moquer de l’élève qui se trompe. » Quant aux parents, ils ont aussi leur rôle à jouer : « Une attitude fataliste vis-à-vis del’école ne sert à rien, ils sont des acteurs dans cette machine scolaire. Lorsqu’on voit le système belge qui repose sur une éducation sélective, certains parentsen sont les défenseurs, les agents. » Car la question du bon ou du mauvais élève touche évidemment des questions fondamentales qui évoquent à PatrickPicard cette question, vieille comme l’école : « L’école doit-elle trier les meilleurs, les dominants par le savoir ou donner des instruments de la connaissance àun maximum d’élèves ? »

1. Changements pour l’égalité :
– adresse : chaussée de Haecht, 66 à 1210 Bruxelles
– tél. : 02 218 34 50
– courriel : info@changement-egalite.be
– site : www.changement-egalite.be

Cédric Vallet

Cédric Vallet

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