Les accords interprofessionnels signés en décembre pour 2001-2002 prévoient l’ouverture de négociations sur la fin de l’interdiction de l’intérim pour lesouvriers dans le secteur de la construction.
Le calendrier sur lequel les partenaires sociaux se sont entendus au niveau sectoriel ne semble pas aller aussi loin. Même son de cloche à la CSC et à la FGTB : l’intérimclassique est exclu d’office dans la construction. « Cela créerait plus de problèmes que de solutions, explique Luc Van Dessel, responsable national de la CCTBB (CSC)1. On va travaillerd’abord sur des conventions qui créent des nouveaux canaux d’insertion »2.
« L’intérim pur est indiscutable et imbuvable », s’exclame Hans Raes, responsable construction de la Centrale générale FGTB3.
Trois raisons sont avancées.
> La dualisation de l’emploi. « Il n’est pas question de créer deux groupes de travailleurs dans la construction, avec les moins qualifiés d’un côté, et ceux qui ont unvrai statut de l’autre. Pour avoir assez de gens, il faut investir dans la formation ; l’intérim, c’est désinvestir », continue Hans Raes.
> La difficulté des contrôles. La négociation a mis l’accent ces dernières années sur l’amélioration de la transparence des chantiers (Dimona, etc.), defaçon que, en cas d’inspection notamment, on sache facilement pour quelle entreprise travaille tel ouvrier. « Avec l’intérim on risque de réintroduire des nouvellespossibilités de fraude, explique le délégué FGTB. Lors de contrôles, on va se retrouver face à des ‘arguments parapluie’ comme dans l’Horeca : ‘Cet ouvriern’a pas de contrat ? c’est normal, c’est un intérimaire, c’est son premier jour de travail’ alors que c’est un travailleur au noir et dès que l’inspecteur est parti, on va vitel’inscrire en intérim pour être en règle le lendemain ! »
> La sécurité. La construction est un secteur dangereux : 35 morts en 2000. Or on sait que les travailleurs intérimaires, statistiquement, risquent plus que les autresl’accident de travail. « A fortiori dans la construction. Il n’est pas question d’ouvrir cette porte ! » tranche Hans Raes.
Cette négociation s’ouvre le 1er mars, alors que le banc patronal, la CNC, se félicite toujours de l’introduction de l’intérim dans le secteur4. La CNC semble avoir marquéson accord pour commencer par négocier sur l’insertion. Il apparaît d’ailleurs que l’intérim n’est pas une priorité unanime chez les patrons du bâtiment: il seraitsurtout soutenu par les plus grosses entreprises du secteur, pour lesquelles les opérations de préparation et de nettoyage des chantiers, effectuées par des ouvriers tropqualifiés pour ce type de tâches, coûtent le plus cher. Ce qui les amènerait à revendiquer plus fermement davantage de flexibilité.
Quant à savoir si face à de telles situations des réponses intéressantes ne pourraient pas être offertes par des innovations comme des groupements d’employeurs quiengageraient un personnel en insertion, Hans Raes répond catégoriquement : « Si on ouvre une porte, n’importe laquelle, on va l’utiliser pour contourner la législation. »
Si les négociations sectorielles n’aboutissent pas pour fin décembre, la question sera rediscutée par le Conseil national du travail.
1 Centrale chrétienne des travailleurs du bois et du bâtiment, rue de Trèves 31 à 1040 Bruxelles, tél. : 02 285 02 11, fax : 02 230 74 43.
2 Selon le texte de l’accord, « les interlocuteurs sociaux du secteur concerné sont invités à réfléchir aux modalités d’application du travailintérimaire, ou d’un système équivalent dans ses effets, qui leur paraissent les plus appropriées pour répondre aux besoins des entreprises et pour assurer lerespect des droits et statuts sociaux des travailleurs ».
3 Rue Haute 26-28 à 1000 Bruxelles, tél. : 02 549 05 49, fax : 02 514 16 91.
4 Voir le communiqué du 6 décembre sur son site Web http://www.confederationconstruction.be CNC : rue du Lombard 34-42 à1000 Bruxelles, tél. : 02 545 56 00, fax. : 02 545 59 00.
Archives
"Intérim dans la construction : les réserves des syndicats"
Thomas Lemaigre
26-02-2001
Alter Échos n° 92
Thomas Lemaigre
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