La Caap, Concertation des associations actives en prison, vient de sortir un rapport sur les moyens mis en œuvre dans les prisons de Wallonie et de Bruxelles pour la réinsertion des détenus. Leur constat est clair : ils sont totalement insuffisants.
10 ans après l’adoption de la loi dite « loi de principes » dont l’objectif était d’encourager la réinsertion et la prévention contre la récidive via un plan de détention pour les détenus, où en est-on ? La Caap, Concertation des associations actives en prison vient de sortir un rapport sur les moyens mis en œuvre dans les 17 prisons de Wallonie et de Bruxelles en matière d’aide psychosociale, de culture, de santé, de sport , de formation professionnelle ou encore de préparation à la sortie. C’est la première fois que l’offre de services est ainsi mesurée et analysée.
Une situation catastrophique
Le constat de la CAAP est accablant : les services existent mais leur offre est inférieure aux besoins dans tous les domaines étudiés. Et les exemples ne manquent pas. Concernant l’aide psychosociale par exemple, le rapport démontre qu’il faut en moyenne 12 mois d’attente pour avoir accès à une consultation psychologique. A la prison de Jamioulx, seul ½ temps plein existe pour 300 détenus. Les services de formation, clés de la réinsertion, sont insuffisants également : on dénombre 392 places de formation professionnelle pour 5795 détenus. En matière de santé, la Caap tire aussi la sonnette d’alarme : les activités de promotion de la santé ou de prévention sont assurées par 8,25 équivalents temps-plein pour les 5.795 détenus que compte la Fédération Wallonie-Bruxelles. Or, on sait que la population carcérale est particulièrement touchée par les assuétudes ou les maladies virales.
Sur le plan du sport, ou de la culture, le constat est tout aussi alarmant. Exemple à Forest : aucune activité sportive encadrée n’est organisée alors qu’on compte 619 détenus pour 405 places.
Manque de cohérence
Au-delà de l’insuffisance de moyens, c’est aussi le manque de cohérence entre les différentes prisons qui est montré du doigt. Jacqueline Rousseau, présidente de la CAAP dénonce : « En cas de transfert d’un détenu d’une prison à une autre, un continuum est impossible, ce qui met à mal tous les efforts effectués par les acteurs professionnels et par les détenus eux-mêmes ».
La CAAP regrette aussi que le plan de détention prévu dans la loi de principes de 2005 ne soit toujours pas en application. « La loi de principes a créé un outil, le plan de détention », explique Jacqueline Rousseau,« le plan de détention contient le schéma du parcours pénitentiaire de la personne incarcérée. Malheureusement, après 10 ans, il manque toujours les arrêtés d’application. Or, le plan de détention permettrait de fixer des objectifs en termes de (ré) insertion, de suivre les détenus et de coordonner le travail de tous les acteurs en définissant un cadre de services commun à tous les établissements».
Pas de budget supplémentaire
Rachid Madrane, ministre francophone des Maisons de Justice, en charge de l’aide aux détenus, a conscience que « les services d’aide aux détenus sont essentiels pour favoriser une approche plus humaine de la justice». Le ministre s’engage d’ailleurs à restructurer l’aide aux détenus et à y apporter davantage de cohérence, notamment par la réactivation de la conférence interministérielle visant les coordination des politiques d’interventions en lien avec le milieu carcéral », qui ne s’est plus réunie depuis 2010. Mais il prévient aussi : «Des moyens supplémentaires ne seront pas dégagés à court terme ».
Aller plus loin
Lire notre dossier prisons, AE, n°396, juillet 2014.