La Cour constitutionnelle a statué : le Conseil de l’Enseignement communautaire flamand est compétent pour interdire le port par les élèves de tout signe religieux ausein des établissements dont il est le pouvoir organisateur.
Le pouvoir organisateur des écoles de la Communauté flamande est habilité à donner le contenu qu’il souhaite à son projet pédagogique, et interdire leport de signes religieux rentre dans le cadre de ces prérogatives. Il n’est donc pas nécessaire que le parlement flamand vote un décret pour qu’une telle interdiction entre envigueur dans les écoles concernées. Tel est en substance le sens de l’arrêt de la Cour constitutionnelle. Pour l’instant, celui-ci ne change encore rien à la situation surle terrain. Le Conseil d’Etat est certes tenu de suivre l’avis de la Cour sur ce point précis. Mais reste la question de voir si, en prenant une telle décision, le Conseil del’Enseignement communautaire (Raad voor het Gemeenschapsonderwijs ou Rago) n’enfreindrait pas la liberté des cultes. Il faut donc tout de même attendre l’arrêt définitif duConseil d’Etat. En attendant, les écoles ou les groupements scolaires qui, de manière individuelle, avaient adopté un règlement d’ordre intérieur interdisant lefoulard – en pratique, sept écoles sur dix l’ont fait – vont maintenir ce règlement.
Tout a commencé en 2009. Cette année-là, deux athénées – l’un à Anvers, l’autre à Hoboken – avaient pris les premiers ce genred’initiatives parce que, selon leurs directions, certaines de leurs élèves subissaient de la part de leur entourage une pression pour porter un foulard islamique. À la suite decela, le Conseil de l’Enseignement communautaire (Raad voor het Gemeenschapsonderwijs ou Rago) avait annoncé, en septembre de la même année, qu’il promulguait une interdictiongénérale des signes religieux ou confessionnels avec entrée en vigueur au 1er septembre 2010. Cette interdiction s’appliquait non seulement aux élèvesmais aussi à tout le corps enseignant (excepté dans le cadre des cours de religion) et au reste du personnel. Mais une élève qui avait quitté l’écoleanversoise pour un athénée royal situé à Lierre qui, lui, autorisait encore le port du foulard, avait alors déposé un recours devant le Conseil d’Etat.À la suite de quoi celui-ci avait suspendu (en mars 2010) la décision du Rago parce qu’il n’était pas clair que celui-ci ait bien la compétence de prendre ce type dedécision. D’où la question préjudicielle à la Cour constitutionnelle à laquelle il vient d’être répondu par l’affirmative.
Vers un débat au Parlement flamand ?
Raymonda Verdyck, l’administratrice déléguée du Rago, est, bien sûr, satisfaite de l’arrêt. Elle souhaite que « l’on aborde maintenant le véritabledébat, à savoir de comment parvenir à dispenser un enseignement dans le respect mutuel et sans pression aucune dans une société aussi diverse que la nôtre». Stefaan Sottiaux, l’avocat de la jeune fille, se dit lui déçu « parce que traditionnellement, la Cour laisse au Parlement le soin de trancher ce genre de question et nonà un organe exécutif ». Pour lui, cette décision revient « à tuer un moustique avec un canon. On ne peut pas régler un problème local avec unrèglement général ». La plateforme Baas Over Eigen Hoofd ! (Boeh!) a également exprimé son mécontentement. Pour Boeh!, chaque femme et chaque jeunefille doit pouvoir décider en toute autonomie si elle porte le foulard ou non et le rôle de la société est de garantir l’existence de cette liberté de choix.
Du côté de la majorité, personne ne s’est encore exprimé sur cette question. Le ministre de l’Enseignement Pascal Smet (SP.A) déclare attendre l’arrêt duConseil d’Etat avant de se prononcer. Du côté de l’opposition, les réactions des députés régionaux se divisent entre gauche et droite. Irina De Knop (OpenVLD) estime qu’une interdiction générale est de nature à faire diminuer la pression sur les directions d’établissement. Boudewijn Bouckaert (Lijst Dedecker) a, lui,déposé une proposition de décret pour interdire le foulard dans toutes les écoles, tous réseaux confondus. Mais Elisabeth Meuleman (Groen!) demande au ministre delaisser le libre choix aux écoles. Et elle appelle aussi les députés flamands à enfin débattre de cette question « parce que les problèmes liésau port du foulard islamique refont surface de manière périodique ».
D’après Het Belang van Limburg et De Standaard