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"Code du logement bruxellois : les partenaires réaffirment leurs attentes et revendications"

19-11-2001 Alter Échos n° 109

Le 3 juillet 2001, le secrétaire d’État bruxellois en charge du Logement déposait un avant-projet d’ordonnance relatif au Code du logement bruxellois à laCommission du logement et de la rénovation urbaine du parlement bruxellois1. Le texte définitif devrait sortir pour la fin de la législature. Si les différents acteurs dulogement sont impliqués dans les discussions, le black-out est actuellement de rigueur par rapport au projet du gouvernement. Néanmoins, rien n’interdit aux différentspartenaires de faire part de leurs attentes ou de réaffirmer leurs revendications. Tour d’horizon.
Le Syndicat des locataires
Ce 30 octobre, le Syndicat des locataires (SDL)2 a présenté ses propositions et revendications au cours d’une conférence de presse. Tout en spécifiant qu’elless’inscrivaient clairement dans l’actualité politique de la préparation du Code du logement bruxellois, le SDL a expliqué qu’il n’en livrerait pas lateneur, car il était tenu à un devoir de réserve.
Ainsi, parmi les revendications, le Syndicat a insisté sur la nécessité de conditionner toute expulsion de locataire à un relogement préalable (« Pasd’expulsion sans relogement »). Il estime que cette proposition constituerait le « pendant socialement indispensable de celle relative au droit de propriété, actuellement inscritdans la Constitution (…) : ‘Nul ne peut être privé de sa propriété sans une juste et préalable indemnisation’. » Et de souligner : « Il va de soiqu’une telle disposition ne peut s’appliquer que si les pouvoirs publics prennent en charge tout ou partie des loyers impayés par les locataires défaillants. »
En guise de deuxième proposition, le SDL demande de réformer la fiscalité immobilière qui prévoit le calcul du précompte immobilier sur base d’unrevenu cadastral fixé en 1975, « soit de deux à trois fois moins élevé que les loyers réellement perçus aujourd’hui par les bailleurs ». Le SDLdénonce aussi le fait que « l’administration cadastrale déduit automatiquement du revenu cadastral un pourcentage forfaitaire correspondant à des travaux d’entretien– ou de rénovation – et ce, même si lesdits travaux n’ont pas été réalisés3 ! » En conséquence, il suggère qu’une mesuresoit prise pour obliger les propriétaires à présenter les justificatifs des travaux exécutés, afin de pouvoir bénéficier d’une réductiondu revenu cadastral. La base de la taxation, elle, se ferait sur la base des revenus locatifs réellement perçus.
Une autre proposition concerne l’accès à la propriété pour les catégories de revenus les plus bas. Pour ce faire, le SDL souhaite la créationd’un pouvoir d’acquisition pour ces catégories de personnes via des prêts sociaux à un taux d’intérêt de 0 %, par le biais du Fonds du logement.José Garcia, président du Syndicat des locataires, précise : « Il ne faut pas, pour les plus démunis, se limiter au logement social. » Concernant ce type de logement, ilinsiste sur les points suivants : d’une part, rénover le parc immobilier et, d’autre part, offrir la possibilité aux acteurs publics du logement (sociétésimmobilières de service public (SISP), régies foncières, CPAS, communes, etc.) d’acquérir des biens inoccupés du secteur privé « en vue de lesrénover et de les réinjecter dans le secteur locatif social. »
üe SDL voudrait que la loi sur « l’humanisation » des expulsions soit améliorée. Actuellement, la loi permet aux juges de paix d’accorder un délai d’un moisau locataire visé par une décision d’expulsion « en avertissant les CPAS afin qu’ils trouvent une solution de relogement. » Dans les faits, José Garcia signale que « deplus en plus de juges ne motivent pas leurs décisions. Ils présentent des délais plus courts et les CPAS ne peuvent pas réagir à temps. » À ce sujet, il notetoutefois l’engorgement des CPAS et l’impossibilité pour ceux-ci de trouver des solutions de relogement. En conséquence, le SDL suggère que la loi obliged’avertir les organisations qui assurent la défense des intérêts des locataires4. Enfin, l’association désire la création d’un « permis locatif » etla mise sur pied d’un service de contrôle pour vérifier la salubrité des logements.
Le Syndicat national des propriétaires
Du côté du Syndicat national des propriétaires (SNP)5, les revendications par rapport au contenu du futur Code du logement bruxellois sont de trois ordres. « Le premier ordre derevendications, nous explique Béatrice Laloux, directrice au SNP6, a trait à la ‘liberté assistée’. Il s’agit de privilégier la liberté, ledialogue, la concertation, la persuasion et l’information largement diffusée et répétée. » Et de suggérer de réorganiser des réunions avec lesorganisations de locataires : « En ne prenant pas les propriétaires à rebrousse-poil, on préserve l’offre. En effet, si on met en place trop de contraintes, si on rend pluscompliquée la location, cela va encore réduire l’offre de logements. En Flandre, toutes les mesures ont rendu l’accès aux logements encore plus difficile. Au SNP,nous préconisons de favoriser des formules telles que les chèques-logements, l’aide à la rénovation, etc. Si les pouvoirs publics mettent de l’argent, alorsils peuvent demander des comptes (par exemple, un loyer raisonnable, mais réglementé). Mais, même dans ce cadre, il faut que la démarche soit volontaire de la part dupropriétaire, il ne doit pas y avoir de contrainte. »
Le second ordre de revendications vise à éviter la généralisation. Béatrice Laloux : « Il faut éviter de dire que le logement, c’est uniquement lelogement des défavorisés, le logement c’est toute la population. Il est aberrant de réglementer uniquement en fonction des défavorisés alors que 80 % de lapopulation n’est pas concernée. Cela biaise le débat. Si certaines mesures sont indiquées pour certains citoyens, il ne s’agit pas de les étendre à toutle parc du logement. Il faut savoir traiter les locatýires comme des adultes et surtout ne pas créer des lois locataires contre propriétaires. Concrètement, il fautéviter de marginaliser de plus en plus une frange de la population. Il s’agit de ne pas tomber dans le piège de l’assistanat général, sans pour autant nier lefait que certains ont besoin de cette assistance. »
Cette réflexion amène le troisième ordre de revendications du SNP concernant les normes de qualité et de sécurité. « Nous sommes conscients qu’il y asur le terrain des situations dramatiques, admet la directrice au SNP. Comment faire pour ne pas aggraver le phénomène lui-même sur le plan statistique ? Nous pensons qu’ily a les normes f&eacut
e;dérales du droit de bail de résidence principale. Un consensus a abouti à la mise en place de normes minimales. Cependant, les représentants deslocataires eux-mêmes n’étaient pas demandeurs de normes plus strictes parce qu’ils tiennent compte de ce qui existe et des moyens des locataires. Cela dit, le SNP estentièrement partisan d’une amélioration progressive et raisonnable du parc locatif. Si nous pouvons contribuer à cela – par le biais de l’information, de laconcertation avec les instances compétentes –, nous sommes prêts, à condition que l’on ne mette pas les propriétaires à genoux. »
RBDH et FéBUL
Le Rassemblement bruxellois pour le droit à l’habitat (RBDH)7 et de la Fédération bruxelloise des unions des locataires (FéBUL)8 ont des revendications communesconcernant le futur code. Celles-ci sont reprises dans le numéro 4 d’Art. 23, la revue trimestrielle du RBDH, consacré au « Mémorandum Droit à l’habitat ». Ce dernierse résume dans la formule suivante : « Chaque personne doit pouvoir disposer d’un logement adapté de bonne qualité, dans un environnement convenable, à un prixabordable et avec une garantie d’occupation. »
La première partie du mémorandum du RBDH concerne la qualité du logement :
> des normes minimales de qualité et de sécurité pour tous les logements ;
> l’introduction d’un permis de location avec contrôle à la clé assuré par les communes et la Région ;
> des primes à la rénovation avec augmentation du montant maximum des travaux acceptés9, subsidiation des honoraires d’architecte ou des coûtsd’étude, et autres, valables tant pour les particuliers que les associations, et pour tout type de logement ;
> l’exonération ou la diminution du précompte immobilier pour la rénovation et la réutilisation des logements vides et insalubres ;
> l’exonération ou la diminution du précompte immobilier pour la location à des associations « sociales » de logement ;
> des sanctions pour les propriétaires qui ne rénovent pas ;
> le droit de gestion sociale des habitations déclarées insalubres ou inhabitables pour les SISP, le Fonds du logement, les communes, les CPAS, les AIS, etc.
Le second volet des revendications vise l’adaptation de l’offre de logements à la taille des ménages (soit augmenter le nombre de logements pour familles nombreuses) età l’âge et aux handicaps des locataires (soit des logements accessibles et adaptés pour ces personnes). Un autre volet concerne le droit à l’énergie « envue d’assurer à tous l’usage du chauffage, de l’éclairage et de l’eau ». La quatrième partie du mémorandum insiste sur la qualité del’environnement du logement : l’aménagement de l’espace public, les équipements de quartier, la santé, la mobilité. En ce qui concerne le montant duloyer, le RBDH estime qu’il ne devrait pas dépasser 25 % du budget du ménage, y compris pour les revenus les plus bas. Cela impliquerait un contrôle des loyers etl’instauration d’une allocation générale de loyer pour les plus bas revenus.
Par rapport aux logements sociaux, le RBDH estime qu’ils devraient être accessibles également aux locataires sans revenus (sans-abri, réfugiés, etc.), qu’unquota de création de grands logements devrait être imposé dans les projets de rénovation, etc. Tout en émettant quelques doutes par rapport au projet demixité sociale, le RBDH préconise plutôt de renforcer la participation des locataires et de créer un centre de formation pour l’accompagnement social dans leslogements sociaux. Des moyens supplémentaires sont également demandés pour les agences immobilières sociales (les AIS). D’autres exigences concernent le Fonds dulogement (ouvrir celui-ci aux familles sans enfants, actualisation de la formule location-achat, etc.), l’instauration d’un droit de préemption pour la Région, les communesou les CPAS, la prime à l’acquisition (abaisser les conditions de revenus de 1.350.000 F à 900.000 F pour y avoir accès), la création d’un « observatoire del’habitat », la résolution des litiges locatifs via la conciliation au sein de commissions d’arbitrage (associations de locataires/associations de propriétaires) ou encorel’assurance que soit relogée toute personne expulsée.
Enfin, si la Fébul, Fédération bruxelloise des unions de locataires, partage l’ensemble des revendications du RBDH, néanmoins, elle insiste toutparticulièrement sur la création de grands logements et l’augmentation des moyens des AIS.
1 L’intervention d’Alain Hutchinson est consultable sur le site du secrétaire d’État : http://www.hutchinson.irisnet.be/FR/ACTU_FR/INTERV_F/010903RB.htm.
2 Square Albert Ier 32 à 1070 Bruxelles,tél. : 02 522 98 69, fax : 02 524 18 16, e-mail : syndicatdeslocataires@swing.be.
3 Souligné par le Syndicat des locataires.
4 Une proposition de loi a été déposée en ce sens au Sénat. Elle prévoit aussi l’allongement du délai de réaction à six mois.Néanmoins, les discussions sur ce texte n’avanceraient pas.
5 Rue du Lombard 76 à 1000 Bruxelles, tél. : 02 512 62 87.
6 Béatrice Laloux s’occupe des Régions bruxelloise et wallonne et a un homologue flamand, compétent pour le Nord du pays, d’où la dénomination »directrice au SNP ».
7 Rue du Poinçon 19A à 1000 Bruxelles, tél. : 02 502 84 63, e-mail : rbdh@skynet.be.
8 Rue du Progrès 333 à 1030 Bruxelles, tél. : 02 201 03 60, e-mail : febul@skynet.be.
9 Si les textes annoncent une intervention allant de 70 % à 80 %, dans les faits, celle-ci n’excède pas les 40 %.

Baudouin Massart

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