Parmi les mesures sociales développées par la Région wallonne, deux concernent plus précisément les CPAS. Il s’agit de la guidance socialeénergétique (GSE) et des aides à l’investissement Mebar, destinées aux ménages à revenus modestes. Des dispositifs qui, aujourd’hui,n’atteignent pas encore leur pleine efficacité faute d’atteindre tout à fait leur public cible.
Les CPAS peuvent bénéficier de subsides de la région afin d’assurer des guidances sociales depuis 20041. À cette fin, les CPAS doivent introduire avant le 15mars de chaque année, un plan de guidance sociale énergétique. Ces plans couvrent une période de deux ans et octroient 250 euros par bénéficiaire du revenud’intégration sociale avec un plafond de 50 000 euros.
La guidance sociale énergétique (GSE) a pour mission d’informer les personnes sur l’utilisation rationnelle de l’énergie (URE) et sur la maîtrise des consommations, demener des actions préventives et curatives dans ces domaines et de diffuser une information visant à faciliter l’accès aux aides financières existantes. Dans le plan, lesCPAS peuvent également envisager de préfinancer certaines aides à l’investissement.
Quelques « bonnes pratiques »
Concrètement, les CPAS ont élaboré des plans essentiellement axés sur l’organisation de séances de formation, la réalisation d’outils desensibilisation, le recours à des professionnels pour identifier dans le logement les postes les plus énergivores. Certains ont également aidé des usagers àinvestir dans des équipements performants (frigo ou machine à laver de classe A) par des avances récupérables. Parmi les bonnes pratiques, on notera le projet du CPAS deHerstal qui a réalisé de petits films d’animation dans le cadre du projet « Caméra enfants admis » et un jeu d’animation qui est devenu un outil pourd’autres CPAS ; le Centre de référence du Hainaut qui a réalisé une mallette pédagogique avec des magnets à apposer sur le frigo et des autocollants,ou encore une pièce de théâtre comme outil de sensibilisation au CPAS de Brunehaut.
Outre les missions de prévention, il est également possible de préfinancer certains investissements destinés à réduire la fractureénergétique. Ainsi, en 2007, trente prédinancements ont été acceptés pour l’achat d’électroménager. Une aide qui peut êtrecumulée avec celle du Fonds fédéral énergie et les différentes primes régionales à l’énergie. La Région wallonne prend en charge20% des impayés, le reste étant à charge du CPAS. Sur le terrain, les CPAS utilisent assez peu cette possibilité de préfinancement, le prêt devant êtreremboursé pour la fin du plan, ce qui laisse parfois trop peu de temps pour avoir des remboursements mensuels acceptables. De plus, les personnes auxquelles s’adresse ce prêt sontsouvent locataires et n’ont donc pas envie de se lancer dans ce type d’investissement.
Limites et pistes
Malgré des expériences positives, les CPAS relèvent aussi des difficultés auxquelles les assistants sociaux sont régulièrement confrontés dans lecadre de la mise en œuvre des plans et dont les principales sont, d’une part, le manque de moyens humains au sein des CPAS, d’autre part, la difficulté de mobiliser le publiccible et enfin, l’impossibilité de pouvoir financer directement certains investissements matériels. « Ainsi par exemple, il est très bien de faire de lasensibilisation à l’utilisation rationnelle de l’énergie, relève Véronique Pisano, « facilitatrice sociale » à la cellule énergie de laFédération des CPAS wallons2, mais c’est surtout sur la qualité des logements qu’il faut agir et les bénéficiaires du revenud’intégration sociale sont en général loin de bénéficier de logements corrects. Enfin, il y a un manque de moyens pour donner suite aux conseilsprodigués. Quand on réalise un audit énergétique, qu’en est-il de la suite ? Qui va financer les travaux ? Le Fonds fédéral de réduction ducoût global de l’énergie qui peut octroyer des financements est encore dans les limbes en Wallonie et le Fonds social énergie sert surtout à apurer les dettesénergie et quand il reste de l’argent, il est consacré aux actions préventives. Donc les CPAS n’ont pas les moyens de donner suite à ces audits.»
Des limites aux plans de GSE dont est bien consciente Francesca Stockman, première attachée juriste à l’administration wallonne de l’Énergie3.« Nous constatons que parfois, il y a d’énormes différences entre le plan rentré et ce qui est au final réalisé. Les assistants sociaux sont parfoisperdus. On leur demande d’ajouter la GSE à des journées déjà bien remplies. De plus, les CPAS ont du mal à mobiliser le public à des séancesd’information pour recevoir les conseils en matière de GSE. Ils s’adressent alors aux écoles, ce qui en soi peut aussi s’avérer efficace, on passe par lesenfants pour atteindre les parents, mais nous voudrions recentrer sur un public adulte de plus de 18 ans, c’est pourquoi ce critère figurera dans le nouvel appel à projets. On aégalement ajouté l’obligation de suivi individuel de ménages précarisés par les CPAS, libre à eux de définir les critères de choix.»
Enfin, afin de faciliter la tâche des CPAS, l’administration de l’Énergie va prochainement lancer une offre en marché public pour développer des outilscommuns à tous les CPAS wallons avant la fin de l’année. Une farde thématique leur sera également envoyée le 1er juin, elle comprendra entre autresdes informations sur la libéralisation, les primes, les procédures sociales, les « gestes énergie », une formation théorique et technique accessible àtous. La Région wallonne organisera par ailleurs prochainement des séances d’information sur les mesures sociales et la libéralisation, destinées aux CPAS et aumonde associatif. Francesca Stockman rappelle qu’il est également possible d’organiser des séances de formation à la demande.
Appel à projets
En 2004, quatre-vingt-un CPAS ont vu leur proposition de plan de guidance sociale énergétique acceptée ; en 2005, ils étaient quarante-quatre plans et en 2006,nonante-neuf. En 2007, il n’y a pas eu d’appel à projets, la mesure étant en cours d’évaluation. Un nouvel appel à projets démarrant le1er juin 2008 se clôturera
ce 15 mars. Plus d’infos sur :
http://energie.wallonie.be/xml/doc-IDC-3205-IDD-10828-.html
Mebar, l’aide à l’investissement URE
La mesure Mebar est plus ancienne que la guidance sociale énergétique, elle existe en effet depuis 1992 et a été revue en 19984. Elle est destinée auxménages dont les ressources sont inférieures ou égales au montant du revenu d´intégration majoré de 20%. Mebar permet d’octroyer des primes de 1365euros maximum pour des investissement mobiliers (placement d’appareils de chauffage) ou immobiliers (travaux de menuiserie, d’isolation), favorisant l’utilisation rationnelle del’énergie.
Le budget consacré par la Région wallonne à cette mesure est d’1,5 million d’euros par an. La procédure est la suivante : la demande doit êtreeffectuée auprès du CPAS de la commune du logement concerné. Celui-ci adresse une demande complète à l’administration de l’énergie de la régionwallonne (DGTRE). Après acceptation du dossier par l’administration, le guichet de l’énergie le plus proche effectue une visite sur place pour évaluer la nature précisedes travaux à réaliser. Sur cette base, l’administration passe commande à l’entreprise qui réalise les travaux. Le guichet de l’énergie s’assure sur place de labonne exécution de ceux-ci. La procédure dure au minimum trois mois avant l’exécution des travaux.
Seuls les investissements mobiliers ont la cote
Environ 1 700 dossiers sont introduits par an, 85% sont acceptés. 64% des personnes qui rentrent un dossier ne constituent pas la « clientèle » classique des CPAS. Lesmotifs de refus concernent les ménages qui dépassent le plafond de revenus pris en compte et ceux qui cumulent les subventions – on ne peut en effet profiter de la primequ’une fois tous les cinq ans.
Si la mesure est aujourd’hui rodée et en général bien connue du public, elle comporte aussi quelques limites. Les primes sont en effet octroyées essentiellementà des locataires : ils sont 70% à en bénéficier contre seulement 30% de propriétaires, avec 90% des dossiers acceptés qui concernent des placementsd’appareil de chauffage entre 9 et 14 kW. Les locataires peuvent en effet emporter leur poêle lorsqu’ils déménagent, ce qui n’est pas le cas pour les autresinvestissements possibles avec la prime Mebar. « Certains même, nous confie Francesca Stockman, revendent leur poêle celui-ci aussitôt installé. Nous n’avons pasde moyen de contrôle sur cela. »
Parmi les évolutions récentes, une augmentation d’achat des appareils de chauffage au charbon due à l’augmentation du prix du mazout et du gaz. Les personnespeuvent ainsi acheter des plus petites quantités et fragmenter davantage leurs dépenses de chauffage. Les appareils installés fonctionnent pour 40% d’entre eux au mazout,35% au gaz, 19% au charbon et le reste au charbon et au bois. Quant au type de logements qui bénéficient de ces investissements, il s’agit pour 27% de logements sociaux, 69% delogements privés et de 2,5% de caravanes dans les campings résidentiels.
Consciente qu’il s’agit ici plus d’une mesure sociale que d’une véritable mesure URE, la Région wallonne compte faire évoluer le dispositif d’iciquelques mois. « Nous envisageons de coupler la mesure avec la guidance sociale énergétique, explique Francesca Stockman, et d’agir davantage sur le bâtiment,notamment en collaborant avec les agences immobilières sociales. » À suivre donc…
1. Arrêté du gouvernement wallon du 4 décembre 2003 relatif à la guidance sociale énergétique.
2. Union des villes et communes de Wallonie – Fédération des CPAS – Cellule sociale énergie :
– adresse : rue de l’Étoile, 14 à 5000 Namur
– tél. : 081 24 06 64
– courriel : veronique.pisano@uvcw.be
– site : http://www.uvcw.be/cpas
3. Division de l’Énergie de la Direction générale des technologies, de la recherche et de l´énergie (DGTRE) du ministère de la Région wallonne:
– adresse : av. du Prince de Liège, 7 à 5100 Jambes
– contact : Francesca Stockman
– tél. : 081 33 56 43
– courriel : f.stockman@mrw.wallonie.be
– site : http://energie.wallonie.be
4. Arrêté du gouvernement wallon du 23 décembre 1998 relatif à l’octroi de subventions aux ménages à revenu modeste pour l’utilisation rationnelle etefficiente de l’énergie.