Alter Échosr
Regard critique · Justice sociale

Jeune et déjà maman

A Bruxelles et en Wallonie, des associations accompagnent des jeunes filles à devenir mères tout en restant ados.

19-11-2012 Alter Échos n° 349

A Bruxelles et en Wallonie, près de 2 000 adolescentes sont devenues mères en 2009. Plusieurs associations accompagnent ces jeunes filles à devenir mères tout enrestant ados.

En Belgique, c’est surtout dans le Sud du pays que le phénomène de grossesse précoce est préoccupant : en 2009, on a répertorié en Wallonie 1 429accouchements pour des mères de 15-19 ans et 12 avant 14 ans. « Il y a beaucoup d’inégalités entre les régions par rapport aux cas de grossessesprécoces. Là où le taux de mères adolescentes n’est que de 2 % en Flandre, il s’élève à Bruxelles à 2,3 % et à 3,9 % enWallonie », souligne Anne Verougsterate, gynécologue à l’Hôpital Érasme. « Globalement, l’une des causes principales de ce phénomène,c’est la précarité sociale. Mais l’on voit toutefois des différences : les jeunes qui ont un projet d’avenir vont se tourner vers une interruption de grossesse alors quecelles qui sont en échec scolaire ou en difficulté familiale voient leur avenir avec un enfant. »

La priorité, c’est de rester ado

C’est dans le Hainaut que l’on trouve le plus de mères adolescentes avec un taux de 4,8 %. Justement, à Mons, l’asbl Toboggan1 a lancé un projet d’accompagnementde ces jeunes filles appelé Marsupilama. L’idée, c’est d’accueillir deux jeunes, enceinte ou maman, dans des studios individuels. Pour les aider, elles sont accompagnées de deuxéducateurs. « Ce qui était important pour nous, c’est qu’elles restent des adolescentes et qu’elles assument au mieux leur rôle de maman. En général, cetype d’accueil permet aux jeunes filles d’aller aux cours et de mettre en place un projet de vie, en étant autonomes », explique Fabienne Jeanson, responsable de l’asblToboggan.
Depuis sa mise en place en 2004, le projet Marsupilama a accueilli 19 adolescentes. L’asbl espère d’ailleurs pouvoir accueillir une troisième adolescente. « C’est vrai qu’onest beaucoup sollicité, notamment parce que les maisons maternelles ont beaucoup de difficulté à travailler avec des jeunes filles. Plus largement, ce n’est pas simpled’accompagner ces mères adolescentes dans un processus d’autonomie. J’ai l’impression qu’au niveau de la Fédération Wallonie-Bruxelles, le constat est le même, ce n’est pasévident de trouver des places d’accueil pour ces jeunes mères. »

Des difficultés avant d’être enceinte

A Bruxelles, il y a eu 545 cas de grossesse précoce en 2009. A plusieurs titres, la Région bruxelloise occupe une position particulière dans cette problématique :d’abord, au niveau de la proportion des mères adolescentes d’origine immigrée qui est beaucoup plus importante qu’en Wallonie ; ensuite, la proportion de jeunes mèresâgées de 18-19 ans est plus élevée que dans le reste du pays.

Sur le terrain associatif, l’asbl Tremplin2 accueille des mères adolescentes depuis 2000. Rien qu’en 2012, l’asbl a accompagné cinq jeunes filles. « On est deplus en plus confronté à cette problématique, avec des mamans de plus en plus jeunes, le plus souvent âgées de 13-14 ans », souligne LatifaAmuléan, assistante sociale. « Je ne sais pas si cela est lié à la crise, mais on constate une recrudescence du phénomène. Les jeunes filles que noussuivons ont déjà des difficultés avant d’être enceintes : des antécédents familiaux, une précarité sociale et relationnelle, un parcoursscolaire chaotique. Ces jeunes filles sont isolées et perdues. Être mère, cela leur donne alors une place dans la société, c’est une revanche sur lavie », poursuit-elle.

Depuis deux ans, l’asbl a lancé une plate-forme pour casser les idées reçues sur les cas de mères adolescentes. « Très souvent, les gens pensent quec’est un accident, mais on constate avec l’expérience que ces filles attendent vraiment leur grossesse, que ce passage à l’acte n’est pas innocent et même qu’elles sont au courantdes moyens contraceptifs. On se rend compte aussi que ce n’est pas le jeune âge qui est un critère de risque, mais plus l’environnement familial. » D’où l’importanced’un travail d’accompagnement de ces jeunes filles pour les aider à se réconcilier avec leur histoire familiale, mais aussi à les faire grandir avec un enfant.

1. Le Toboggan :
– adresse : route d’Obourg, 16 à 7000 Mons
– tél. : 065 33 70 83
– courriel : asbl-le-toboggan@skynet.be
2. Tremplin
– adresse : chaussée d’Anvers, 38 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 204 06 05
– courriel : tremplinsaie@skynet.be

Pierre Jassogne

Pierre Jassogne

Journaliste

Pssstt, visiteur, visiteuse du site d'Alter Échos !

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, notamment ceux en lien avec le Covid-19, pour le partage, pour l'intérêt qu'ils représentent pour la collectivité, et pour répondre à notre mission d'éducation permanente. Mais produire une information critique de qualité a un coût. Soutenez-nous ! Abonnez-vous ! Et parlez-en autour de vous.
Profitez de notre offre découverte 19€ pour 3 mois (accès web aux contenus/archives en ligne + édition papier)