Les Ecolos ont insisté pour assumer la compétence du Logement au sein du gouvernement wallon. Après une longue consultation du secteur, Jean-Marc Nollet cherche àimposer sa marque à travers une importante réforme du Code du logement.
Alter Echos : Comment avez-vous envisagé ce processus qui est la plus grande réforme du Code depuis dix ans ?
Jean-Marc Nollet : C’est évidemment la grosse réforme de législature. Le besoin de logement concerne 27 000 à 30 000 ménages. Dans lecadre des ateliers « Le logement public en chantier », différentes idées ont émergé. La principale ? La demande d’accompagnement social, un besoind’accès à d’autres services. Concrètement, l’idée de référent social est née dans les ateliers ainsi que celle que les CCLP soientplus impliqués dans l’accueil des locataires.
AE : L’aspect financier est important…
JMN : Et comment ! La situation financière de certaines sociétés pose problème. Les nouveaux locataires ont des revenus moins élevés.Au-delà de la situation des quatre sociétés très endettées (voir article spécifique et infra, ndlr), on constate une forte solidarité entresociétés. L’objectif essentiel de la réforme est de ramener le secteur à l’équilibre financier.
AE : Les problèmes de gouvernance ont-ils été la priorité ?
JMN : C’est très important. On ne l’a pas mis en exergue car on voulait se concentrer sur le fond des choses. Mais des mesures concrètes sont prises. Au bilan,on a consacré la systématisation des audits avec un suivi permanent. En outre, ceux-ci porteront sur les 68 SLSP, mais aussi sur les AIS (agences immobilières sociales) et lesAPL (associations de promotion du logement). On a aussi doublé la représentation des locataires et amélioré la dépolitisation des comitésd’attribution.
AE : Vous préférez parler de logement public plutôt que de logement social…
JMN : … car l’important est de mieux réguler les loyers, ce qui est plus le cas en Wallonie qu’à Bruxelles. On est à un point important, à lacroisée des chemins, puisqu’on va vers le transfert de la compétence des baux à loyers, qui est encore fédérale (elle fait partie des matières àtransférer du paquet 1 négocié en 2007 toujours en attente d’application, ndlr). Le logement social n’est pas la seule possibilité. Le conventionnement deslogements privés via les AIS fonctionne bien en assurant des revenus fixes aux propriétaires. La réforme propose de nouvelles mesures pour mettre les logements sur lemarché, principalement la création d’une aide aux travaux pour rendre les logements habitables (allant jusque 70 000 euros). L’objectif est d’en faire 500 en pluspar an. On en est déjà à 350 environ cette année (interview réalisée le 15 avril, ndlr). Clairement, il est essentiel de faire du logement public pour pesersur le marché. Dans le même esprit, on a créé un observatoire des loyers et imposé que les prix des loyers soit affichés explicitement dans les annonces.
AE : Le plan Pivert, c’est la touche verte ?
JMN : Absolument. Et c’est essentiel ! C’est le programme d’investissement vert. Aujourd’hui, les charges peuvent peser 70 à 75 % du loyer. Lesdiminuer est donc important pour assurer une politique sociale. Le Pivert prévoit d’investir 425 millions pour diminuer la consommation d’énergie dans les 104 000logements. Il s’agit de l’objectif prioritaire des investissements. On va faire réaliser un cadastre. Mais il est clair que cela peut réduire les charges de 30 à50 %. C’est un double bénéfice ; pour les locataires et pour la planète ! On veut en faire un programme exemplaire. On espère atteindre les10 000 logements qui en ont le plus besoin sur la période 2011-2014.
AE : Le plan d’accompagnement social est un élément essentiel. Comment comptez-vous le mettre en œuvre ? Pourquoi pas en lien avec l’associatifcomme les plans de cohésion sociale à Bruxelles ?
JMN : Un appel à projet sera lancé en 2011 et la Région financera un référent social par société à partir de 2012. Leréférent social doit être à la fois une porte d’entrée et un pont. Un pont vers la société où l’associatif a toute sa place :mailler le réseau en ouvrant la porte aux locataires de l’école de devoirs, du service d’aide à la jeunesse, des services d’aide ménagère ou pourfaire ses courses, tel sera pour moi le rôle du référent social !
AE : Vous avez aussi revu le système d’attribution…
JMN : … qui fait bien sûr partie des points importants que j’aurais pu citer sur les questions concernant la gouvernance. On a supprimé les points communaux. Leraisonnement est simple. Pour les gens qui habitent dans des communes qui ont peu de logements et qui doivent s’adresser à une commune voisine, leur chance d’obtenir un logementest diminuée par l’absence de volonté de leur commune. C’est une véritable double peine. On a aussi limité l’impact de l’ancienneté qui nepourra désormais dépasser six points pour favoriser les jeunes.
(Bernard Monnier, chef de cabinet-adjoint, prolongeant les paroles du ministre) : Rappelons que les impôts communaux ne financent nullement les politiques du logement. Lescommunes qui n’apprécient pas ce volet de la réforme emploient là un mauvais argument.
AE : L’obligation de relogement pour les bourgmestres fait polémique. Qu’en pensez-vous vraiment?
JMN : C’est effectivement délicat. Mais dans certaines communes, on va vraiment un peu trop vite pour se débarrasser d’un cas problématique. On va trouverles moyens pour financer un fonds du relogement qui sera créé dans le courant de la réforme financé par des fonds régionaux et par des amendes.
AE : La mesure visant les quatre sociétés les plus endettées est un volet important de la réforme. Dans quels délais allez-vousl’appliquer ?
BM : C’est assez complexe car beaucoup d’éléments entrent en compte. Il faut arrêter les chiffres qui sont différents selon qu’on se base surceux des sociétés et ceux de la SWL. Ensuite, on doit étudier de manière approfondie les chiffres. Je pense à une société qui a reçu une forteavance pour des travaux pas encore exécutés par exemple. Enfin, nous savons qu’à Charleroi, une étude existe visant des fusions &eacut
e;ventuelles concernant lesdeux sociétés carolos concernées. Il faudra donc définir un ordre en intégrant à la réflexion la possibilité de mixer recapitalisation etinvestissements. Cette question n’est pas tranchée, mais c’est probable qu’on aille dans cette direction.
AE : Concernant l’ancrage communal, va-t-on permettre plus de projets non localisés ?
BM : Des dizaines de changements de projets des ancrages 2007 à 2010 passent en gouvernement pour le moment. On va dépasser les 20 %. Il y a deux types de projets nonlocalisés. Ceux qui suivent des projets qui échouent, mais dont les communes veulent conserver les budgets. Les projets non localisés intéressants sont ceux qui permettentde réagir au marché par exemple quand un immeuble est mis en vente. Cela dit, rien n’empêche actuellement une commune d’acheter un bien et de le présenterà l’ancrage suivant avec la rénovation en incluant l’achat déjà opéré. Cette procédure exclut bien sûr les communes sous pland’assainissement.
AE : L’UVCW demande une phase « test ». Qu’en pensez-vous ?
BM : Il faut tester les hypothèses et puis évaluer. Concernant la réforme de l’attribution, un groupe de travail fonctionne et l’UVCW y estprésente. Concernant la compensation du différentiel entre le loyer perçu et le loyer économique (VLN pour « valeur locative normative »), le groupedoit encore se réunir car nous réunissons des statistiques et définissons une méthode de travail. La compensation devra tenir compte des aides aux investissementsaccordées pour la construction et la rénovation des bâtiments déjà apportées par la Région.