L’Apef, Association paritaire pour l’emploi et la formation (association des fonds sociaux des secteurs sociaux francophones)1, vient de consacrer une note exploratoire auvaste thème de la supervision. Revue de la littérature, analyse de résultats d’enquêtes précédentes et interviews complémentaires donnent unétat des lieux synthétique replacé dans une perspective historique.
Déjà dans ses deux grandes enquêtes autour du métier d’éducateur menées depuis 1997 dans le cadre de cofinancements européens, le Fonds Isajhavait mis en évidence que la supervision est la première modalité de formation continuée pour les employeurs, et la deuxième du point de vue des travailleurs. Ilest clair que la supervision connaît aujourd’hui un essor impressionnant, au point que l’offre de services s’avère insuffisante. Il est clair aussi qu’elle aévolué ces dernières années et revêt des pratiques et des dénominations très différentes, de l’analyse institutionnelle aucoaching.
À la croisée de différentes tendances
Bernard De Backer, auteur de la note, parvient à mettre de l’ordre dans tout cela. Il distingue d’abord des demandes ou des pratiques de supervision à caractèreinstitutionnel ou technique, visant souvent à résoudre des problèmes organisationnels, et des supervisions de type clinique ou relationnel, qui visent à soutenir par uneprise de distance les travailleurs psychosociaux pour qui la dimension interpersonnelle des relations avec les usagers est un outil de travail crucial.
Les pratiques de supervision se trouvent aussi au point d’intersection entre la gestion des ressources humaines en général, et la formation continue. Il en sort une typologiedes pratiques de supervision qui, pour l’auteur, doit pouvoir servir de base pour une recherche plus approfondie sur le terrain.
Ce faisant, il met bien en évidence que l’inflation de la supervision participe aux transformations contemporaines du salariat en général, et du travail social enparticulier : appel à la mobilisation subjective et à la capacité de réflexion des travailleurs, déformalisation de la formation professionnelle,développement d’outils de gestion moins directifs et plus individualisés, élargissement de la notion de compétence professionnelle à deséléments relevant de la personnalité, etc.
Le projecteur est aussi braqué sur les superviseurs. On attend d’eux, semble-t-il, la maîtrise d’outils particuliers, ainsi qu’une expérienceantérieure, le tout si possible validé par un « tiers institutionnel », un organisme de formation continuée comme, exemples typiques cités, le CFIP ou leStics. La qualification du superviseur passe aussi par sa formation continuée, elle aussi sur le mode de la supervision. Se développe ainsi un jeu de mise en abîme, del’usager accompagné, au travailleur social, au superviseur et puis au superviseur de superviseurs…
En conclusion, la note aborde quelques risques de la supervision, autant pour les organisations que pour les travailleurs, délimitant ainsi quelques enjeux et posant le débat.
Valider les compétences, autre aspect des mutations du salariat
Autre phénomène qui participe des mêmes mutations du travail salarié, y compris sans doute à terme dans le non marchand : la validation des compétences.L’Apef y consacre aussi une note récapitulative, toujours sous la plume de Bernard De Backer. On y retrouve une mise en contexte historique (où l’importance des politiquesde niveau européen transparaît fort peu), une mise au point sur les concepts (compétence, qualification, validation, certification, partie reprenant les travaux deréférence menés par le Conseil de l’éducation et de la formation) la description des dispositifs britannique et français (et malheureusement pas le flamand),une analyse du dispositif qui est sur le point de se déployer en Belgique francophone, et une conclusion qui balise de nouveau nombre d’enjeux dans le champ de la formationprofessionnelle et dans celui de l’emploi.
1. Bernard de Backer, Apef asbl, quai du Commerce 48 à 1000 Bruxelles, tel : 02 250 37 85, fax : 02 227 59 79, e-mail : de.backer.bernard@apefasbl.org