Appliqué depuis juillet 2004, le plan Vandenbroucke, qui vise le contrôle de la disponibilité des chômeurs sur le marché de l’emploi, ne fait pasl’unanimité. Les entretiens, pour les moins de 30 ans, ont débuté en octobre 2004. Alors que la deuxième phase, réservée aux 30-40 ans avec vingt et unmois de chômage, vient de débuter, la FGTB du Centre1 tire la sonnette d’alarme quant aux conditions dans lesquelles se sont déroulés ou sedéroulent encore les entretiens. Une rencontre citoyenne était organisée le 9 septembre, en présence du ministre régional de l’Économie et del’Emploi, Jean-Claude Marcourt (PS)2, à Haine-Saint-Paul, en présence de nombreux accompagnateurs et demandeurs d’emploi.
Un droit à la défense
La première pierre d’achoppement, signalent les accompagnateurs syndicaux, est le droit à la défense. « Ce droit est pratiquement nié, explique Daniel,accompagnateur. Au début, les demandeurs d’emploi avaient la possibilité de se faire accompagner, mais l’accompagnateur doit rester silencieux. Or, si un droitd’intervention est reconnu dès le premier entretien, il peut préparer le chômeur à répondre aux questions des facilitateurs et éviter la signatured’un contrat susceptible de provoquer un retrait des allocations de chômage dès le second entretien. »
De même, dans ce contexte, les droits de recours n’interviendraient que trop tardivement, à savoir après le troisième entretien. « En réalité,il n’y en a pas, poursuit Daniel. Vous avez dix jours de réflexion, vous signez ou vous perdez vos droits. Quelle est la personne qui va refuser de signer un contrat dans ces conditions? La procédure au tribunal du travail n’aboutit qu’après deux ans, c’est-à-dire quand le chômeur est exclu définitivement du droit aux allocationsde chômage. Le facilitateur a donc tout pouvoir pour imposer ses vues au cours du premier entretien, et ce phénomène s’accentue par la rapidité des contrôles.On parle de 14 entretiens par facilitateur, ce qui fait un quart d’heure par personne. Ils n’ont dès lors plus le temps de les entendre. »
L’inscription dans une agence d’intérim, les cours ou les formations peuvent également poser problème en cas de contrôle. « Suivre une formationétait auparavant suffisant pour une évaluation positive. Aujourd’hui, ce n’est qu’un élément positif et certains chômeurs peuvent se retrouver avecun refus de dispense de pointage pour une formation, ce qui les contraint à rester disponibles sur le marché du travail », ajoute un collègue.
Les accompagnateurs de la FGTB précisent encore que depuis plusieurs semaines, on constate une recrudescence des convocations-litiges à l’Onem3 pournon-présentation aux réunions collectives du Forem, même pour des personnes non encore concernées par le plan d’accompagnement. Ou que, dans l’application de lamesure, des dispositions se modifient d’un entretien à l’autre, sans que les accompagnateurs en soient avertis.
Les femmes particulièrement visées
Pour Freddy, également accompagnateur, les femmes sont particulièrement touchées par les effets pervers du plan Vandenbroucke. Et de citer l’exemple d’une femmeenceinte de 8 mois à qui un facilitateur de l’Onem a demandé de fournir des preuves de recherche d’emploi et quis’est vu finalement proposer un contrat, faute depreuves. « J’ai eu le cas d’une mère célibataire de trois enfants, que l’Onem pousse à rechercher une solution pour placer ses enfants, alors quel’on sait que les infrastructures d’accueil sont insuffisantes. La seule solution pour échapper à ces contraintes est l’application de l’article 90, une dispensepour se consacrer à l’éducation des enfants s’ils ont moins de 4 ans. Or, cette dispense s’accompagne d’une diminution des revenus. »
Les plus de 40 ans, dont l’évaluation commencera en juillet 2006, ne sont pas mieux lotis. « On va leur demander ce qu’ils ont fait pour rechercher un emploi sur unepériode d’un an, sans tenir compte de leur passé professionnel, au cours duquel, beaucoup auront déjà subi une restructuration, après avoir travaillépendant 20 ans. »
La vraie question : l’offre d’emploi
Pour Bernard Braglia, secrétaire général de la FGTB Centre, il faut arrêter de faire croire qu’il y a du travail en Wallonie. « On comptait endécembre 2004, 24.000 demandeurs d’emplois pour 115 offres d’emploi dans la région du Centre. En Wallonie, on dénombre une offre pour 45 demandes. Or,l’application de la mesure d’accompagnement tend à faire croire que les chômeurs sont responsables du manque d’emploi ; elle ne tient pas compte de laréalité des gens sur le terrain. » La FGTB demande dès lors une évaluation quantitative et qualitative sérieuse du plan d’accompagnement.
Réaction du ministre
Le ministre Marcourt a, quant à lui, déclaré qu’il ne pouvait rester insensible aux situations évoquées par les accompagnateurs. Il a reconnu que « le manqued’emploi restait le véritable problème ». En outre, il a rappelé qu’une évaluation concernant les dysfonctionnements du plan avait été programmée. « Ilfaut corriger cela et obtenir une plus grande transparence des procédures de contrôle. » À la Chambre, un débat doit avoir lieu après la rentrée parlementaireprévue le 11 octobre prochain. La Commission des affaires sociales doit encore se réunir pour décider des modalités concrètes de cette évaluation. Lesgroupes PS et Écolo, veulent une rencontre entre la ministre de l’emploi, Freya Vandenbossche, et les différents acteurs. Christopher Barzal, porte-parole du groupe PS à laChambre, évoque une rencontre avec les facilitateurs de l’Onem, les syndicats et les conseillers du Forem, du VDAB et de l’Orbem, voire des chômeurs.
1. FGTB Centre, rue Henry Aubry, 23 à 7100 Haine-Saint-Paul – tél. : 064/ 23 61 63 – fax : 064/ 26 34 76 – courriel : bernard.braglia@fgtb.be – contact : Bernard Braglia. Secrétaire général FGTB Centre.
2. Cabinet du ministre de l’Économie et de l’Emploi, place des Célestines, 1 à 5000 Namur– tél. : 081/23 41 11 – fax : 081/23 42 34 – courriel : jeanclaude.marcourt@gov.wallonie.be
3. Onem – Boulevard de l’Empereur, 7 à 1000 Bruxelles – tél.: 02/515 41 11 – fax: 02/514 11 06