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Santé

Covid-19 : un petit coup de téléphone, ça ne peut pas faire de mal

Plusieurs mutualités ont lancé un projet visant à contacter systématiquement, par téléphone, certains de leurs bénéficiaires âgés de plus de 65 ans. But de l’opération: s’assurer que tout va bien après 18 mois de pandémie…

06-07-2021
CC Flickr/Alan Levine

Depuis mai 2021, Éric Colle prend son téléphone de temps à autre, jette un œil sur la liste qui se trouve devant lui, et appelle l’un des noms des personnes qui y sont mentionnées. Toutes sont inscrites à la mutualité Saint-Michel (Mutualités chrétiennes), âgées de 65 ou plus et bénéficiaires de l’intervention majorée (BIM), qui leur permet de bénéficier de remboursements plus importants pour leurs soins de santé. «Ce sont des personnes fragiles, que l’on considère à juste titre comme un public cible», explique Éric Colle, qui est également responsable du service social de la mutualité. Son objectif? Après un an et demi de semi-confinement, il s’agit de «voir comment ces personnes s’en tirent dans leur vie quotidienne, quel est l’état de leur santé mentale et si elles sont à jour au niveau des informations relatives aux mesures sanitaires et la vaccination», explique-t-il.

Jusqu’ici, Éric Colle a appelé de 20 à 30 personnes. Mais il n’est pas le seul: 15 équivalents temps-plein, spécialement formés, sont actuellement actifs aux Mutualité chrétiennes et dans les autres mutualités présentes sur le territoire bruxellois (Solidaris, Mutualités libres, Mutualités neutres, Mutualités libérales) pour effectuer la même tâche. Jusqu’ici, 4.000 à 5.000 personnes issues du public cible auraient déjà été contactées, sur un total que Conrad van de Werve, attaché de presse des Mutualités libres, estime à 50.000  «Il s’agit d’un projet intermutualiste visant à contacter ce public-cible dans un contexte de Covid, précise Conrad van de Werve. Ces personnes sont en général plus isolées, moins bien informées. Et il y a aussi la question de la vaccination. Le but n’est pas de convaincre, mais nous sommes tout de même dans un contexte bruxellois où le nombre de personnes de plus de 65 ans ayant reçu une première dose est inférieur à la Flandre.»

«On se rend compte que l’arrêt de beaucoup de services à engendré un report de charge sur les familles. Et puis il y a aussi l’isolement, qui a laissé des traces. Pour beaucoup, ça n’a pas été simple…» Éric Colle, Mutualités chrétiennes

Répartis dans les mutuelles au prorata du nombre d’affiliés de celles-ci, les «agents de prévention» sont donc chargés de contacter les «BIM» âgés de plus de 65 ans, de faire le bilan avec elles et, le cas échéant, de les réorienter vers des services extérieur ou de la mutuelle. Une action à ne pas confondre avec les «Community Health workers», également déployés sur le territoire bruxellois. «Pas plus tard que hier, j’ai été en contact avec un sans domicile fixe qui me posait des questions à propos de soins dentaires. Je l’ai réorienté vers le service social de la mutuelle», illustre Éric Colle. L’aide apportée peut parfois aller plus loin: d’après Conrad van de Werve, il est déjà arrivé que les mutuelles proposent des solutions de déplacement pour des personnes à mobilité réduite souhaitant se rendre à leur rendez-vous de vaccination. Pour les mutuelles, passer ces coups de téléphone leur permet aussi «de prendre la température, de détecter des besoins, de rouvrir des droits», enchaîne Éric Colle, en référence au non-recours aux droits, une situation où une personne éligible ne bénéficie pas d’un ou plusieurs droit(s) au(x)quel(s) elle peut prétendre. «Il faut développer des actions pour aller vers nos publics. C’est quelque chose qu’on a déjà fait par le passé, mais c’est très lourd au niveau de la charge de travail», continue Éric Colle.

Dans ce contexte, le projet des agents de prévention est donc le bienvenu. À la mutualité Saint-Michel, Éric Colle est en train de former deux agents, qui le relaieront bientôt jusqu’en octobre, date où le projet sera évalué avant une éventuelle reconduction, d’après le cabinet d’Alain Maron (Écolo), en charge de la Santé et de l’Action sociale à la Cocof et à la Cocom, qui soutient l’initiative (relire son interview réalisée par Alter Échos en mai 2021). Globalement, les coups de téléphone semblent bien accueillis par les personnes cibles. D’après Conrad van de Werve, 83% des entretiens iraient jusqu’au bout. «Lors de ceux-ci, on se rend compte que l’arrêt de beaucoup de services à engendré un report de charge sur les familles, témoigne Éric Colle. Et puis il y a aussi l’isolement, qui a laissé des traces. Pour beaucoup, ça n’a pas été simple…»

Julien Winkel

Julien Winkel

Journaliste

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