Dix ans après sa création, le centre de médiation des gens du voyage exprime des demandes concrètes à Eliane Tillieux, ministre de la Santé, de l’Actionsociale et de l’Egalité des chances. Celle-ci s’était engagée en juin dernier à mieux organiser le séjour des gens du voyage dans les différentescommunes en « structurant les initiatives existantes ».
Pour Ahmed Ahkim, le directeur du centre, il ne faudrait pas parler de « l’accueil » des gens du voyage : « Les groupes que nous appelons gens du voyage sontfamiliarisés avec la région depuis des années et ils y sont attachés. Une étude de 2005 relevait que des gens du voyage étaient installés sur unecommune wallonne sur cinq. Cependant, ils sont continuellement ballotés de part et d’autre. On parle souvent de pauvreté, mais il existe des causes structurelles à cettepauvreté. Et pour la diminuer, il faut organiser l’habitat mobile. Il faut organiser leur présence et leur séjour de manière humaine etréglementée. »
Le directeur du centre de médiation des gens du voyage précise qu’il est fondamental d’introduire ces demandes aujourd’hui, avant d’entrer en période électorale. Lorsdes dernières élections, la période fut particulièrement difficile. Les sujets deviennent vite sensibles et la tendance à remballer les groupes vers d’autrescommunes est plus forte.
Des demandes simples et concrètes
La première demande formulée par le centre de médiation concerne « l’organisation du séjour temporaire des gens du voyage sur le territoirewallon » et non pas « l’aménagement de terrains par les communes wallonnes ». La nuance est importante, notamment en termes de moyens et de coûts. Ladeuxième demande consiste fixer une durée de séjour maximale de trois semaines. La troisième est celle d’un accès à l’eau, désigné par lacommune, avec la prévision d’un forfait à la semaine pour le paiement des consommations.
Enfin, la dernière demande consiste en l’organisation de la gestion des déchets (différant dans chaque commune) avec également un forfait par semaine et parfamille.
Les leçons des communes pilotes
Pour organiser le séjour, il faudra baliser ce qui existe déjà, autrement dit les expériences réalisées dans les huit communes pilotesconventionnées par le centre de médiation. Ces communes s’organisent de manière simple, flexible et sans aucun aménagement propre aux gens du voyage.
À Namur, par exemple, ce sont 400 à 500 caravanes qui séjournent par an, y compris dans des zones résidentielles. À Hotton, l’organisation est différente,les séjours sont plus concentrés dans le temps. Cette organisation « légère » est rendue possible par la présence d’une personne de contactdans chacune de ces communes, joignable par les gens du voyage mais aussi par les autres services communaux. Selon Ahmed Ahkim, le coût de ces mesures équivaudrait à lacréation d’un mi-temps dans les grandes villes et à quelques aménagements supplémentaires dans les villes moins importantes. Si le coût humain et financier desdemandes formulées par le centre peut rebuter les autorités communales et régionales, à moyen terme, il semble toutefois nécessaire. Les communes habituéesà travailler avec le centre de médiation organisent souvent le séjour d’un à deux groupes de gens du voyage simultanément sur leur territoire. Si tout le monde lesrenie, cela risque d’engendrer une surcharge de travail pour les communes en question. Cela peut également créer des tensions au sein des groupes qui effectuent une demande enmême temps.
Une proposition concertée
Le timing est lancé. Dans les prochaines semaines, le centre de médiation va établir les grandes lignes d’une organisation régionale du séjour des gens duvoyage. « Nous allons tirer les conclusions des expériences passées à partir du travail réalisé avec les communes conventionnées dites pilotes.Ensuite, nous irons consulter l’ensemble des communes avec lesquelles nous collaborons déjà, ainsi que les gens du voyage eux-mêmes pour finalement présenter uneproposition à la ministre d’ici quelques semaines », précise Ahmed Ahkim.
Au niveau des réglementations, une autre avancée ferait le plus grand bien aux gens du voyage : la reconnaissance de la caravane comme mode de logement. Symbole culturel,l’habitat propre aux gens du voyage pose en effet question lors de la délivrance du permis d’urbanisme nécessaire à chaque arrivée dans une nouvelle commune.