L’économie sociale est créatrice de richesses : activité économique, emploi, capital social, requalification urbaine. C’est la démonstration faitepar les intervenants aux derniers « petits déjeuners de l’économie sociale ». Le thème : « quelle articulation entre développement local,économie sociale et développement urbain ? » Ca se passait le 15 septembre, à l’invitation de SAW-B (Solidarité des alternatives wallonnes et bruxelloises) auxAteliers des Tanneurs, le nouveau venu des centres d’entreprises à Bruxelles1. Vécus et enjeux.
Nouveaux venus
« Aux Ateliers des Tanneurs, on a choisi de générer du chiffre d’affaires », annonce d’emblée Sophie Fétu pour présenter le nouveaucentre d’entreprises dont elle assume la direction. L’ancien Palais du Vin, rénové à l’initiative du CPAS de Bruxelles, offre au cœur des Marolles 12ateliers équipés et modulables de 117 à 200 m2. Une pépinière d’entreprises (5 espaces sur 120 m2) complète l’offre.« Nous privilégions un système mixte, pas exclusivement centré sur l’économie sociale stricto sensu », ajoute la directrice. « Au milieu desMarolles et à proximité du Sablon, les secteurs à privilégier sont l’ameublement, la décoration et la restauration d’antiquités ; l’horecaet l’artisanat en général plutôt que les activités de service », complète la directrice.
À peine six mois après leur inauguration, les Ateliers accueillent cinq entreprises dont quatre dans les secteurs ciblés. Toutes ont dû s’engager àcréer des postes de travail et/ou des formations pour des personnes en recherche d’emploi voire des jeunes en décrochage. L’équipe des Tanneurs, outre le conseil etl’accompagnement à la création d’activités, veille à favoriser des synergies entre ses « clients ». Mais aussi avec les acteurs du quartier, commele Comité général d’action des Marolles qui ambitionne de créer un cyber-espace didactique « contre la fracture numérique ».
Il y a là une opportunité de partenariat avec les Ateliers TIC Tanneurs (ATT). Cette future (?) Initiative locale de développement de l’Emploi (Ilde) est uneémanation de To Ring Assistance PC, petite entreprise hébergée aux Tanneurs qui propose du dépannage d’ordinateurs pour professionnels. Avec l’Ilde, les ATTambitionnent de rendre ce service accessible à des particuliers et de vendre en seconde main des ordinateurs reconditionnés par leurs soins ; le tout à prix trèsdémocratiques. En formant au passage des chômeurs et des stagiaires.
Enjeux
En révélant des talents existants dans leur environnement immédiat, les centres d’entreprises prouvent que le capital social, dans ces quartiers souventdélaissés, est tout sauf négligeable. « Quitte à l’enrichir d’apports « extérieurs » au quartier », souligne Dominique Decoster,directrice à l’Igeat, pour qui c’est le projet qui détermine le territoire et non l’inverse. « Le développement local ne se conçoit pas sansouverture au monde. » Pour José Menèndez, directeur d’Euclides2, « une fois la dynamique positive enclenchée, l’enjeu consiste àentretenir le capital social d’un quartier quand certains de ses habitants, en ascension socio-professionnelle, décident de le quitter. » Une piste consiste àaméliorer l’offre de services. Comme la création d’espaces publics numériques.
Autre enjeu : la capacité d’adaptation des équipes. Ou comment allier innovation, opportunités et entretenir une vision stratégique claire à moyen et longtermes. L’histoire d’Euclides témoigne de réajustements de tactiques réguliers. Accueillant principalement des indépendants à ses débuts en‘92, le centre a adopté en ’94 une démarche pro-active afin d’identifier, dans le quartier de Cureghem, des porteurs de projets d’économie sociale. En’96 il s’est aussi mué en promoteur d’entreprise avec la société MurMur (rénovation de fresques pour anciens annonceurs – toujours en activité).L’horizon reste le même : s’inscrire dans le développement local en créant activités et emplois. Cette expérience privilégie la logique du projet(un groupe en action qui réfléchit régulièrement), sur celle du programme (qui tend à reproduire des solutions toutes faites).
Enjeu à tiroirs : comment assurer un travail efficace en interne et établir dans le même temps des partenariats durables ? En fidélisant l’équipe du centred’entreprises, on établit durablement une relation de confiance avec les acteurs de l’environnement où s’inscrit l’action. Cette condition suppose que les moyensdont bénéficie la structure s’inscrivent dans une certaine durée. Elle renvoie également à la nécessité de fonctionner de façon nonspécialisée, d’accepter de relever les défis tant en termes de progrès social que de qualité de vie, etc.
Dernier enjeu relevé ce matin-là : comment croiser les points de vue et les cultures de travail plutôt que de cloisonner les intérêts ? En n’hésitantpas à s’inspirer tant du management public que privé dans le pilotage des projets. En favorisant, aussi, les partenariats multi-acteurs.
2. Centre d’entreprises et de développement local qui accueille aujourd’hui 27 entreprises et dispose de 7000 m2 à cet effet. Site : www.euclides.be