Jan Béghin1, un député bruxellois à la personnalité atypique, qui a quitté le CD&V en raison de son rapprochement avec les nationalistes dela N-VA.
Aujourd’hui siégeant comme SP.A-Spirit au Parlement bruxellois, le voici à l’origine d’un ouvrage collectif bilingue2 consacré à une question qu’il entendremettre à la une des priorités politiques : la pauvreté à Bruxelles.
« En juillet 2005, lorsque j’ai appris que le dixième rapport sur l’état de la pauvreté ne paraîtrait pas, j’ai été pris d’une colère toutelégendaire; les mauvaises langues affirment que ce rapport aurait mis en danger le monde politique. Le Parlement bruxellois, ce même parlement qui avait imposé au gouvernement lapublication annuelle d’un tel rapport est resté impassible. Le débat bruxellois sur la pauvreté est au point mort », dénonce le parlementaire.
Quand est-ce qu’on bouge ?
On ne peut donner tort au député, les multiples recommandations des rapports successifs sur l’état de la pauvreté sont souvent restées lettre morte. Or, si lamoyenne nationale des personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté avoisine les 15%, à Bruxelles, on parle de 20%. Ainsi, un Bruxellois sur 20 bénéficie d’une allocationdu CPAS. Plus d’un quart des Bruxellois vit dans un ménage sans revenu du travail ou dans un ménage qui reporte ses soins de santé pour des raisons financières. « Davantage, près de 25 % si l’on tient compte des sans-abri et des sans-papiers, insiste Jan Béghin. Le taux de chômage est comparable, il grimpe même à plus de 30 %chez les plus jeunes. Et 27 % des enfants grandissent dans une famille où il n’y a pas de revenu du travail. »
De là à parler d’un plan d’urgence ? « Oui, sans hésiter », répond le député qui réclame un plan bruxellois de lutte contre la pauvreté. Unplan d’urgence qui s’attaque aux racines du mal : priorité au logement, égalité des chances dans l’enseignement, endiguer le surendettement, donner du travail aux Bruxellois,renforcer les CPAS. Avec quels moyens ? Jan Béghin identifie une piste : les 150 millions d’euros que la Région bruxelloise pourrait obtenir chaque année si elle recevait unedotation moyenne par habitant comparable à celle de la Flandre et de la Wallonie.
Le député estime encore indispensable d’obtenir une liaison des revenus minimaux au bien-être. » Le revenu d’intégration actuel revient à 625,60 euros pour unepersonne isolée et à 834,14 euros pour une famille. Essayez donc d’en vivre ! « , clame-t-il. D’où le lancement d’une pétition3 en marge du livre pourl’obtenir.
L’Objectif de Jan Béghin en publiant cet ouvrage est clair : il veut remettre la pauvreté à l’agenda politique. Pour ce faire, il a voulu donner une image de lapauvreté à Bruxelles sous différents points de vue : celui des chercheurs, des organisations sociales, des éducateurs de rue, des organisations actives dans le domaine dela pauvreté et des Bruxellois qui vivent dans la pauvreté. Cela donne un livre assez hétéroclite, où l’on passe du texte d’un sociologue à l’extrait dujournal de bord d’une demandeuse d’emploi, tantôt avec bonheur, tantôt moins avec un fait à souligner car trop rare, une attention particulière a étéportée aux sans-papiers de la capitale au travers de plusieurs témoignages.
Le plan d’urgence selon Jan Béghin
« Bruxelles a besoin d’un plan d’action, fort de quelques principes de base très simples. S’appuyer sur une analyse bien documentée des besoins et des problèmes. Suivrel’évolution statistique d’une série d’indicateurs de pauvreté. Analyser systématiquement tous les aspects de l’exclusion sociale (enseignement, emploi, soins desanté, participation, service social, famille, administration de la justice, logement, culture,…). Favoriser le développement d’un tel plan à un niveau bruxellois politique etsocial le plus large possible, en y associant les pauvres eux-mêmes. Élaborer un budget pluriannuel avec une description claire des priorités, des mesures à prendre et desinstruments politiques à utiliser par institution concernée. Préaffecter au plan des moyens pour une longue période, de façon contractuelle et exclusive.Intégrer une méthode d’évaluation en vue, le cas échéant, d’une adaptation annuelle. Voilà tout au moins une approche méthodique. » Un plan dontle député bruxellois dit faire son principal combat. Restera à voir quel soutien recevra son initiative (menée avec son collègue Ecolo, Paul Galand) d’adapterl’ordonnance relative au rapport sur l’état de la pauvreté…
1. Jan Béghin, rue du Lombard 61-67 à 1000 Bruxelles – tél. : 02 213 71 60 – jbeghin@bruparl.irisnet.be
2. Le livre Pauvreté à Bruxelles, Jan Béghin [réd.], 352 p., est en vente dans les librairies au prix de 19,50 euros ou à l’Institut Kurde de Bruxelles, rueBonneels, 16 à 1210 Bruxelles – tél. : 02 230 89 30 – courriel : info@kurdishinstitute.be
