En Allemagne, le système de l’enseignement en alternance existe depuis des décennies et transcende tous les réseaux, les niveaux d’enseignement et lescatégories d’âge. Résultat : pas moins de 1,6 million d’étudiants sont concernés.
Les jeunes Allemands doivent suivre neuf années d’enseignement obligatoire à partir de l’âge de six ans. Par la suite, plus de la moitié (51 %) optent pourle système d’enseignement en alternance et combinent une formation théorique en milieu scolaire avec une expérience pratique en entreprise. Quelques chiffres : les jeunesqui rentrent dans le système ont en moyenne 19 ans et ils y restent 35 mois. L’enseignement en alternance est financé à 70 % par le secteur privé et à 30 %par les pouvoirs publics. 350 professions sont concernées et, depuis longtemps déjà, il ne s’agit plus seulement de fonctions critiques. Quelques exemples : opticien,électronicien des systèmes, assistant médical, cuisinier, orfèvre, vendeur, employé de banque, etc.
Selon Ute Schneider, chercheur à l’Institut fédéral allemand pour l’Enseignement professionnel et la Formation, ce ne sont d’ailleurs pas du tout lesentreprises qui mènent la danse en fonction de leurs propres intérêts. La réglementation du système et le programme des formations sont élaborésconjointement par les partenaires sociaux, les autorités fédérales et les autorités des Länder. Et le système ne fonctionne pas avec des limitesd’âge et des exigences en matière de diplômes mais est au contraire très largement ouvert. Les étudiants signent un contrat type, qui précise laprofession, la durée de la formation en entreprise, le salaire ainsi que leurs droits et leurs devoirs. Selon lui, du fait de la pénurie de jeunes sur le marché del’emploi, le système ne fonctionne pas comme une machine élitiste qui laisserait en rade les jeunes un peu moins doués. Les entreprises ont besoin de ceux-làégalement et les pouvoirs publics font en sorte qu’ils reçoivent un supplément de formation.
Un exemple : quinze jeunes en formation d’employé de banque. Ils ont le début de la vingtaine et ont trouvé des stages, par Internet ou des annonces dans les journaux,dans des grandes banques comme la Sparkasse ou la Volkkasse Raiffeisenbank. Ces stages prennent six semaines consécutives de leur année scolaire. Un contrat d’emploiles attend dans ces banques à la fin de leur cycle d’études.
Une filière non connotée
Les diplômes acquis ne sont absolument pas des titres au rabais. Beaucoup d’anciens diplômés accèdent à des fonctions dirigeantes à terme et ledirecteur actuel de la bourse de Francfort est issu d’une telle filière. Autre exemple, la société Kuhne, dans la périphérie de Bonn. Ce fabricantd’emballages en plastique emploie pas moins de 32 stagiaires sur un effectif total de 250 personnes. La première année, ceux-ci gagnent 600 euros par mois, la seconde 750 et ladernière 850, des chiffres qui sont globalement dans la moyenne. Siemens est l’un des plus grands pourvoyeurs de stages pour l’enseignement en alternance en Républiquefédérale. Deux tiers de ceux-ci concernent des fonctions techniques, un tiers des fonctions commerciales. Peter Eckhardt, responsable des formations chez Siemens, chiffre à huitsur dix la proportion des jeunes qui obtiennent un contrat d’emploi dans la société à l’issue de leur formation. Mais il estime aussi que la formation donnéeest suffisamment polyvalente pour permettre aux diplômés d’aller chercher ailleurs. Dans la même optique, les écoles veillent au bilinguisme allemand-anglais de leursdiplômés et se concertent fréquemment avec les responsables de formation des entreprises. Une rencontre plus approfondie entre les responsables scolaires et ceux des entreprisesest programmée au minimum une fois par an.
Pour Johan Albrecht, professeur d’économie à l’Université de Gand, le système d’enseignement en alternance constitue l’une des clefs dusuccès des PME allemandes. Il existe déjà sous sa forme actuelle depuis près de quarante ans mais il remonte beaucoup plus loin : à la tradition des guildes, oucorporations, bien implantée chez nos voisins. Le système oblige aussi les écoles, davantage que chez nous, à se tenir à jour du point de vue technologique. Maisadopter le système allemand du jour ne serait pas une sinécure selon lui : il y aurait beaucoup de règlements à assouplir au sein de l’enseignement et, par ailleurs,si certains secteurs économiques comme la métallurgie sont habitués au contact avec les écoles, pour d’autres, tout reste à faire.
D’après Vacature du 18/10/08