Selon une étude de l’Université d’Anvers, introduire un système d’allocation-loyer en Région flamande serait très efficace pour lutter contre la précarité. L’étude en question a tenu compte des restrictions budgétaires du moment.
C’est le Centrum voor Sociaal Beleid de l’Université d’Anvers qui a réalisé cette étude. L’intérêt de l’exercice est lié à la sixième réforme de l’Etat qui est actuellement en cours d’élaboration. En effet, alors que la marge de manœuvre de la Région flamande pour mener une politique de logement propre est actuellement de 300 ou 600 millions selon la manière de calculer, elle devrait passer à 1,6 milliard lorsque les nouvelles compétences prévues par les négociateurs auront été transférées aux entités fédérées.
Or, constatent les auteurs, de ce montant, actuellement géré en grande partie, on l’aura compris, par le fédéral, la plus grande partie (1,3 milliard) va à des ménages qui sont déjà propriétaires. Il y a en effet toujours eu une tendance lourde en Belgique à favoriser l’accès à la propriété (80 % des Flamands sont propriétaires de leur logement, quasiment un record mondial) et à ne consacrer que des budgets relativement modestes à la construction de nouveaux logements sociaux.
Les 300 millions qui restent bénéficient à ceux qui arrivent à décrocher le droit d’occuper un logement social. 130 000 ménages occupent actuellement un tel logement en Région flamande. Quant aux moins chanceux, ceux qui devraient théoriquement avoir droit à un logement social, mais se morfondent désespérément dans la file d’attente, ils sont, dans le système actuel, les grands oubliés des pouvoirs publics et se retrouvent le plus souvent à louer au prix fort à des propriétaires privés un logement relativement médiocre. Le nombre de ménages en attente d’un logement social en Flandre tourne lui aussi autour des 130 000.
Une politique efficace
Que se passerait-il si l’on décidait de consacrer une partie de la manne réservée aux propriétaires à la mise sur pied d’un système d’allocation-loyer, comme il en existe dans plusieurs pays d’Europe de l’Ouest ([i]Alter Echos[/i] n° 301, 19.09.2010 : « L’allocation-loyer nouvelle est arrivée ») ? C’était là l’objet de l’étude anversoise. Les auteurs sont donc partis de chiffres qui tiennent compte des restrictions budgétaires actuelles : l’enveloppe globale consacrée à la politique de logement resterait inchangée dans l’hypothèse retenue. Le critère qui a été utilisé est celui qui est déjà généralement pris en compte par les CPAS dans l’évaluation de cas individuels : le prix du loyer du logement familial ne devrait jamais excéder 30 % des revenus totaux de la famille. Au-delà de cette proportion, la famille devrait recevoir une aide des pouvoirs publics.
Selon les auteurs, l’application générale de cette règle ne coûterait que 150 millions à la Région flamande. Cet argent bénéficierait à 3 % des familles et les familles en question verraient leurs ressources augmenter de 10 % en moyenne. Le nombre de locataires de logements privés sous le seuil de pauvreté devrait diminuer de 20 %. Le budget consacré aux propriétaires diminuerait d’environ 9 %, mais les propriétaires en question ne verraient leurs revenus diminuer que de 0,3 % en moyenne.
Il faut noter que l’introduction d’un système d’allocation-loyer ne poserait pas de problème politique majeur. Les sociétés de logement social, les CPAS mais aussi les associations de locataires sont depuis longtemps demandeurs d’un tel système et la plupart des partis politiques ne sont pas opposés à sa mise en place. Le premier ministre régional du Logement à proposer l’idée, sans toutefois parvenir à la mettre en oeuvre, était d’ailleurs un libéral, Marino Keulen (Open VLD).
Enfin, selon les auteurs, l’effet de hausse sur les montants des loyers parfois constaté suite à la mise en place d’un système d’allocation-loyer devrait rester relativement limité, du fait de l’effet positif prévisible de la mesure sur l’offre de logements. Ils soulignent du reste que les mesures d’encouragement à la propriété ont souvent un effet pervers : celui de pousser à la hausse les prix des logements, ce qui ne bénéficie somme toute à ceux qui occupent les logements en question que dans le cas où ils les revendent.
D’après De Morgen et De Standaard