Il a vingt-sept ans et, à la suite du décès de sa mère, il va devoir quitter l’appartement social qu’il occupe depuis onze ans. Motif : mineur au moment de la signaturedu bail, il n’avait pu le signer.
Il s’appelle Dave Casteleyn et habite à Lokeren dans un duplex qu’il loue à la société de logement social Tuinwijk. Mais en mai prochain, il va devoir quitter leslieux. Sa situation sociale est pourtant loin d’être brillante. « Le mois dernier, j’ai dû me débrouiller avec 75 euros, explique-t-il. Avec les frais d’hôpital et lecoût des funérailles, j’avais encore à peine de quoi vivre. J’ai un contrat temporaire comme cuisinier au CPAS, mais ce contrat se termine en mai, précisément aumoment où je suis supposé partir. Comment vais-je faire ? Je n’ai pas d’économies, même pas de quoi payer une garantie locative. Quand je m’adresse à lasociété de logement social, ils me répondent que je peux déjà m’estimer heureux d’avoir obtenu un délai, le temps de trouver autre chose. Pourtant, j’aiété un bon locataire et il y a plein de logements sociaux inoccupés à Lokeren. »
En fait, Dave Casteleyn est victime des modifications apportées par une décision-cadre sur les logements sociaux, promulguée en 2007. Celle-ci stipule que les enfants delocataires d’habitations sociales n’héritent plus automatiquement du bail de leurs parents. La transmission ne se fait que si les enfants ont également signé le contrat de bail.Mais les enfants qui sont encore mineurs d’âge n’ont pas le droit de signer une telle convention. Cette législation a été adoptée à l’époque pourmettre fin à certains abus. « Mais moi, j’habite ici depuis mes seize ans et les sept dernières années, je me suis occupé tous les jours de ma mère quiétait en chaise roulante. » C’est une semaine après le décès de sa mère, en novembre dernier, qu’il a appris qu’il devrait quitter les lieux. Il souligneencore qu’il avait entièrement rénové (retapissé et repeint) l’appartement il y a à peine deux ans.
Textes revus à l’automne
Du côté de Tuinwijk, la société de logement social, on fait part d’un certain embarras. La directrice Tine Verkaeren estime que « la législation actuelleest effectivement discriminatoire car les enfants majeurs ont, eux, le droit de signer le contrat de bail et de demeurer dans le logement de leurs parents. Mais nous ne pouvons pas outrepasserà cette législation. Nous ne sommes certainement pas la seule société de logement social à être confrontée à ce problème et c’est donc aulégislateur d’agir. »
Au cabinet de la ministre concernée, Freya van den Bossche (SP.A), on est bien au courant du problème. Le cabinet a reçu plusieurs courriels de personnes qui étaientdans le même cas. « Six mois après le décès du dernier parent en vie, le logement social doit être libéré. Avant la décision-cadre de2007, trop de gens venaient se domicilier chez leurs parents juste avant leur décès pour ensuite exercer un droit de préemption et échapper aux files d’attente, alors quenormalement ils ne seraient même pas entrés en ligne de compte pour une habitation sociale. Il faut aussi prendre en compte les critères d’occupation rationnelle d’un logement.Par exemple lorsque des locataires se retrouvent seuls dans une grande maison après le décès de leurs parents alors que des familles entières sont en attente d’unlogement. Mais il y a bien un problème de discrimination entre enfants mineurs et majeurs. La décision-cadre va être réévaluée à l’automne et ce pointsera certainement examiné. De toute façon, elle mentionne bien que le propriétaire peut faire une exception « pour des motifs sociaux de nature exceptionnelle » et cesdécisions ressortent du libre arbitre des sociétés de logement. »
Mais ce n’est peut-être pas si simple. Dans une réaction, la société Tuinwijk estime que les services d’inspection se montrent toujours particulièrementsévères lorsque les sociétés de logement social invoquent la clause d’exception en question. Entre-temps, Dave Casteleyn a pris contact avec deux autres personnes qui sontdans le même cas que lui afin de chercher ensemble des solutions. « J’ai déjà introduit un recours juridique, mais je crains de ne pas avoir les moyens de me payer un bonavocat pour me défendre. J’espère néanmoins qu’on trouvera une solution. S’ils sont un tout petit peu humains, ils vont quand même bien faire une exception dans notre cas,non ? »
D’après De Morgen et De Standaard