Le Réseau des jardins et fermes solidaires Wallonie-Bruxelles1 regroupe des jardins d’insertion sociale ou socioprofessionnelle. Certains jardins dépendent de CPAS,d’autres sont agréés en tant qu’entreprise de formation par le travail (EFT), organisme d’insertion socioprofessionnelle (OISP) ou service d’insertion sociale(SIS) ; d’autres encore n’ont aucun agrément2. Le Réseau actif depuis mai 2004, regorge de projets mais lutte, encore et toujours, pour sa surviefinancière.
Ce 14 septembre, le Réseau des jardins et fermes solidaires Wallonie-Bruxelles organisait chez les Compagnons du Samson du CPAS de Gesves une rencontre avec le ministre wallon del’Agriculture, Benoît Lutgen (CDH), des représentants du ministre wallon de l’Action sociale, Paul Magnette (PS) et de la ministre bruxelloise de l’Environnement,Évelyne Huytebroeck (Ecolo), ainsi qu’avec Sébastien Pereau, coordinateur de la Cellule Économie sociale du SPP Intégration sociale.
À quand des subsides structurels ?
L’occasion pour le réseau de présenter les projets d’économie sociale développés en son sein et destinés à créer del’emploi pour les personnes qui terminent leur parcours d’insertion au sein des jardins solidaires : coopérative maraîchère bio et projet d’aménagement etd’entretien écologique de jardins. L’occasion également d’interpeller les ministres quant à la nécessité d’un financement à plus longterme. Car le réseau n’échappe pas à l’incertitude de nombreuses associations : avec un financement remis en question presque tous les six mois et grappillésur des subsides facultatifs diminués chaque année, il est difficile de faire du boulot correct : « Nous sommes aujourd’hui deux équivalents temps plein, un CDI et unCDD, et nous devons animer un réseau de 27 membres, témoigne Roll Grenier, coordinateur du Réseau des jardins et fermes solidaires. Là, nous venons d’avoir laconfirmation que les ministres Lutgen et Magnette nous octroyaient un subside chacun de 22 000 à 23 000 euros – nous attendons l’arrêté pour connaître le montantdéfinitif –, mais cela nous permettra tout juste de tenir jusqu’à mars 2008 ; après, c’est l’incertitude. Il est vraiment temps que les trois ministres, Lutgenet Magnette pour la Région wallonne et Huytebroeck pour la Région bruxelloise, s’asseyent autour de la table et discutent du financement structurel de notre réseau oualors, on considère qu’il n’est plus utile de fédérer les jardins… ».
Mise en réseau à Bruxelles
Le ministre Lutgen s’est pourtant voulu rassurant lors de la rencontre du 14 septembre et il s’y est dit convaincu que le réseau avait un rôle d’intervenantclé. Au cabinet wallon de l’Action sociale, cabinet qui vient de subir une restructuration pour cause de changement de ministre, on dit qu’il est encore un peu tôt pour seprononcer. Quant à la ministre bruxelloise, elle a octroyé 50 000 euros, ce qui paiera tout juste un temps plein sur Bruxelles. Reste à trouver les subsides pour les frais defonctionnement (bureau, matériel, loyer, etc.), mais ce premier subside bruxellois permettra de mettre en place les prémisses d’un réseau des jardins bruxellois pour fin2007. « Nous avons actuellement trois membres sur Bruxelles mais depuis que nous organisons des séances d’infos dans la capitale, le bouche-à-oreille fait son chemin et lesprojets affluent », se réjouit Roll Grenier.
Une configuration bruxelloise quelque peu différente de celle qu’on rencontre pour les jardins solidaires wallons. «Leur contexte politique n’est pas le même, nileur contexte géographique, explique Roll Grenier. À Bruxelles, les jardins solidaires sont essentiellement urbains et le multiculturalisme est omniprésent. En Wallonie, lesjardins sont souvent plus grands parce qu’ils sont en milieu rural. L’objectif de production maraîchère peut y être plus présent. La plupart des jardins wallonsont un agrément alors qu’à Bruxelles, il s’agit de jardins de quartiers, d’associations. Les jardins wallons sont plus axés sur une démarched’insertion à proprement parler que sur le développement du lien social comme c’est le cas à Bruxelles. Mais chose certaine, c’est que des deuxcôtés on gagne à mieux se connaître. »
Ça germe…
On vous le disait en préambule, les projets ce n’est pas ce qui manque. Ainsi en 2006, le réseau a bénéficié d’un financement pour réaliserune étude de faisabilité pour la création d’une coopérative de production maraîchère biologique. Aujourd’hui, l’idée seconcrétise, le terrain pour cultiver est trouvé, il appartient à la commune de Gesves mais est cédé au CPAS de Gesves, avec lequel le réseau a signéune convention d’utilisation. Le CPAS a déjà créé avec les compagnons du Samson sa propre filière de paniers de légumes, la coopérative et leCPAS collaboreront dans ce cadre. D’autres terrains, notamment à Liège, ont été dénichés. Reste à finaliser le montage financier. LeRéseau espère un financement de démarrage grâce à l’appel à projets lancé par la Cellule fédérale de l’Économiesociale et qui se clôture en octobre.
Également dans les tiroirs, la création d’un service de proximité d’aménagement et d’entretien de jardins avec une approche écologique etéthique (cf. encadré). « Pour les jardins solidaires situés dans les grands centres urbains, la possibilité de développer une activitééconomique avec le maraîchage est très limitée, constate le coordinateur du réseau. L’entretien et l’aménagement des jardins offrent unealternative intéressante tout en permettant de créer de l’emploi. Il s’agirait de coopératives à finalité sociale avec une charte, un cahier descharges, la possibilité d’un label commercial commun et la prise en charge de la formation des ouvriers, le tout assuré par le réseau. »
En attendant un prochain développement, un projet pilote sera lancé à Bruxelles à l’hiver 2007 afin de tester le potentiel du côté de laclientèle.
Des projets de formation aussi pour les ouvriers horticoles avec comme partenariats envisagés : Natagora, Crabe et bien d’autres associations partenaires. Et toujours pour de futursdéveloppements, des échanges d’expériences avec le Québec pour les projets de la coopérative maraîchère et l’entretien écologiquedes jardins (cf. encadré).
Au Québec notamment…
Il est important de mentionner que, bien qu’innovantes en Belgique, les entreprises d’aménagement et entretien écologique des jardins existent déjàailleurs, en France et particulièrement au Québec. Ce qui différencierait les entreprises du réseau belge, c’est leur caractère d’entreprises àfinalité sociale. En fait, dans ces deux pays, ce sont des entreprises purement commerciales qui ont développé ce créneau. « Ici, explique Roll Grenier, nous yvoyons une opportunité de valoriser les formations des bénéficiaires des jardins solidaires en leur permettant de se trouver un emploi. C’est également profiterd’un contexte belge et européen où l’on parle de plus en plus d’économie sociale, où des parties de la population sont exclues de l’économieclassique et sont encouragées à redevenir pleinement actives dans un contexte économique alternatif qui leur convient. »
Exemple
Il existe au Québec une agence de certification des entreprises d’aménagement de jardins qui décident de travailler selon le cahier des charges établi parl’agence de certification. Celle-ci s’appelle Horti-Eco. En plus de la certification (donc contrôle), elle assure une promotion de ces entreprises et elle les autorise àutiliser le logo Horti-Eco. Cette agence est elle-même logée au sein d’une autre association plus générale Equiterre, qui regroupe entre autres le réseau desASC (Agriculture soutenue par la communauté), systèmes d’abonnements à des paniers de légumes bio avec un producteur local et le réseau des cuisinescollectives qui sont le plus souvent reliées aux projets des ASC.
1. Le Réseau des jardins et fermes solidaires Wallonie-Bruxelles asbl :
– adresse : rue Beeckman, 26 à 4000 Liège
– contact : Roll Grenier – tél. : 04 237 93 23
– courriel : jardinssolidaires@prov-liege.be
– site : http://www.jardinssolidaires.com
2. Le réseau regroupe 27 jardins solidaires sur la Wallonie et Bruxelles-Capitale, entre 60 et 70 employés salariés (responsables, formateurs, assistantes sociales), prèsde 100 bénévoles et en moyenne 250 bénéficiaires par année (stagiaires et participants aux activités des jardins solidaires).
Il a pour finalité de rassembler les groupes et les organismes communautaires, issus du milieu privé ou public, qui utilisent le potentiel du jardinage comme outil de changement et dedéveloppement social, comme stratégie aux efforts de sécurité alimentaire dans leur quartier et comme moyen pour impliquer les citoyens à améliorer leurqualité de vie.