Alter Échosr
Regard critique · Justice sociale

Archives

"Comité de vigilance des sans-papiers de Charleroi : "Stop à l'impunité des négriers !""

22-07-2002 Alter Échos n° 124

Le comité de vigilance des demandeurs d’asile de Charleroi et environs1, regroupant entre autres la FGTB, le MOC et l’association Frontières ouvertes, ont tenu uneconférence de presse le 5 juillet dernier, afin de « dénoncer le double piège hypocrite dans lequel les sans-papiers et clandestins sont enfermés par nos gouvernementssuccessifs ». Parmi les récriminations du comité : l’impunité dont jouissent les négriers. On se souvient que début mars 2002, la ministrefédérale de l’Emploi, Laurette Onkelinx (PS), et le ministre fédéral des Affaires sociales, Frank Vandenbroucke (SP.A), constataient dans une communication communeque l’économie souterraine en Belgique s’alimentait de plus en plus d’une main-d’œuvre issue des filières clandestines d’immigration. Un constat poséau terme d’une campagne de contrôles sans précédent menée dans un millier d’entreprises « à risque ». Pour la première fois, les agents de l’Inspection sociale(ministère de l’Emploi) et leurs collègues des Lois sociales (ministère des Affaires sociales) organisaient une série de descentes conjointes, avec l’appui de la policelocale et, dans certains cas, des services de l’Hygiène.
Le secteur de la construction bat tous les records
« L’éventail des situations d’exploitation est très large, précisait à l’époque la ministre de l’Emploi. Cela va de l’atelier clandestin, où lesgens sont cloîtrés et menacés, jusqu’à l’entreprise établie qui pratique le ‘simple’ travail au noir. Il y a, très souvent, des drames humains.Dans tous les cas, il y a un processus de dislocation du système social. »
L’enquête donnait les résultats suivants : sur 1.862 travailleurs contrôlés, 742 (soit 47 %) n’avaient pas les documents sociaux requis. 44,2%d’irréguliers se situent dans le secteur de la construction, 11,1 % dans les restaurants exotiques, 9,9 % dans l’agriculture, horticulture, 9,6 % dans la prostitution, 9,1 % dansla confection et 6,4 % dans le secteur du nettoyage. Principales victimes des nouveaux négriers, les clandestins : les Asiatiques (essentiellement les Chinois et les Turcs) dans le secteurHoreca, les Européens hors UE (Polonais, surtout) dans la construction et les Africains (beaucoup de Rwandais) ainsi que les Indiens dans les entreprises agricoles et horticoles. En mars, lesdeux ministres annonçaient davantage de moyens pour traquer ces nouveaux négriers : caméras digitales pour une meilleure identification des contrevenants et la mise en œuvrede preuves visuelles (ateliers clandestins…) ainsi que la création dès l’été 2002 d’une banque de données centralisée sur la traite des êtreshumains qui doit permettre aux divers services concernées (inspections, police, autorités judiciaires…) de partager témoignages, pièces à conviction et touteautre donnée susceptible d’intensifier la traque aux négriers.
Un an plus tard, aucun négrier n’a été condamné
« Fort bien, constate Pasquale Colicchio, président du Comité et représentant de la FGTB Charleroi, mais d’après les renseignements pris au ministère del’Emploi fédéral, aucun employeur n’a été jusqu’ici poursuivi ni emprisonné2, or, les dossiers sont à la disposition du parquet depuis mai2001. Pour nous, cette légèreté est un signal fort qui ne dissuade pas les employeurs à continuer à employer des illégaux. Sans aucune protection sociale, niaide sociale, sans revenus, sans autre choix, les demandeurs d’asile participent, malgré eux, à la dérégulation des salaires et des conditions de travail dans lesentreprises et constituent une pression sur les travailleurs déclarés au sein de ces mêmes entreprises. Dans l’intérêt de ceux-ci, les problèmesliés à la régularisation doivent être résolus au plus tôt, sous peine d’accentuer fortement la flexibilité et la dérégulationsociale. »
1 Comité de vigilance des demandeurs d’asile de Charleroi et environs, bd d’Avreux, 36-38 à 6000 Charleroi.
2 Étranger au noir – L’employeur qui occupe illégalement de la main-d’œuvre étrangère est passible d’une peine de prison de 8 jours à un an et d’une amende de42 à 148 euros. En cas de classement sans suite, possibilité d’amende administrative de 371 à 2.478 euros.
Clandestin au noir – L’occupation d’un étranger qui est illégalement dans le pays est punissable d’une peine de prison d’un mois à un an et d’une amende de 148 à 743euros. En cas de classement sans suite, l’employeur risque une amende administrative de 3.781 à 12.394 euros.
Documents sociaux – L’employeur qui ne dispose pas de registre du personnel, qui ne le tient pas à jour ou qui le trafique commet une infraction à la législation des documentssociaux. Il est passible d’une peine de prison de 8 jours à un an et d’une amende de 0,64 à 123 euros. Dans certains cas, cette amende doit être multipliée par le nombre detravailleurs non inscrits. Là encore, en cas de classement sans suite, possibilité d’amende administrative de 49 à 9.296 euros.

catherinem

Pssstt, visiteur, visiteuse du site d'Alter Échos !

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, notamment ceux en lien avec le Covid-19, pour le partage, pour l'intérêt qu'ils représentent pour la collectivité, et pour répondre à notre mission d'éducation permanente. Mais produire une information critique de qualité a un coût. Soutenez-nous ! Abonnez-vous ! Et parlez-en autour de vous.
Profitez de notre offre découverte 19€ pour 3 mois (accès web aux contenus/archives en ligne + édition papier)