À Anvers, l’entreprise d’économie sociale Levanto a lancé un projet de coaching en isolation. Une approche unique destinée à lutter contre la précarité énergétique et récompensée cette année par la Fondation Roi Baudouin.
Tout est parti d’un constat: les personnes précarisées sont souvent mal informées des primes à la rénovation et des diverses aides publiques dans ce domaine. Les conseils en isolation ne sont pas toujours suivis. «Avoir un travail effectué par un entrepreneur pour isoler son habitation est souvent impossible en raison des budgets limités de ce public fragilisé. Et tout isoler par soi-même, c’est une étape trop difficile parce que les gens ne savent pas comment commencer, ne disposent pas des outils nécessaires ni de moyens de transport pour les matériaux encombrants… Toute l’idée de notre projet, c’est donc d’aider ce public avec des coachs qui peuvent l’accompagner et limiter les obstacles à l’isolation, en faisant en sorte que les personnes coachées deviennent peu à peu autonomes», explique Manuel Leuridan de Levanto. Avec un objectif très ambitieux: toucher 200 ménages précarisés en 2015.
Concrètement, le coach vient faire un audit énergétique et indique les travaux à réaliser pour bien isoler le bâtiment. Le tout dure une journée après laquelle la personne coachée reçoit une «liste de courses» comprenant le matériel avec lequel il va pouvoir isoler son habitation. L’originalité de la démarche, c’est que les coachs montrent aux clients comment isoler leur habitation et ensuite, ce sera aux personnes accompagnées de se lancer! Car, dès le départ, l’idée du projet de Levanto a été de miser sur l’implication du public, de mettre en avant des ressources et des compétences qui peuvent être valorisées par la suite. Une manière de renforcer les liens sociaux d’un public fragilisé.
Des demandeurs d’emploi formés pour devenir coachs
Tout au long des travaux, les clients peuvent faire appel à un helpdesk en cas de problème. Durant le coaching, on explique aux personnes accompagnées les primes auxquelles elles peuvent avoir droit. Comme il ne s’agit pas toujours de sommes très importantes, l’entreprise en économie sociale a même pu négocier auprès de la Ville d’Anvers que l’accès au prêt à 0% soit possible à partir d’un montant minimal de travaux de 660 euros au lieu de 1.250 normalement. En outre, Levanto peut fournir du matériel à des tarifs préférentiels (notamment à un taux réduit de TVA), ce qui permet de réduire la facture du public coaché. Un contrôle de qualité de l’isolation est prévu à la fin des travaux.
À noter aussi que les équipes de coachs sont composées de demandeurs d’emploi qui ont été formés en isolation et ont, grâce à cette expérience, de meilleures chances de s’insérer par la suite sur le marché du travail.
Active depuis six ans à Anvers, l’entreprise en économie sociale Levanto regroupe deux associations: BuurtOntwikkelingsMaatschappij, qui a travaillé dans différents quartiers défavorisés de la métropole flamande, et Vitamine W, dont les activités sont basées sur la prise en charge des demandeurs d’emploi de longue durée. Depuis son lancement en 2009, Levanto s’est fixé trois objectifs qu’on retrouve dans ce projet de coaching en isolation: favoriser l’habitat durable, créer davantage de logements abordables pour les personnes avec des ressources limitées et créer des possibilités d’emploi social.
«On doit d’abord apprendre aux gens à trouver leurs compteurs»
Pour certains locataires, une facture d’électricité est aussi incompréhensible qu’un manuscrit chinois. À Bruxelles, les accompagnateurs énergie de la Fédération des services sociaux aident les plus précarisés à déchiffrer leur consommation pour mieux la maîtriser. Mais l’exercice a ses limites, liées à la réalité d’un marché locatif très inégalitaire. Lire l’article de Martine Vandemeulebroucke paru dans l’Alter Échos n°371-372 du 6 décembre 2013: «Précarité énergétique: réduire la f(r)acture?» (numéro spécial).
Aller plus loin
Fil d’infos du 12.02.2015: «Énergie pour tous», Pierre Jassogne
Alter Échos n°396 du 03.02.2015: «Paul Furlan: Remettre du bon sens dans l’organisation du logement public», Amélie Mouton