Amnesty International publie aujourd’hui son rapport annuel, dressant un constat extrêmement sévère de la situation des droits humains dans 160 pays en 2014. L’organisation s’inquiète en particulier de la montée en puissance de groupes armés non étatiques comme Boko Haram, Al Shabab ou Daesh (État islamique). Ces groupes armés ont commis des exactions dans au moins 35 pays en 2014, soit plus de 20% de ceux sur lesquels l’organisation a travaillé. Un nombre croissant de civils va être contraint de vivre sous leur contrôle, en butte à des attaques et des persécutions.
L’une des principales conséquences de l’incapacité de la communauté internationale à protéger les civils en proie aux conflits est l’une des plus graves crises des réfugiés que le monde n’ait jamais connue. Les États, en particulier ceux des pays riches – l’Europe et la Belgique en font clairement partie – doivent s’engager à protéger les personnes qui fuient les conflits et à réinstaller les plus vulnérables d’entre elles.
Montée des extrémismes
Or, la montée des partis « populistes » et de leur influence sur les scènes nationales a joué un rôle néfaste dans la politique migratoire de l’Europe, selon Amnesty. Celle-ci se serait traduite par une large tendance des pays de l’Union à maintenir les personnes déplacées « hors de leurs frontières ». De fait, sur les 4 millions de réfugiés syriens dans le monde, seuls 150 000 vivaient dans l’UE fin 2014. Le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) estime que 380 000 Syriens nécessitent une réinstallation urgente. Or, les Vingt-huit ne se sont engagés qu’à en accueillir 36 300, soit environ 0,007 % de leur population cumulée.
Mauvaise politique carcérale
Concernant la Belgique, l’ONG s’inquiète particulièrement des conditions de détention dans les prisons. En cause, la surpopulation carcérale. « En mars, d’après les statistiques officielles, la population carcérale dépassait de plus de 22% la capacité d’accueil des établissements pénitentiaires », relève Amnesty. Le nombre de détenus s’élevait en effet à 11 769 pour 9592 places (détenus belges dans la prison de Tilbourg compris). Plutôt que de construire de nouveaux centres de détention, l’ONG incite à faire usage d’alternatives à l’emprisonnement, comme le port d’un bracelet électronique. Toujours concernant les établissements pénitentiaires, Amnesty souligne que « les auteurs d’infractions atteints de troubles de la santé mentale continuaient (en 2014) d’être détenus dans les quartiers psychiatriques de prisons ordinaires, avec un accès très limité à des soins adaptés ». A plusieurs reprises, la Belgique a été condamnée pour ces faits. La Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a d’ailleurs conclu, en janvier dernier, que ce genre de détention non adaptée constituait un traitement dégradant.
Une femme sur trois victime de violence
Amnesty dénonce également les actes de violences et de mauvais traitements racistes infligés par des policiers à des migrants, les mauvaises conditions de vie des lesbiennes, gays, des personnes bisexuelles, transgenres ou intersexuées ou encore les projets d’extradition et de renvoi de ressortissants de pays tiers. Enfin, le rapport révèle l’ampleur de la violence à l’encontre des femmes. Citant l’enquête menée par l’Agence des droits fondamentaux de l’UE en mars dernier, Amnesty rappelle qu’« une femme européenne sur trois a subi des violences physiques et/ou sexuelles depuis l’âge de 15 ans ». Depuis, est entrée en vigueur une Convention du Conseil de l’Europe pour lutter contre ces violences, mais seuls 15 États l’ont pour l’instant ratifiée. D’après un sondage national, « un quart des femmes en Belgique se sont vu imposer des relations sexuelles par leur partenaire et 13% ont été victimes de viol en dehors du couple ». Selon Amnesty, aucune mesure n’avait été prise à la fin de l’année pour contrer ces formes de violence.
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