Créée en 1994 par la Commission communautaire française avec la Région bruxelloise et la Communauté française, lancée en 1998, la Commissionconsultative Formation Emploi Enseignement (CCFEE)1 rassemble tous les acteurs bruxellois de la formation professionnelle des demandeurs d’emploi. Son rapportd’activités 2002-2003 est diffusé depuis un mois. Tour d’horizon avec son président Éric Struyf et son secrétaire Alain Kock, pour comprendre lefonctionnement et les ambitions de cette instance typiquement bruxelloise et somme toute relativement discrète.
Atouts
Éric Struyf, quand on lui demande comment la Commission remplit ses missions, insiste sur ses atouts : « Nous sommes à côté de la concertation, et nous avons unegrande liberté d’initiative. On peut facilement faire venir autour de la table toute personne concernée par les problèmes à notre ordre du jour », que ce soitcomme invité ponctuel ou comme expert siégeant sans voix délibérative. « On pourrait dire que, comme président, je suis laxiste sur la composition de laCommission, mais non, je cherche d’abord l’efficacité de notre travail. On peut dire des choses que d’autres ne peuvent pas se permettre. En somme, nos objectifs ne sont pasperturbés par des questions institutionnelles. » De plus en plus, la Commission ne se contente pas des saisines des différents exécutifs : elle travaille sur des avisd’initiative, comme cette année sur les fonds sectoriels ou les droits et devoirs des stagiaires en formation. « On n’hésite pas, notamment dans notre rapportd’activités, à pointer dans quelle mesure nos recommandations ont été suivies ou pas. »
Cette qualité de travail que revendique la Commission tient non seulement à ses missions, mais aussi à sa composition. « Si on était entre opérateurs deformation, on serait vite tombés dans une forme de marchandage ou de consensus mou. Ici, les partenaires sociaux interprofessionnels arrivent avec leurs questions, et obligent le monde de laformation à avancer. » De fait, la Commission a cette caractéristique rare de réunir tous les acteurs de la question qui fait son objet : les opérateurs de formationbruxellois, y compris l’associatif et les CPAS, l’enseignement technique et professionnel et l’enseignement de promotion sociale des trois réseaux, et bien entendul’Orbem, l’Union des entreprises de Bruxelles, la CSC, la FGTB et la CGSLB. « Cela n’a donc rien à voir avec le Conseil économique et social régional(CERSB) ni même avec le Conseil de l’éducation et de la formation (CEF) de la Communauté française. »
Impact
La collaboration avec les autres instances ne semble d’ailleurs pas toujours évidente. Éric Struyf le relève à propos du Pacte social pour l’emploi desBruxellois. « Plusieurs instances ont été amenées à se prononcer. Le CESRB par exemple est resté fort assis sur ses prérogatives : malgréplusieurs tentatives pour éviter les doubles discussions, avec une partie des personnes autour de la table qui sont les mêmes, la Commission n’est pas parvenue à collaborersur les matières qui rentrent dans la compétence générale du Conseil et dans nos compétences spécifiques. Je le regrette. » Même pour des «choses aussi triviales » qu’organiser une visite conjointe des centres de compétences en Wallonie et en Flandre, la collaboration entre les deux instances ne va pasd’elle-même. « Donc sur le pacte, en fin de compte, on a travaillé chacun de notre côté alors que cette dynamique veut explicitement articuler nos troismatières – formation, emploi et enseignement – et donne à la Commission un rôle d’information et de mobilisation pour que les acteurs de la formation et del’enseignement aient plus d’impact sur le développement de l’emploi régional. »
Même reconnaissance sur le Plan d’action régional pour l’emploi (Pare), élaboré tous les ans. « Nous avions reçu une mission de suivi, et lamouture 2004 tient compte de nos recommandations. »
Trois priorités
Dans son rapport, la Commission tente de tirer les enseignements de ses dernières années de fonctionnement et dégage trois priorités.
> Améliorer la connaissance du monde bruxellois de la formation professionnelle continue. Alain Kock explique : « Dans les avis émis suite aux quelques études quenous avons initiées, nous avons insisté sur les recommandations méthodologiques. C’est que nous avons besoin de conceptions communes et d’élémentsd’information précis, y compris des statistiques. On a besoin d’une description globale, et donc uniforme, de toute l’offre de formation bruxelloise et de la participationdes stagiaires. » Et de plancher concrètement en réunissant les techniciens des différentes instances concernées : Communauté française, BruxellesFormation, IFPME, etc. « Toutes les données existent et sont actualisées, mais il faut les utiliser de la même manière pour produire un tableau de bord. Notresituation n’est pas très bonne, cela ressort des exercices comparatifs (benchmarking) menés par l’Union européenne comme par le Conseil supérieur del’emploi. Nous avons besoin de nos indicateurs sur la formation et l’enseignement, pour pouvoir analyser et juger la situation. » Le rapport enseignement / marché del’emploi doit être traité au niveau bruxellois. « Des solutions spécifiques à notre région sont nécessaires, on ne peut plus se contenter demoyennes communautaires. »
> Améliorer le positionnement de la Commission dans l’architecture régionale et communautaire de la concertation. « On a bien sûr un relevé desdifférentes instances, commissions, conseils, etc. Mais en quoi tout cela fait-il système ? Comment faire mieux ? Comment faire bien fonctionner les rapports entre tout cela ? »Le secrétaire se félicite des idées avancées dans le Pare 2004 à partir de la question de l’emploi. « Au lieu d’être un appendice dans unplan bruxellois pour l’emploi, la Commission devrait imaginer une vision commune, un Plan pour la formation tout au long de la vie des Bruxellois, de façon concertée, dans lerespect des prérogatives de chacun. Et on n’a pas besoin pour cela de se mettre au centre du monde ! »
> Se positionner dans les politiques européennes. « Nous avons organisé des auditions d’experts sur le processus de Bruges et sur la Méthode ouverte decoordination, et on remarque que les membres ne sont pas assez armés pour appréhender réellement ces enjeux qui les concernent. » La première chose à faireest donc d’améliorer son information, « en trouvant des relais dans différentes instances pour raccourcir les délais de passage de l’information ».Certes, Bruxelles n’est pas toujours assez reconnue dans le paysage institutionnel belge pour faire valoir les questions qui lui sont propres. Mais sa taille et celle de ses institutionslimitent ses capacités d’action. « Jamais nous n’avons essuyé un “non” à la suite d’une demande d’informations. »
1. CCFEE, c/o Bruxelles Formation, administration centrale, rue de Stalle 67 à 1180 Bruxelles, tél. : 02 371 74 34, fax : 02 371 74 33, e-mail : a.kock@bruxellesformation.be.