Il est bien connu que les inactifs grèvent le budget des Etats, en particulier la sécurité sociale…
Et on peut comprendre le ressentiment des « vrais travailleurs », pour reprendre le terme du président français sortant, Nicolas Sarkozy.
Mais, au-delà du « activez-vous », quels sont les incitants mis en place pour (re)mettre au travail les inactifs et y maintenir les actifs ? Il est légitime de se poser la question.
Glenda Quintini et Paul Swaim, de la Direction de l’emploi, du travail et des affaires sociales, OCDE1, pour ne citer qu’eux, faisaient ce constat en 2003 : « Les femmes, les personnes peu qualifiées, les seniors et les handicapés sont tous sous-représentés dans la population active. Est-il possible d’accroître leur taux d’activité et, si oui, pendant combien de temps ? » Ils n’étaient ni les premiers, ni les derniers à soulever cette problématique. Toutefois, ils avaient tenté alors d’apporter quelques réponses. Ils estimaient que les femmes travailleraient volontiers « si elles bénéficiaient de services de garderie plus abordables et de meilleure qualité ou de conditions de travail plus compatibles avec l’éducation des enfants ». Ces solutions, le modèle allemand, tant loué par les décideurs de tous pays, est loin de les avoir apportées. Les crèches sont quasi inexistantes, ce qui oblige les jeunes mamans à rester à la maison pendant des années2. Et que dire, chez nous, des restrictions d’accès aux réductions de temps de travail.
Ils dressaient aussi d’autres constats :
- « les handicapés représentent un cinquième de la population des sans-emploi d’âge actif mais un grand nombre d’entre eux pourrait travailler, à condition de bénéficier du soutien approprié » ;
- « il faudrait leur proposer [aux seniors] des incitations financières et juridiques ainsi que des conditions de travail appropriées » ;
- « L’insuffisance du bagage scolaire décourage […] manifestement les personnes peu qualifiées d’intégrer le marché du travail et il convient de prendre davantage de mesures pour remédier à cette situation ».
Très franchement, vous connaissez beaucoup d’entreprises prêtes à engager des mères de jeunes enfants ? Vous avez vu beaucoup de femmes crever le plafond de verre ? En 2004, elles ne constituaient que 19 % des dirigeants – avec un écart salarial de 22,7 % – et des chefs d’entreprise et cadres supérieurs – écart salarial 34,1 %.
Dans le même ordre d’idées, et malgré toute la bonne volonté de la FEB (Fédération des entreprises de Belgique) lors de son forum « Comment garder les 50+ actifs plus longtemps ? » de septembre 2011, les entreprises se bousculent-elles vraiment au portillon pour engager des seniors ou les maintenir au boulot ? D’après un sondage d’Idea Consult réalisé pour la FEB, 70 % des employeurs affirment être prêts à engager des plus de cinquante ans. Selon les syndicats, seuls 5 % des employeurs jouent réellement le jeu, comme nous l’expliquions dans un précédent édito3. Nous sommes loin d’être au Japon, où l’emploi des plus vieux atteint un niveau record.
Et les handicapés et les infraqualifiés ? Est-ce que tout est vraiment mis en œuvre pour employer ces inactifs ? Les entreprises en veulent-elles vraiment ?
J’ai oublié les actifs ? Rassurez-vous, les politiques d’austérité et la logique de « toujours plus de pression » sont là pour s’occuper d’eux.
Nous n’avons pas de réponse. Sauf à nous rappeler que la plupart des « vrais travailleurs » savent que la vie est un long fleuve tranquille et, bien sûr, qu’il n’y a aucun sens à participer aux mécanismes de solidarité qui bénéficient à tous !
Baudouin Massart
1. http://www.observateurocde.org/news/fullstory.php/aid/825/Mettre_au_travail_les_inactifs.html « Mettre au travail les inactifs », in L’Observateur de l’OCDE, n° 239, septembre 2003.
2. http://blog.lesoir.be/alterechos/2012/02/27/ou-vont-les-femmes/ Où vont les femmes ? Blog alterchos, Le Soir
3. https://www.alterechos.be/index.php?p=sum&c=a&n=323&l=1&d=i&art_id=21703« Pour financer les pensions, faisons bosser les vieux », Alter Echos n° 323