En avril 2000, se lançait à Charleroi, une action pilote d’insertion professionnelle s’inscrivant dans la phase 4 du parcours d’insertion à savoir latransition à l’emploi. À l’origine du projet, différents constats dressés par les travailleurs de la Mirec, la Mission régionale de Charleroi1 :
> Sur 1.000 personnes qui s’adressent la Mirec, peut-être une centaine tout au plus sont réellement intéressées par un projet de formation alternée.
> Dans les ateliers de recherche active d’emploi, on s’intéresse à tout ce qui est en amont de la recherche d’emploi (mise à disposition de journaux,téléphone, internet, rédaction d’un CV, etc.) mais rien n’est prévu pour l’aval, c’est-à-dire les démarches vers l’entreprise,avec ou sans le demandeur d’emploi (mais toujours pour et selon lui).
> L’expérience du « Siboulot », antenne damrémoise de la Mirec, dont il ressort que les demandeurs d’emploi formulent clairement une demande de mise à l’emploidirecte et rejettent pour la plupart les formations proposées.
> Un séminaire organisé par la Mirec pour son personnel où la notion de qualité se trouvait au centre des débats et où l’on a refocalisé lapriorité de la Mission régionale sur les demandeurs d’emploi. Les entreprises, les opérateurs de formation et la MIREC étant des outils au service de cetobjectif.
> Un intérêt marqué du directeur précédent de la Mirec, Christian Laurent, pour la méthode IOD découverte en France. Schématiquement, cetteméthode qui révolutionne les concepts d’insertion traditionnels peut se résumer ainsi : « fini les stages de requalification pour chômeur, les formations quis’enchaînent, le travail sur la motivation. Le marché doit s’adapter, ce n’est pas au demandeur d’emploi d’être conditionné. Après tout,l’exclusion est générée par le système. Les boulots peu qualifiés aux peu qualifiés ».
Définir ses compétences, ses envies
ßur base de ces constats, une équipe se constitue au sein de la Mirec et crée un projet d’insertion socio-professionnelle baptisée « Employons-nous » avec l’aidedu Forem (article 6 qui permet de rémunérer les stagiaires à 40 F/heure). Quatre personnes travailleront sur ce projet : une personne en charge des contacts avec les entreprises,un accompagnant social, un chef de projet et une personne du centre d’évaluation des potentialités. Un premier groupe de 12 personnes « chômeurs longue durée » qui netrouvaient pas place dans les filières traditionnelles (formation en alternance) de la Mirec se constitue et se réunit deux fois par semaine dans les locaux de la Missionrégionale : le mardi et le jeudi.
Premier objectif : amener les personnes à travailler sur elles-mêmes dans une structure établie pour élaborer un plan personnalisé d’insertion professionnelle. »Pour cela, il faut permettre à la personne, avec l’appui du groupe, de repérer ses différents savoirs, de structurer ses compétences et de les transférerdans le cadre de son objectif emploi, explique Pascal Malaise, coordonateur de l’action-pilote. Autrement dit, il faut l’amener petit à petit à formuler plus clairement sademande sur ce qu’il désire comme emploi, l’environnement dans lequel il veut travailler, ce qu’il pense lui correspondre le mieux et surtout arriver à ce qu’ilpuisse lui-même évaluer ses compétences par rapport à l’emploi escompté…, une prise de conscience pas toujours évidente… Ensuite, ontravaille sur les différentes variables de l’employabilité, on amène la personne à appréhender ses acquis, à envisager l’augmentation de sonniveau de compétence ou son actualisation et à se placer dans une logique de chercheur. Des stages en entreprise, permettent par exemple, d’être confrontés àun certain milieu de travail et à évaluer ses propres compétences. » Vient ensuite la mise à l’emploi à proprement parler et le processus de stabilisationprofessionnelle où l’objectif est de négocier la mise à l’emploi en entreprise sur base d’une fiche répertoriant les acquis validés et les limitesétablies de la candidature et de négocier, quand c’est possible, un programme alternant phases de travail et modules formatifs.
Un bilan contrasté
Le projet commencé en avril 2000, s’est achevé en décembre 2000. Sur les 12 personnes, un premier tiers a trouvé un emploi, un second tiers un emploi « activé »et pour le tiers restant, ils sont actuellement toujours à la recherche d’emploi, s’étant quelque peu « posés » dans le dispositif. Une expérience enrichissante,selon Pascal Malaise mais dont le bilan est relativement contrasté. « Nous sommes quelque peu revenus, par exemple de la méthode IOD, qui a des aspects positifs comme placer des gens peuqualifiés à des postes peu qualifiés, redressant ainsi le marché du travail qui a un peu trop tendance à accorder des emplois peu qualifiés à des genssurqualifiés, laissant les autres sur le carreau… mais son aspect expéditif ne permet que de faire du dégrossissage pas d’affiner. Or, on se rend compte que souventla première demande du demandeur d’emploi ne correspond pas toujours à celle formulée quelques semaines plus tard, une fois que travailleur social et « stagiaire » se sontapprivoisés. L’important c’est qu’un emploi vous permette d’être bien dans votre tête… Les emplois trouvés sont ainsi parfois peu enadéquation avec le souhait profond de la personne, il ne faut dès lors pas s’étonner que certains ne conservent pas leur boulot plus d’un mois… »
Autre constat : l’aspect étonnamment trop convivial de la formule en groupe, « ils étaient contents de se retrouver, fêtaient les anniversaires, etc., mais peu de dynamiqueen termes de recherche d’emploi s’est mise en place. Ils étaient finalement plus consommateurs qu’acteurs, la recherche d’emploi ne se limitant bien souventqu’aux deux jours par semaine passés chez nous », commente Catherine Asaert qui a accompagné le groupe.
Enfin, l’équipe pointe la défiance des demandeurs d’emploi vis-à-vis des formations et le manque de flexibilité des opérateurs de formation. « Pourcertains participants, nous n’aurions eu besoin que d’un module de formation, impossible de l’obtenir, c’est tous les modules ou rien !, s’indigne Pascal Malaise. »
« Employons-nous », deuxième version
Fort de cette expérience, un deuxième dispositif est mis en place en mai 2001 qui doit en principe éviter les écueils du précédent. Pour ce faire, il estnécessaire d’avoir un dispositif duquel on peut entrer ou sortir en permanence, un coaching individuel et laisser l’aspect collectif pour des tâ
ches bien définiescomme des formations ciblées (préparation d’un examen de gardien de prison par exemple), une immersion en entreprise via des stages, une prospection vis-à-vis desentreprises, et une gestion quotidienne des participants au dispositif. « Nous avons voulu ne pas trop nous cadenasser avec de la méthodologie, explique Emmanuelle Henderyckx, prospectriceentreprises. Notre boulot est en quelque sorte un boulot de chineur, nous devons amener la personne à se livrer pour qu’elle puisse se sentir bien dans un boulot qui lui convient. »
Après presque quatre mois de fonctionnement, le projet semble bien tourner même si les résultats en termes d’emploi se font quelque peu attendre : 10 personnes sur unetrentaine ont trouvé du boulot, une vingtaine sont espérées d’ici Noël. Un retard principalement dû au manque de personnel affecté au projet : un tempsplein de “prospectrice entreprises» et un 3/5e temps d’accompagnement social complété par quelques heures de secrétariat et de coordination. Toutefois, PascalMalaise espère obtenir un subside supplémentaire dans le cadre des subsides « phasing out » de l’objectif 1, ce qui lui permettrait d’engager une autre personne et deréaliser un vade-mecum des pratiques intéressantes relevées au cours du projet.
1 Mirec, « Employons-Nous », contact : Pascal Malaise, rue de Trazegnies 41 à 6031 Monceau-sur-Sambre, tél. : 071 20 82 20, fax : 071 30 08 23, e-mail : mirec@ntc.be
Archives
""Employons-nous" : les enseignements d'une action pilote développée par la Mirec"
catherinem
27-08-2001
Alter Échos n° 103
catherinem
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