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Le Service d’études et de documentation sociales de la Province de Namur1 organisait ce 19 octobre au campus provincial une journée d’échange sur le thème des ALE, enpartenariat avec l’Agence locale pour l’emploi de Namur.
C’est la présidente de l’ALE de Namur, Frédérique Toussaint, qui a entamé le colloque par une rétrospective sur le système mis en vigueur il y a une dizained’années : « Les peurs progressivement se sont estompées face à cette allocation au mérite et à ce nouveau sous-statut car il n’y eut pas une mentalité desanction ou de contrôle mais plutôt une approche sociale et un dynamisme communicatif. Il fallut la vigilance des conseils d’administration pour éviter la délation et de soncôté, l’Onem s’est montré conciliant. À l’égard des PME qui voyaient dans ce système une concurrence directe, il y eut peu de problèmes. »
Souplesse de développement et effets pervers
F. Toussaint a souligné la multiplication des missions attribuées aux ALE « bonnes à tout faire de l’emploi » comme l’activation des allocations de chômage avec le planActiva ou la distribution des chèques-services dans le secteur du bâtiment.
« Au niveau du contrat ALE, il n’y a pas de problème d’application, sauf qu’il ne donne pas les protections que les travailleurs auraient dans un véritable contrat. Sur le terrain onconstate les limites du système et ses dangers. Du fait du plafond trop peu élevé du salaire minimum garanti, le revenu des travailleurs ALE atteint quasiment le niveau dusalaire minimum garanti de base, parfois plus. Il faut parvenir à insuffler un dynamisme aux chômeurs démotivés. La quote-part des utilisateurs, en 8 ans, n’a pasété indexée. Tout cela provoque la grogne des chômeurs et le retour au travail en noir. Les travailleurs ALE ont le sentiment d’être des petites mains et des secondsstatuts. » F. Toussaint a souligné qu’au niveau de l’aide aux personnes âgées, les personnes les plus difficiles ou à problèmes sont renvoyées aux ALE par lesservices spécialisés. De même au niveau de la garde des enfants, les écoles dont les financements ne suivent pas ont recours aux travailleurs ALE.
F. Toussaint a soulevé la problématique de la formation des travailleurs ALE : « La formation est une mission à succès qui procure une réussite individuelle. Lestravailleurs ALE retrouvent une dignité en suivant une formation. Mais le problème c’est de former à quoi ? » Avec la crainte que les formations en informatique ne soient suiviesdans un but de loisir et que les cours de cuisine demandés par les travailleurs ALE ne concurrencent le secteur de l’Horeca.
Des atouts à approfondir
Denis Stokkink, conseiller au cabinet de la ministre fédérale de l’Emploi Laurette Onkelinx, a tracé les grandes lignes de l’avenir des ALE, tout en insistant sur le fait quel’avis de l’ALE de Namur était particulièrement écouté pour préparer les réformes. « Le système ALE est toujours un piège à l’emploi endonnant un revenu supérieur à un salaire classique dans une entreprise, ce qui fait que le travailleur ALE va s’enliser dans la situation de chômeur et tomber dans l’exclusionsociale. Supprimer ce système serait une réponse cohérente qui aurait une logique. Mais l’ALE peut être considérée comme un outil essentiel pour permettre detrouver un travail salarié. Nous ne le remettrons donc pas en cause du fait qu’il est aussi un lieu d’intermédiation entre ménages qui cherchent une aide à domicileà un tarif réduit et les chômeurs qui souhaitent un revenu complémentaire de manière légale. Mais la réponse est insuffisante. »
Le conseiller de L. Onkelinx a rappelé que si la quote-part destinée aux travailleurs ALE par les ménages est restée identique, l’allocation de chômage aété augmentée. Mais que ce qui importe c’est la façon de soutenir la mise à l’emploi pour que les moyens donnés ne soient pas inutiles. D’où lavolonté de faire mieux encadrer par l’Onem les objectifs de chaque ALE en termes de dépenses en matière de formation. D. Stokkink a insisté sur le fait que les personnesinscrites aux formations ne devaient pas subir de pertes de revenus et qu’une prime serait accordée en compensation « pour qu’elles ne perdent pas 1 euro en se formant ».
Les rapports avec les personnes mises au travail
Sur cette journée organisée en questions-réponses et en ateliers, on pouvait regretter l’absence des travailleurs eux-mêmes. Dans l’atelier « Travailleurs ALE : quellemotivation ? », la voix plutôt rare des agents ALE critiques eut des difficultés à se faire entendre. Il y fut exprimé que les problèmes de garde d’enfantsconstituaient un frein au travail ALE tout en étant peut-être un prétexte. Les difficultés de se déplacer, surtout en milieu rural, furent soulevées.Certaines ALE défraient elles-mêmes les travailleurs à raison de 20 cents/km et d’autres obligent les utilisateurs à prendre en charge ces frais, bien que le chômeursoit alors seul face au client.
Le contact avec les travailleurs est entretenu par certaines agences qui les font venir chaque fin de mois en prétextant les statistiques. « N’est-ce pas un contrôle narcissique deschômeurs? Paie-t-on le chômeur qui se déplace? » Le problème de l’excédent de la demande des utilisateurs par rapport à l’offre de travail fut soulevé.Faut-il obliger les chômeurs à travailler? Certains agents ont parlé de motiver les chômeurs avec « un petit projet ». La nécessité d’une charte d’éthiquefut soulevée. Certaines agences misent sur la créativité : une ALE réalise un journal des ALE avec quatre chômeurs et une autre un atelier d’expressionthéâtrale pour apprendre à se présenter en public.
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