Le 27 janvier dernier, ont eu lieu les deuxièmes élections des Conseils consultatifs de locataires (Cocolos) au sein des logements sociaux bruxellois. La Fébul(Fédération bruxelloise des unions de locataires)1 et le Syndicat des locataires2 nous ont livré leurs commentaires au vu de la participation… En netrecul !
Comme le rappelait la secrétaire d’État bruxelloise au Logement, Françoise Dupuis3, les représentants des Cocolos ont une voix consultative au sein des CAdes sociétés immobilières de services publics (SISP). Ils sont chargés de donner l’avis des locataires dans des sujets tels :
• “les travaux de rénovation et d’aménagement d’immeubles, de leurs abords et de leur environnement;
• la méthode de calcul des charges, leur décompte annuel, leur mode de répartition et le montant des provisions;
• l’adoption ou la modification de règlements d’ordre intérieur;
• l’achat d’équipements collectifs;
• et les animations sociales et culturelles proposées aux locataires.”
Les élections ont été organisées dans 21 SISP sur 33. Elles n’ont pu être organisées dans les autres SISP, “car le nombre de candidats minimum requisde 5 n’a pas été atteint à la date limite de dépôt des candidatures, le 4 octobre 2006”, a expliqué la ministre. Rappelons qu’un arrêtéavait été pris le 31 août 2006 par la ministre : il supprimait l’existence de listes concurrentes pour les Cocolos.
La Fébul tire un premier bilan
Selon la Fébul – qui a un mandat de la SLRB (Société du logement de la Région de Bruxelles-Capitale) pour former les candidats et les élus des Cocolos -, 11 %des locataires ont exprimé un vote valable, soit une baisse de 7 % par rapport aux premières élections de 2004 (18,42 % de votes valables). Par ailleurs, 213 candidatss’étaient présentés dans 21 SISP, contre 205 élus dans 23 SISP la fois précédente.
Pour Chille Deman, coordinateur de la Fébul, plusieurs facteurs expliquent la baisse du taux de participation et la difficulté de trouver des candidats, outre le fait que le voten’est pas obligatoire :
• “dans beaucoup de SISP, le nombre de candidats ne dépassait pas le nombre de délégués à élire.” Les locataires n’ont pas mesurél’importance de participer au vote et de confirmer les candidats dans leur mandat” ;
• il y a eu de fortes attentes par rapport aux Cocolos, or ceux-ci ne sont pas en mesure de tout résoudre, d’où un sentiment de déception ;
• “le dispositif est jeune et les délégués qui se sont présentés en 2004 ont eu beaucoup de choses à apprendre avant de se mettre en place. Leprocessus d’écoute et d’action collective prend du temps et les résultats sont lents et peu visibles”.
• la période pour déposer des candidatures a été trop courte entre la modification de l’arrêté (31 août) et la clôture des listes (4octobre). “Nous sommes convaincus que, avec plus de temps, des locataires hésitants ou moins informés auraient pu se décider et prendre une part active au dispositifCocolo.”
L’analyse du Syndicat des locataires
Le Syndicat des locataires observe également une nette diminution du taux de participation. Pour José Garcia, secrétaire général du Syndicat, cette baisses’explique par une prise de conscience de n’obtenir qu’un pouvoir restreint : “Ces élections ont l’apparence de la démocratie. Au CA, les représentants des Cocolos n’ontqu’une voix consultative. De plus, ils ne peuvent pas prendre connaissance de certaines situations (exemple : problèmes de personnel). Le système stigmatise les élus. Il estcompréhensible que le CA craigne qu’un représentant des locataires n’aille divulguer des informations, mais alors cela vaut aussi pour les autres membres du CA.” Il pointe aussile trop-plein d’attentes par rapport aux premières élections, et la déception qui en a découlé.
José Garcia perçoit également ce désabusement à travers la faible fréquentation des formations qu’il organise pour les élus. À travers sesformations, le Syndicat veut apprendre aux élus à adopter une attitude critique : “L’essentiel est qu’il s’approprie les enjeux.” Ceux-ci peuvent concerner le calcul desloyers, la fixation des charges ou encore le règlement d’ordre intérieur.
Concernant la suppression des listes, le Syndicat rappelle qu’il était partisan du maintien de celles-ci, mais qu’il a plié face à la demande. “Si nous plaidions pourplusieurs listes, ce n’était pas pour faire de la guérilla, souligne-t-il. Pour preuve, on a eu de tout sur le terrain, y compris des collaborations entre élus de listesdifférentes ou des conflits entre personnes au sein d’une même liste. En fait, ce qui fait que ça marche, c’est le fait que les gens se mettent ensemble autour d’unetable.”
Que retenir?
Pour sa part, la Fébul tient à souligner “le travail de proximité mené par de nombreux délégués Cocolo que ce soit dans les contacts, dans laréalisation d’affiches, de tracts, dans l’organisation de rencontres et de moments de convivialité”. À l’inverse du Syndicat, elle estime que les récentesélections “constituent un renforcement de la démocratie, de la participation et de la transparence au sein du logement social”.
À court terme, il signale que des élections vont être réorganisées dans six mois dans une SISP, où seuls 4,99 % des électeurs se sontexprimés (il faut un minimum de 5 %).
Par ailleurs, dans deux sociétés, des candidats sont en train de récolter 10 % de signatures des locataires pour provoquer l’organisation d’élections dans un an. LaFébul constate aussi que la campagne d’élections a été cette fois-ci menée par les “pionniers des Cocolos”, soit des“délégués qui sont allés vers les locataires” pour les sensibiliser, les soutenir, créer du matériel. Et de pointer l’exemple du Cocolo du Logisqui a apporté son soutien actif à deux nouveaux Cocolos : l’un au Floréal, l’autre à Ville et Forêt.
Du côté du Syndicat, José Garcia est plus circonspect : “J’espère que dans trois ans il y aura toujours des Cocolos. Mais je pense aussi qu’il y a dessociétés qui ne jouent pas le jeu. Normalement, elles doivent fournir des locaux, cependant certaines ne le font pas. Il faut aussi que les choses changent, car les gens sontélus sur cette base. Or, si les propositions sont peu ou trop faiblement suivies, les locataires vont se rendre compte que cela ne sert à rien et se désintéresser desCocolos.”
Notons que la Fébul plaide pour une réflexion en profondeur sur le dispositif, afin que celui-ci devienne “encore plus performant et plus proche des habitants” et que savisibilité soit renforcée.
Chille Deman insiste sur un accompagnement plus rapproché des conseils élus : “Plusieurs Cocolos demandent un appui et un soutien méthodologique quotidien sur leterrain.”
Or, justement, en 2004, cinq ACS avaient été octroyés aux deux associations pour assurer cet accompagnement : le Syndicat a pu engager trois ACS, tandis la Fébul n’a puengager les deux autres, car il lui manquait le financement nécessaire. La balle est donc dans le camp du politique…
1. Fébul, rue du Progrès, 333 à 1030 Bruxelles – tél. : 02 201 03 60 –
courriel : febul@skynet.be
2. Syndicat des locataires, square Albert Ier, 32 à 1070 Bruxelles –
tél. : 02 522 98 69 – fax : 02 524 18 16 –
courriel : syndicatsdeslocataires@gmail.com
3. Cabinet de Françoise Dupuis, bd du Régent, 21-23 à 1000 Bruxelles –
tél. : 02 506 33 15.