D’ici 2020, 16,5 millions de foyers polonais devront s’équiper de compteurs intelligents. La facture sera revue à la hausse, car chaque compteur coûtera 500 zlotys (115 euros)au consommateur final. Les Polonais craignent pour leur portefeuille, et aussi pour le respect de leur vie privée.
Des compteurs intelligents, des tarifs sociaux, un minimum garanti pour les plus démunis et une plus grande utilisation des énergies renouvelables dans les foyers, ce sont lespromesses du nouveau projet de loi énergétique en Pologne. Depuis, les investissements dans les compteurs dynamiques d’électricité prennent de l’ampleur. Energa, l’un desopérateurs majeurs du Nord du pays, vient de signer un accord pour la fourniture et l’installation de plus d’un demi-million de compteurs intelligents. Montant du contrat : 890 millionsde zlotys (185 millions d’euros). Un record dans ce pays qui a partiellement libéralisé son marché en 2009.
Energa prévoit d’échanger jusqu’à 100 000 compteurs avant la fin de l’année. Avec les autres opérateurs qui lui emboîtent le pas. A petite échelle,mais la course est lancée. Car conformément à la directive de l’UE, d’ici 2020, la Pologne doit équiper 80 % des ménages avec des compteurs intelligents. Leprojet de loi ministériel pousse même ces exigences plus loin. Il propose que dans le même temps, tous les compteurs traditionnels soient remplacés.
Selon différentes estimations, le coût global de cette transition pourrait s’élever à 10,2 milliards de zlotys (2,36 milliards d’euros). A charge des entreprises.Mais selon les experts, ce pourrait être de l’argent dépensé inutilement. « Jusqu’à présent en Pologne, seuls des projets pilotes ont étéréalisés. Mais il n’y a aucune analyse sur la viabilité économique du projet. Par conséquent, il est très difficile d’estimer l’impact de cesappareils sur la facture du consommateur », explique Piotr Begier, expert auprès de la Société polonaise de transmission et de distribution d’électricité(PTPIREE), dans une interview au journal Rzeczpospolita .
Pas d’analyse solide
Or selon la directive 2009/72/CE relative au marché énergétique commun, chaque Etat membre devrait effectuer, d’ici septembre 2012, une analyse du rapportcoût-efficacité des compteurs intelligents. Mais en Pologne, toujours rien à l’horizon. « Le nouveau projet de loi prévoit bien un plan pour l’installation decompteurs intelligents, mais il n’a pas été avalisé par une analyse appropriée », souligne Jakub Tomczak, manager Global Renewable Energy Services chez Ernst& Young.
Le document qui accompagne le projet de loi affirme pourtant que l’introduction des compteurs intelligents permettra d’économiser environ 4,8 milliards de zlotys (1,109 milliardd’euros) aux consommateurs. Mais selon les observateurs, ces bénéfices reposent sur un changement radical du comportement des consommateurs, une consommationénergétique plus efficiente, ainsi que sur la réduction des pics de consommation d’énergie pendant la journée.
« Des hypothèses théoriques, non testées dans la pratique et basées sur des expériences pilotes réalisées àl’étranger, mais qui ne peuvent être directement comparées aux réalités polonaises », insiste Jakub Tomczak. Car si les Irlandais qui ont pris partà un programme pilote ont réussi à économiser 5 % sur leurs factures mensuelles, les ménages polonais qui se prêtent au même jeu ne sont passuffisamment sensibilisés aux réductions d’énergie.
« Bien sûr, les coûts d’installation seront répercutés sur la facture des consommateurs. On parle d’environ 500 zlotys annuels pendant huitans », pointe le consultant. Pour les entreprises énergétiques par contre, cette nouvelle donne s’avère très bénéfique. « Il leur seraplus facile de localiser les voleurs d’énergie. Ces dispositifs améliorent aussi la lecture des données à distance », observe Jakub Tomczak. Ce qui faitcraindre aux Polonais une ingérence dans leur vie privée.