En droit, l’État se doit de ne pas s’immiscer dans la vie des familles (sauf, selon de rares cas prévus par la loi). Caisse de résonance des expériences et émotions les plus intimes, la famille est le lieu par excellence du privé. Face aux crises, elle est aussi un lieu de résilience, de résistance. Ses membres (le plus souvent les femmes) déploient des trésors de solidarité, ici pour compenser le manque de places en crèche, là pour assurer des soins et aides à domicile, là encore pour tenir face à la crise du logement… Une famille qui pallie, en quelque sorte, les carences des politiques publiques (lire «Quand la famille nucléaire vient en renfort»).
Car s’il ne peut faire preuve d’ingérence, l’État a néanmoins l’obligation de «protéger la vie familiale». En cela, oui, la famille est un enjeu éminemment politique. «Il faudrait tout de même que tous les niveaux de pouvoir se rendent compte qu’ils sont concernés par la famille. Je ne pense pas qu’il faille pour autant une ou un ministre chargé de cette compétence, mais plutôt une prise en charge globale des conditions idéales pour être parent», nous dit Madeleine Guyot, la nouvelle directrice de la Ligue des familles (lire «La famille ne fait plus rêver»).
Quand ces conditions idéales font défaut, le coup peut être dur. Épuisement profond, distanciation émotionnelle avec ses enfants, perte d’épanouissement et de plaisir par rapport au fait d’être parent: le burn-out parental est un mal moderne, qui touche particulièrement la Belgique – 9,8% de prévalence, soit dans le haut du classement des 42 pays étudiés dans une étude de 2021 (lire «Des parents au bout du rouleau»).
«L’idéal parental» est de plus en plus difficile à atteindre, aussi, pour les familles nombreuses, qui «présentent en moyenne une situation socio-économique plus fragile et de plus grandes difficultés de logement» (lire «Familles nombreuses, une espèce en voie de disparition?»).
Malgré tout, la famille en fait encore rêver certains. Notamment ces parents d’accueil qui décident d’ouvrir leurs portes – pour quelques semaines ou de longues années – à des enfants éloignés, pour leur propre bien, de leur famille d’origine (lire «Parents d’instants, par instinct»).
Dossier illustré par Sophie Sitemboun