Dans une vidéo qui connut en son temps son petit succès sur la Toile, un humoriste canadien démontrait par A plus B comment vos chances de gagner le pactole au Lotto étaient dix fois plus importantes que le risque d’être victime d’un attentat terroriste.
La perception d’une part. Les statistiques de l’autre… Alors qu’un vent électoral a commencé à se lever sur la politique belge, remettons quelques chiffres au milieu du village.
Les discours qui surfent sur la peur des migrants se musclent pour flatter les instincts protectionnistes de l’électeur. Plus Francken bafoue les droits de l’homme, plus il grimpe dans les sondages. Allant jusqu’à se hisser à la cinquième place du podium des personnalités préférées des Wallons, qui oublient sans doute que le parti qui expulse les Soudanais dans un pays où sévit la torture estime aussi que les Wallons vivent sur le dos des Flamands…
La Belgique (sous-entendez la gauche naïve) ne peut accueillir toute la misère du monde? Le système de sécurité sociale si cher (dans tous les sens du terme) au citoyen belge serait menacé par l’afflux massif de réfugiés ou, pire, de migrants économiques déguisés en demandeurs d’asile? Les étrangers voleraient nos emplois?
Jusqu’à 90% des personnes sans papiers n’utilisent jamais l’aide médicale urgente.
Aujourd’hui, en Belgique, les 600 migrants du parc Maximilien ne constituent pas un «afflux». Les chiffres de demandes d’asile ont drastiquement baissé par rapport à 2015. Au total, 19.688 personnes ont introduit une demande de protection auprès de l’Office des étrangers. Si l’ensemble de la population belge tenait dans un stade de foot, ces demandeurs d’asile occuperaient… six places.
Ce mercredi 21 février, la commission de la Santé de la Chambre a adopté en deuxième lecture, majorité contre opposition socialiste et écologiste, le projet de réforme de l’aide médicale urgente (AMU), dont un des objectifs est de mieux lutter contre les abus. En réalité, jusqu’à 90% des personnes sans papiers n’utilisent jamais l’AMU, qui représente au total 0,2% du budget total de la sécurité sociale. De nombreuses études ont par ailleurs démontré que le report ou l’absence de soins coûtent plus cher à long terme.
Aujourd’hui, en Belgique, le chômage diminue. En 2017, la Wallonie comptait 15.306 personnes demandeuses d’emploi inoccupées en moins qu’en décembre 2016 (-6,8%), 5.645 à Bruxelles (-5,8%) et 12.796 en Flandre (-5,9%). Certes, l’effet des politiques d’activation nuance un peu ce beau tableau (Alter Échos n°451 du 27 septembre 2017, «Chômage: alors tu baisses?»), mais la reprise montre bel et bien le bout de son nez.
Aujourd’hui, en Belgique, la population «n’explose» pas. L’Institut bruxellois de la statistique vient de sortir des chiffres. En 2016, la population bruxelloise a augmenté de 3.714 individus, soit trois nouvelles personnes pour 1.000 déjà présentes. Cette croissance (0,3%) est nettement inférieure à celle observée au cours des années précédentes.
Alors oui, la Belgique a largement la place pour accueillir sa part de la «misère» du monde.
En savoir plus
Alter Échos n° 452, «Francken a l’asile fragile», Cédric Vallet, 3 octobre 2017