Récemment, la maison d’édition Académia-Bruylant1 a édité deux livres relatifs à des thématiques urbaines. Le premier, de Bernard Francq2, s’intitule « La Ville incertaine. Politique urbaine et sujet personnel ». L’auteur y traite du « comment vivre ensemble », des rapports entre générations, de laville en tant que labyrinthe de rencontres. Nous y reviendrons plus en détail dans une prochaine édition.
Le second ouvrage est le fruit d’une collaboration de Guy Bajoit, Felice Dassetto, Bruno Trivelin et Tinne Van Der Straeten3. Leur livre, « Élites urbaines. Le cas de trois villes belges : Wavre, Verviers et Lier », pose la question de « Qui gouverne ? » dans les villes. Pour les auteurs, « des élites, qu’elles soient politiques, culturelles,sportives, agissent avant tout sur un plan local : la ville, la commune. Même si elles peuvent être plongées dans des contextes d’action plus larges, tels la région ou lepays. » L’objectif de l’étude était surtout de cerner ces « élites urbaines » en tant que catégorie sociale. D’où viennent-elles ? Comment émergent-elles? Comment se perçoivent-elles ? Quelle est leur vision du monde ?
Légitimités stratégique et charismatique
Explication de Felice Dasseto : « Ce sont des gens qui occupent une place dans le développement local (entreprise, culture…). Nous avons réalisé 150 à 170 entretiens.Les personnes ont été identifiées sur la base de répertoires, via le bouche-à-oreille… Souvent les personnes interrogées nous demandaient pourquoi on les appelait ainsi. Pour nous, il s’agissait de cerner des groupes sociaux qui émergent sur la scène sociale. » Pour les auteurs, ces élites ne sont pas des notables, car elles se renouvellent. Il s’agit d’un groupe dynamique, de « personnes dont l’action peut se fonder sur une légitimité charismatique et sur une légitimité stratégique. » Et Felice Dasseto de préciser : « Il ne constitue ni une oligarchie, ni une polyarchie : ils occupent les places progressivement sans pour autant devenir une caste qui occupe le pouvoir. » Il précise encore que les élites politiques ont un véritable rôle clé : « Là où une élite politique ne fait rien, tout est bloqué. Là,où l’élite politique est dynamique, ça bouge. La ville devient attrayante économiquement s’il y a une dynamique politique et une dynamique culturelle. Ces trois éléments sont nécessaires. » Il pointe aussi l’aspect des carrières politiques : c’est une manière de s’asseoir comme élite.
Pour Bernard Trivelin, les élites urbaines ne sont pas une élite théorisée. « Les personnes sont très accessibles, via un simple courrier. » Il remarque aussi l’existence d’élites sociales et culturelles aux côtés des élites politique et économique. Autre question : « L’élite vit-elle forcément en ville ? »À cela, Guy Bajoit répond qu’ « il y a plein d’élites dans la ville, mais qu’elles ne s’occupent pas forcément du développement local de la ville ».
Dans leurs conclusions, les auteurs signalent que « au plan de la ville, une dynamisation de la réalité locale dans son ensemble, se fait si des acteurs émergent au sein de l’élite, s’imposent comme des élites de portée plus générale au-delà de leur action dans un domaine spécifique (…) Les processus sociaux que ces leaders enclenchent peuvent se résumer à la dynamisation et à la coopération : ils dynamisent et impulsent des activités en créant des cadres et contextes favorables ; ils créent une coopération positive en amenant, parfois en forçant les élites à coordonner et faire converger leur action. »
Actuellement, la recherche se poursuit sur Charleroi et Mouscron.
1. Académia-Bruylant, Grand-Place 29 à 1348 Louvain-la-Neuve, tél. : 010 45 23 95, fax : 010 45 44 80, e-mail : academia.bruylant@skynet.be
2. Bernard Francq est professeur de sociologie à l’Université d’anthropologie et de sociologie de l’UCL et chercheur au Centre d’analyse et d’intervention sociologique (EHESS, Paris).Son livre, « La Ville incertaine. Politique urbaine et sujet personnel » est vendu au prix de 29,5 euros.
3. Guy Bajoit et Felice Dassetto sont docteurs en sociologie et professeurs à l’UCL. Bruno Trivelin est sociologue et attaché de recherche à l’Universitéd’anthropologie et de sociologie de l’UCL. Tinne Van Der Straeten est licenciée en langues et cultures africaines de l’Université de Gand. Leur livre, « Élites urbaines. Le cas detrois villes belges : Wavre, Verviers et Lier » se vend au prix de 28 euros.