À la fin novembre 2001, la Fédération bruxelloise des unions de locataires (FéBUL)1 a programmé un voyage d’études en Angleterre, à Chester, avecpour objet « la participation des habitants ». Il le faisait à la suite d’un précédent voyage d’étude entrepris en novembre 1998 ayant pour but de « prendreconnaissance d’une série d’expériences de ‘participation des locataires’ dans la gestion des logements sociaux et de visiter le Centre national de formation des locataires àChester (NRTC). » L’objectif de ces deux voyages était de s’inspirer des méthodes anglaises pour en retirer les bonnes pratiques et les appliquer au niveau de la Régionbruxelloise.
Des enseignements toujours d’actualité
En 1998, plusieurs conclusions avaient été tirées. La diversification des formes de ‘participation des locataires’ pouvait aller « du simple choix d’être consultéobligatoirement jusqu’au droit de racheter l’estate des pouvoirs locaux ou de transférer la propriété à un autre propriétaire social ». Autre caractéristique: l’approche professionnelle selon laquelle « les habitants peuvent faire appel à des agences indépendantes de conseil et de formation pour les aider à monter desprojets.(…) Ces agences ne vont jamais faire le travail ‘à la place’ des habitants. »
Par ailleurs, avec le temps, le législateur anglais a « traduit les aspirations des habitants les plus actifs en acquis légaux ». Un accent tout particulier est mis sur la formation deshabitants : « La création d’un centre national de formation, le National Tenants Resource Centre2 fin 1995 a encore augmenté les possibilités de formation tout en permettant desystématiser les expériences des communautés locales. » Dans le prolongement de la systématisation des expériences apparaît, bien évidemment, lanécessité d’évaluer et de réaliser des recherches sur ces mêmes expériences pour aller de l’avant. Enfin, la participation des habitants requiert des moyensfinanciers importants afin d’éviter que « la participation ne se limite pas à l’action de quelques bénévoles idéalistes qui risquent de perdre courage aprèsquelques échecs. » Ces moyens doivent également être diversifiés : pouvoirs publics, fondations et sponsors privés.
Les enseignements retirés de ce premier voyage restent toujours d’actualité. Il est bon de préciser que la situation des quartiers où ont été mises en placedifférentes formes de participation d’habitants « est incomparable avec celle des pires quartiers de Bruxelles (…) Mais rien ne protège Bruxelles-Capitale contre une telleévolution. Une approche ‘communautaire et participative’ est sans doute un moyen pour la contrecarrer ».
Trois enseignements semblent « transposables » à la Région :
> « l’importance de la formation continue des habitants et des professionnels;
> l’importance de systématiser les expériences de travail communautaire, de promouvoir les expériences positives et d’analyser le pourquoi des échecs et, enfin, lanécessité de créer des contacts entre les différents projets;
> les avantages de la mise sur pied ou de l’existence d’associations ou d’agences de conseil et de formation auxquelles les habitants et les instances officiels peuvent faire appel. »
La formation des habitants est au centre de la cohésion sociale
Le deuxième voyage est intimement lié aux projets bruxellois de cohésion sociale. « En tout, le cabinet d’Hutchinson consacre 1,7 million de francs par projet, explique ChilleDeman, coordinateur de la FéBUL. Cela permet d’engager une personne à temps plein, mais très peu formée et avec peu d’expérience3. Cela permet d’engager un »Rosetta » – ou deux à mi-temps –, c’est d’ailleurs ce qui a été fait dans la plupart des projets, mais cela ne dure qu’un an. Par définition, un“Rosetta » n’a pas d’expérience, cela demande donc beaucoup de temps et d’énergie pour former la personne. Ensuite, une fois que le travailleur commence à devenirindispensable, le contrat s’achève. Il faut donc tout recommencer avec un autre ou trouver un subside supplémentaire. »
Chille Deman insiste sur la nécessité de former les personnes engagées dans le cadre des projets de cohésion sociale pour ne pas les envoyer au casse-pipe : « Nous avonsdonc mis sur pied une formation hebdomadaire au début, puis bimensuelle. Nous avons prévenu les différents porteurs de projets de cohésion sociale et nous l’avonségalement ouverte aux autres unions de locataires même si elles n’étaient pas impliquées dans ce type de projet. » Depuis octobre 2000, une vingtaine de personnes suiventcette formation régulièrement, où il y a échange d’infos et d’expériences. On devrait bientôt procéder à la publication de ces échangesen tant qu’instruments de travail. « Cela reste toutefois du dilletantisme, précise Chille Deman, il n’y a pas d’argent pour ces formations. Nous faisons cela parce que cela rentre dans nosattributions, mais avec un peu plus de moyens et davantage de temps, nous pourrions en tirer 1.000 fois plus (…) Le deuxième voyage a en effet révélé les limites desprojets de cohésion sociale menés avec des habitants non formés. Il n’y a ni méthode d’organisation ou de gestion des réunions avec les habitants, nous nousretrouvons donc avec des ‘réunions-crachoirs’ dont nous ne savons que faire. Il faudrait pouvoir aller au-delà, proposer aux gens des activités et des moyens de formation et dedéveloppement des capacités des gens avec qui nous travaillons. »
Et d’ajouter encore : « Avec la nouvelle ordonnance du Conseil consultatif des locataires – qui sera rendue obligatoire dans chaque SISP (société immobilière de servicepublic) –, il faudra aussi former les délégués élus afin que chaque conseil consultatif soit effectif (…) L’obligation d’informer tous les habitants et laformation des délégués élus a été inscrite dans l’ordonnance. Maintenant, il faut créer des instruments pour pouvoir le faire. »
1 Rue du Progrès 333 à 1030 Bruxelles, tél. : 02 201 03 60, e-mail : febul@skynet.be.
2 National Tenants Resource Centre, Trafford Hall, Ince Lane, Wimbolds Trafford, Chester, CH2 4JP, Grande-Bretagne, tél. 01244 300246, site : http://www.traffordhall.com .
3 Dans le 1,7 million sont compris les frais de fonctionnement.
Archives
"Cohésion sociale : la Fébul recourt aux "bonnes pratiques" anglaises"
Baudouin Massart
17-12-2001
Alter Échos n° 111
Baudouin Massart
Pssstt, visiteur, visiteuse du site d'Alter Échos !
Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web.
Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus,
notamment ceux en lien avec le Covid-19, pour le partage, pour l'intérêt qu'ils représentent pour la collectivité,
et pour répondre à notre mission d'éducation permanente.
Mais produire une information critique de qualité a un coût. Soutenez-nous ! Abonnez-vous !
Et parlez-en autour de vous.
Profitez de notre offre découverte 19€ pour 3 mois (accès web aux contenus/archives en ligne + édition papier)
Sur le même sujet
Les plus consultés
- Violences sexuelles, l’injuste prix
- WhatsApp à l’école: qui a eu cette idée folle?
- Communautés d’énergie,
menacées par les entreprises? - «Derrière les adultes à la rue, il y a des enfants qui trinquent.»
- La livraison de colis, enjeu politique en devenir
- Bouillon de lectures
- Le cancer du poumon,
une maladie de pauvres?