La ministre flamande en charge de l’Égalité des chances, Kathleen Van Brempt, va dégager 5 millions pour des entreprises qui prendraient des initiatives pour faciliterla combinaison travail-vie de famille. En première ligne : les crèches d’entreprise. Une vraie bonne idée ?
Au départ, soit en novembre de l’année dernière, Kathleen Van Brempt (SP.A) avait lancé un appel général à la créativité dansce domaine et pensait à un budget d’un million. Elle avait imaginé soutenir vingt-cinq projets : des crèches d’entreprise mais aussi des ateliers de repassage, dessystèmes de livraison de courses à domicile, etc. À l’arrivée (février de cette année), c’est plus de cent grandes entreprises, PME, syndicats,organisations patronales, administrations communales, écoles et universités qui ont manifesté leur intérêt pour ce projet et le thème de loin le plus porteursemble bien les crèches d’entreprise. La ministre n’est pas étonnée : « Trouver une formule d’accueil adaptée est le plus gros problèmeauquel des jeunes parents doivent faire face. » Elle-même, jeune mère au travail depuis le début de l’année, a décidé de quintupler le budgetinitial. Sa préoccupation cadre aussi dans une réforme plus ambitieuse qu’elle entend mener : « Toute la politique familiale est actuellement centrée sur les famillesclassiques dont les deux parents travaillent. Mais il y a aussi des familles recomposées, de la co-parentalité, des couples holebi… Et il n’y a pas que les cadres àrencontrer des problèmes pour combiner travail et vie de famille. Des travailleurs en équipe dans l’assemblage automobile ou des caissières de supermarché peuventégalement rencontrer ce type de problèmes. »
Des structures très rares
Mais les crèches d’entreprise sont très rares et probablement non sans raison. Un des exemples en Belgique est Swift, la société de transferts financiersbasée à La Hulpe. Pour Florence Biaume, DRH chez Swift, avec 5 millions, la ministre flamande ne pourra pas faire grand-chose : « Une crèche d’entreprise, celacoûte très cher. Il faut un espace qui réponde à toutes les exigences de sécurité. Repeindre en couleurs vives une salle de réunion inutiliséene suffit pas. Il faut beaucoup de matériel : des lits, des jouets, et bien entendu du personnel spécialisé. »
Chez Swift, on estime cependant que le jeu en vaut la chandelle : en termes de bien-être des collaborateurs et de fidélisation de ceux-ci. Mais il y a soixante-six places disponibleset la crèche est en train d’arriver à saturation. Tout autre situation dans les crèches de la KULeuven et de l’hôpital universitaire de Louvain : pour chaqueplace disponible, il y a environ dix demandes. Au total, quelque 20 000 personnes travaillent ici et 478 enfants peuvent être accueillis dans six lieux différents. En principe, cesstructures, subsidiées par Kind en Gezin (l’ONE flamande) sont également accessibles à des personnes qui ne travaillent ni pour l’hôpital ni pourl’université mais en pratique c’est rarement le cas. La responsable Liesbeth De Meulder ne pense pas non plus que les 5 millions de Kathleen Van Brempt vont avoir beaucoupd’effets. Pour elle, la mise sur pied d’une crèche d’entreprise n’est réaliste que pour de grosses structures et encore, pas dans tous les cas.
Auparavant, elle a effectué une étude de faisabilité pour une grande entreprise chimique située dans un port. Il paraissait peu réaliste d’installer unecrèche dans un tel environnement et une crèche qui n’aurait pas été située à proximité immédiate de l’entreprise aurait perdubeaucoup de son attrait. L’Université de Gand dispose aussi de sa propre crèche mais là aussi, les files d’attente s’allongent et l’UGent envisageplutôt pour l’avenir de créer une crèche avec la ville de Gand. Ajoutons encore la VRT, l’armée et on aura fait le tour de ce qui existe en Régionflamande en la matière. Normal, selon Geert Langerock, porte-parole de la FEB. « Dans un grand pays comme la France, il n’existe que trente-sept crèches d’entreprise.» Pour lui, « ce n’est pas le métier des entreprises d’organiser cet accueil et avec 5 millions on n’ira pas loin. Cet argent serait probablement mieuxutilisé pour accroître la capacité du secteur classique de l’accueil à l’enfance. » Il souligne que la plupart des entreprises qui se sont lancéesdans l’aventure par le passé ont fini par laisser tomber. « Il n’est pas évident de mettre sur pied un avantage qui ne profite qu’aux membres du personnel quiont des enfants. Et même parmi ceux-ci, lorsque des listes d’attente se créent, cela provoque des jalousies. » Ce qui fonctionne mieux, par contre, selon lui, c’estd’organiser un accueil temporaire pendant les vacances scolaires, sous forme de stage ou de camp de vacances. Dans ce cas, l’entreprise paie généralement une bonne partiedes frais.
D’après De Morgen et De Standaard