Le ministre de l’Emploi Peter Vanvelthoven (SP.A) a présenté les derniers chiffres émanant de l’Onem en matière d’activation des chômeurs. D’après lui, ilsprouvent l’efficacité du système lancé en juillet 2004. Une appréciation que ne partagent pas les plateformes de défense des chômeurs : selon elles, lesmêmes chiffres témoignent surtout d’une montée des sanctions et des exclusions.
L’appréciation positive du ministre de l’Emploi se fonde exclusivement sur la comparaison du nombre de chômeurs chez les groupes déjà activés (les moins de 30 anset les 30-40 ans) et ceux qui ne le sont pas encore : les 40-50 ans. On constate ainsi une diminution chez les premiers (- 8 % de chômeurs indemnisés de moins de 30 ans depuis 2004 ; – 6% pour les 30-40 ans) et une augmentation chez les seconds (+ 6% depuis 2004). Il faut cependant préciser que toute conclusion tirée de tels chiffres échoue à passer tousles tests de validité statistique : en comparant des catégories différentes, sans échantillon-témoin (par exemple des jeunes de moins de 30 ans qui n’auraient pasété activés), on enfreint une règle méthodologique de base. Par ailleurs, rien ne garantit que les baisses constatées ne se fassent précisémentau détriment des groupes non encore activés (en l’occurrence, les plus de 40 ans). En l’état actuel des données, on ne peut garantir que l’effet des mesuresoutrepasse la simple et traditionnelle permutation dans l’ordre des files de chômeurs. De plus, il y a au moins un effet de l’activation qui fait baisser mécaniquement le nombre dechômeurs des catégories activées : les exclusions et les suspensions qui découlent du processus mais qui ne constituent bien sûr pas un retour à l’emploi.
On regrettera par ailleurs que les chiffres fournis ne soient toujours pas décomposés selon les niveaux d’éducation des personnes concernées. Selon les plateformes dechômeurs et les syndicats, ce sont principalement les moins diplômés qui trinquent dans le système. Cette hypothèse ne peut malheureusement êtreétayée – ni démentie, bien sûr – par les chiffres de l’Onem.
Ce que les chiffres révèlent en revanche, c’est le changement d’attitude des services régionaux de l’emploi – et surtout du Forem, que certains Flamandsavaient naguère accusé de laxisme – en matière de transmission d’informations susceptibles de provoquer une suspension ou une exclusion pour le chômeur. Ainsi,par exemple, si pour l’ensemble de l’année 2005, le Forem a transmis à l’Onem 907 informations concernant un refus d’emploi ou de formation, ce chiffre estpassé à 3 104 pour les six premiers mois de l’année, soit une multiplication par plus de 6,8 en tendance annuelle !
Multiplier les catégories
Restent que si les conclusions optimistes du ministre Vanvelthoven ne reposent pas sur des bases statistiques sérieuses, la construction d’une contre-expertise est rendueextrêmement laborieuse par la complexité des chiffres et la multiplication des catégories. Exemple : du 1er juillet 2004 au 30 juin 2006, 202 372 chômeurs demoins de 30 ans ont reçu la lettre d’information qui marque l’entrée dans le processus d’activation. Mais pour une série de raisons, administratives ouliées à un changement de statut de la personne, moins de la moitié d’entre eux ont réellement reçu une convocation pour un premier entretien àl’Onem (90 683). Finalement, 68 136 entretiens seulement ont bel et bien eu lieu, et ils ont débouché sur 24 771 constats d’efforts insuffisants – une proportiond’évaluations négatives d’ailleurs croissante avec le temps. Tout est donc question de base de calcul choisie : en ramenant la proportion de sanctions et/oud’évaluation négative au total des entretiens qui auraient dû être effectués (202 372) ou au nombre de jeunes concernés (68 136), on obtientévidemment des résultats très différents. Encore a-t-on ici fait l’impasse sur une bonne partie des catégories reprises dans les statistiques! Mêmes’ils contestent l’interprétation ministérielle, les syndicats restent d’ailleurs prudents quant à l’interprétation de chiffres, qu’ils ontconfiée à leurs services d’études et qui doit encore faire l’objet d’une approbation officielle par les instances. La seule réaction officielle, pour lemoment, porte sur… une réaction de Pieter Timmermans, l’administrateur-directeur général de la FEB. Ce dernier s’est en effet fendu d’une déclaration pour le moinssurprenante : « Si on veut que la chasse soit bonne, mieux vaut ne pas battre le tambour. » Des propos qui lui ont valu une réponse officielle – et consternée –de la CSC.
À l’heure actuelle, la seule réaction officielle est celle de la Plateforme « Stop chasse aux chômeurs 1» qui réclame une évaluationqualitative du dispositif, maintient sa revendication de retrait du Plan et dénonce l’emballement de la machine, qu’indique la tendance haussière des évaluationsnégatives.
1. Plate-forme contre la chasse aux chômeurs, c/o Collectif Solidarité contre l’exclusion, ruePhilomène, 43 à 1030 Bruxelles – tél. : 02 218 09 90 – courriel : contact@stopchasseauxchomeurs.be