Janvier 2019. Des allocataires sociaux en viennent aux mains dans les locaux du CPAS de La Louvière. L’année précédente, deux travailleurs y avaient été victimes d’une agression (lire «L’équilibre fragile du CPAS de La Louvière»). Au Forem, chez Actiris, dans de nombreuses associations de terrain, les travailleurs de première ligne font face à des formes d’agressivité, verbales ou – plus rarement – physiques. Un phénomène apparemment marginal, mais qui suffit à saper le bien-être au travail.
Malgré des chiffres rassurants, il flotte dans l’air l’impression d’un phénomène souterrain en augmentation, mal mesuré, dont on parle peu. Alors les CPAS, Actiris, le Forem cherchent une parade, tantôt grâce à des «dispositifs technico-sécuritaires» – boutons d’alerte, baies vitrées, vigiles – tantôt en améliorant leur offre de services – fin des files d’attente, espaces conviviaux – et, presque toujours, en proposant des formations (lire «Agressions: quels dispositifs dans les services publics?»).
Si le phénomène est souterrain, c’est que «le silence s’installe autour des agressions vécues», explique Vincent Libert, formateur au sein de l’asbl Praxis (lire «Se former pour faire face aux violences»). Les formations aident parfois à libérer la parole et à s’armer pour désamorcer les situations. Mais elles ne permettent pas toujours d’éradiquer la peur, qui rôde lors des rondes de nuit des gardiens de la paix de l’asbl Bravvo (lire «Gardiens de la paix: ‘un métier dangereux’»).
S’indigner de la violence subie par des travailleurs sociaux est une chose. En comprendre les causes en est une autre. Les «violences institutionnelles» sont souvent convoquées. Kris Meurant, de l’asbl Transit, constate «une sursaturation de l’accès à la première ligne. Il y a un tel flux qu’on ne peut plus travailler dans les meilleures conditions possible. Cela génère une tension qui est plus palpable». Cette tension, très concrètement, c’est «une chaise qui vole, un café jeté au visage, un chapelet d’insultes»…