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Regard critique · Justice sociale

Community Land Trust, un modèle anglo-saxon pour un problème universel

Un colloque sur le logement coopératif organisé par le Rassemblement bruxellois pour le droit à l’habitat (RBDH) vient de poser la question : quelles pistes suivre pouraméliorer le droit au logement ?

16-11-2009 Alter Échos n° 284

Un colloque sur le logement coopératif organisé par le Rassemblement bruxellois pour le droit à l’habitat (RBDH)1 vient de poser la question : quelles pistessuivre pour améliorer le droit au logement ?

On aurait pu titrer Tintin au pays des Soviets… américains après la visite d’une délégation belge dans un Community Land Trust auxÉtats-Unis. Mais après une législature où le gouvernement bruxellois a été loin de réaliser ses ambitions en matière de logement,différents acteurs du secteur viennent de se rassembler pour étudier cette piste qui ne prête pas à sourire : celle du logement coopératif.

« L’idée est venue après un colloque à Lyon sur les coopératives d’habitat où différents acteurs du secteur étaientprésents », nous explique Loïc Geronnez, sociologue à Periferia2. Autre élément déclencheur, le projet de la rue Fin, mené par lamaison de quartier Bonnevie3. Ce projet original mêlant habitants, milieu associatif et pouvoir communal autour de la réalisation de quatorze logements vient à terme.« L’expérience a été particulièrement positive. Nous recherchons des moyens pour qu’elle puisse faire tache d’huile », complète WernerVan Mieghem, président du RBDH.

Un mouvement puissant aux États-Unis

Au centre des discussions : les Community Land Trusts (CLT), expression anglo-saxonne intraduisible, sont des organisations qui produisent des logements abordables pour les petits revenus.Modèle créé aux États-Unis à la fin des années 60, il se développe très régulièrement particulièrement durant lesannées 80. En 1992, une définition des CLT est coulée dans une loi fédérale. Et inévitablement, la notion réapparaît au lendemain de la crisedes subprimes.

Divers éléments de base fondent l’identité des CLT qui peuvent être très variées dans leur structure et leur fonctionnement.L’élément-clé est la séparation entre la propriété foncière et la propriété de l’immeuble. L’acquisition des terrainspar le CLT permet de soustraire ceux-ci au système spéculatif. Mais si le CLT reste propriétaire, il accorde le droit d’usage par emphytéose aux habitants. Ce droitest cependant assorti de contraintes : occupation réelle du logement, ristourne d’une partie importante de la plus-value (75 %) en cas de revente. La gestion est pour sa partdéléguée à un Conseil d’administration composé de trois tiers ; les habitants/utilisateurs, d’autres membres ayant investi dans la CLT et les pouvoirspublics. Cet équilibre garantit la gestion démocratique au service de la collectivité.

Passer outre les clivages idéologiques classiques

Les CLT semblent permettre de dépasser les clivages idéologiques entre partisans de l’aide à l’acquisition et ceux de la construction massive de logements sociaux.L’aide à l’acquisition est réelle, mais les moyens restent à la collectivité, constituant ainsi un instrument radical contre la spéculation.
Autre avantage essentiel : l’impact du coût pour les finances publiques est très limité. « À Burlington, il a fallu environ deux millions de subsides pour aider357 ménages à devenir propriétaire. À l’aide d’un programme classique de subsides, le coût eût été de plus de dix millions »,soutient Loïc Geronnez. « Au niveau économique, c’est plus efficace. Au niveau social, c’est plus efficient. »

Alors, une arrivée des CLT en Belgique pour bientôt ? Le système de la propriété séparée existe en tout cas dans le système juridique belgepar l’existence du droit de superficie récemment activé par la commune d’Etterbeek, ainsi que par l’emphytéose. En outre, il existe dans l’histoire deslogements sociaux en Belgique des exemples de coopératives comme celles qui ont présidé à l’édification des cités-jardins.
Reste à trouver les statuts juridiques adaptés, à trouver des pistes pour l’acquisition des terrains (le deuxième volet des contrats de quartier pourrait enconstituer un) et à rassembler les moyens financiers. « Ce colloque a permis d’éveiller l’intérêt des pouvoirs publics, principalement dusecrétaire d’État bruxellois au Logement. Des pistes d’études sont nées dans les ateliers notamment avec Credal au niveau du financement ou encore avec laFebecoop pour le lien à faire avec le secteur de l’économie sociale », conclut Werner Van Mieghem.

1. RBDH-BBRoW (Rassemblement bruxellois pour le droit à l’habitat, Brusselse – Bond voor het Recht op Wonen) :
– adresse : quai du Hainaut, 29 à 1080 Bruxelles
– tél. : 02 502 84 63
– site : www.rbdh-bbrow.be

2. Periferia :
– adresse : rue de la Colonne, 1 à 1080 Bruxelles
– tél. : 02 544 07 93
– site : www.periferia.be
3. Maison de quartier Bonnevie :
– adresse : rue Bonnevie, 40 à 1080 Bruxelles
– tél. : 02 410 76 31
– site : http://bonnevie.vgc.be

Jacques Remacle

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