La Direction générale de l’Aide à la jeunesse a publié ses chiffres 2010. Une somme d’informations : durées et motifs de prise en charge, âge dupremier contact avec l’Aide à la jeunesse, etc. Et une grande tendance : l’augmentation inexorable du nombre de prises en charge.
En automne, on ne compte plus les colloques, aussi nombreux que les feuilles mortes. Parmi eux, il y en eut un qui fit le bonheur des amateurs de statistiques. La Direction généralede l’Aide à la jeunesse (DGAJ) présentait ses « chiffres 2010 » le 8 novembre dernier. Un événement, car c’était la première fois quel’administration de l’Aide à la jeunesse présentait « ses » chiffres. En l’occurrence ceux collectés par Françoise Mulkay, la spécialistemaison, et Didier Frippiat, sociologue. La dernière fournée de données datait de 2008 et avait été sous-traitée par l’Observatoire de l’enfance de lajeunesse et de l’Aide à la jeunesse. Dans la cuvée 2010, on notera certaines nouveautés. L’effort d’encodage permet désormais une vue statistique sur les motifs de priseen charge, les demandes adressées aux permanences sociales des services d’aide à la jeunesse (SAJ) sont désormais prises en compte ainsi que les investigations sociales.
Les données disponibles permettent d’objectiver certaines tendances. Notamment : le nombre de jeunes suivis par l’Aide à la jeunesse ne cesse d’augmenter, les durées deprise en charge sont parfois longues. Voici en vrac, pour les amateurs de mathématiques, quelques éléments à retenir du rapport de la DGAJ.
– sur les 37 359 qui ont eu un contact avec un SAJ ou un Service de protection judiciaire, 20 964 jeunes ont été pris en charge par l’Aide à la jeunesse en2010.
– 6 % des jeunes pris en charge l’ont été à la suite d’un fait qualifié infraction. 96 % des jeunes étaient en difficulté ou en danger.56 % des mineurs en danger se situaient dans l’aide consentie et 44 % d’entre eux dans l’aide contrainte.
– En dix ans, le nombre de jeunes pris en charge a augmenté de 56%.
Les améliorations de l’encodage peuvent justifier partiellement cette tendance haussière à partir de 2009. Mais l’augmentation constitue une véritable lame de fond quidépasse largement cet effet. Comment l’expliquer ? Pour Françoise Mulkay de la DGAJ, « il y a trois grandes lignes d’explication. Tout d’abord, les gens s’adressentdavantage aux SAJ et SPJ qui sont de plus en plus connus et reconnus. Il y a aussi un effet mécanique d’augmentation avec des prises en charge qui durent plus d’un an. Enfin, il y a uneaggravation des conditions sociales, avec des situations lourdes, des pertes de réseau, de solidarité. »
– La durée de prise en charge calculée pour les jeunes en difficulté ou en danger est en moyenne de deux ans et neuf mois. Attention, la durée estcalculée depuis le début de la première prise en charge jusqu’à la fin de la dernière. Entre deux prises en charge, la période est« neutralisée ».
Dans l’aide consentie, la durée moyenne est de deux ans. Dans l’aide contrainte, elle est de quatre ans et huit mois. Les médianes fournissent des indications éclairantes.Dans l’aide consentie, cette durée médiane est d’un an.
Dans l’aide contrainte, elle est de trois ans et sept mois. Lorsque la prise en charge consiste en un hébergement ou en une aide par un service agréé en milieu de vie, cettedurée croît jusqu’à quatre ans et quatre mois.
Ces chiffres ont fait dire au Délégué général aux droits de l’enfant, en marge d’un colloque sur la participation, que la « Communautéfrançaise est la « championne » des durées de placement ». Une assertion que récuse Françoise Mulkay. « Ces chiffres ne permettent pas d’affirmer queles prises en charge sont très longues. Il y a des jeunes qui restent très longtemps dans l’Aide à la jeunesse et d’autres très peu de temps. En 2010, en aide consentie,un jeune sur deux a été pris en charge pendant moins d’un an. Quant à l’aide contrainte, nous sommes tenus par les jugements qui imposent des mesures pour plus d’un an. Et lessituations sont plus lourdes », rétorque-t-elle.
Un petit livre de la DGAJ dans lequel on peut aussi découvrir, entre autres, que les jeunes pris en charge pour la première fois sont soit des tout-petits (18% ont moins de troisans), soit des adolescents (près de 25 % ont entre 15 et 17 ans), ou encore que les motifs de prise en charge concernent, pour 52 % des jeunes suivis, desdifficultés du jeune lui-même (en tête, les problèmes liés à la scolarité et les problèmes de comportements) et, pour 49 %, desdifficultés des parents à assumer leur rôle.