Pour « mieux légiférer », la Commission européenne a retiré 68 propositions de lois du processus législatif communautaire. Aux côtés deprojets visant à l’harmonisation du marché intérieur, l’initiative de la Commission Barroso touche, de façon plus ou moins ouverte, trois projets de directivesdéfendus par les partisans d’une Europe plus sociale, à savoir l’intérim et les statuts de l’association et de la mutuelle européenne.
Pouvoir de retrait
Depuis le début de son mandat en novembre 2004, la Commission a examiné 183 propositions de directives présentées au Conseil et au Parlement européen avant le1er janvier 2004. Après s’être demandée si ces propositions contribuent à la compétitivité et permettent d’améliorer laréglementation, la Commission a jugé qu’un bon tiers du lot était contraire aux objectifs de compétitivité de la « stratégie de Lisbonne».
À l’annonce de ce « coup de force » de l’exécutif, plusieurs députés européens et syndicats sont montés au créneau enl’accusant de faire preuve de reddition devant les États membres : « En réalité, après la « pause » du projet de Constitution européenne, le blocage dubudget, ce toilettage juridique de la Commission participe plutôt d’un lent détricotage de l’Europe communautaire », prévient l’eurodéputé socialisteGilles Savary, qui ajoute : « Il offre une prime à l’intergouvernemental, en conférant un droit de veto aux États et à la résistance des intérêtsnationaux ».
Cependant, l’eurodéputé conclut que cette opération a le mérite de monter que « le pouvoir d’initiative de la Commission est aussi un pouvoir de retrait, cequi la place devant ses responsabilités face au projet de directive Bolkestein » sur la libéralisation des services dans l’Union.
« Mise au frigo » de la directive sur l’intérim
Comprise dans une première version des textes à retirer, la directive sur le travail temporaire (ou intérim) a été finalement « mise au frigo » – etnon retirée. Ce geste signifie surtout que la Commission attend le vote en session plénière du Parlement européen sur la fameuse « directive Bolkestein » pouragir ensuite sur le travail temporaire (voir ce numéro, page 6).
Abandon des statuts européens de l’association et de la société mutuelle
Deux retraits émeuvent plus sérieusement les professionnels de l’économie sociale, ayant déjà du mal à retenir l’attention des instanceseuropéennes. Attendus depuis 1991, deux textes devaient en effet octroyer une personnalité juridique européenne aux associations et sociétés de mutuelles, leurpermettant ainsi de maintenir des missions de service public hors du champ de la concurrence, et d’être reconnues comme telles dans toute l’Union.
La Commission justifie ce choix du retrait par l’absence de progrès dans les discussions entre États membres depuis six ans et le caractère largement obsolète despropositions par rapport aux nouvelles priorités politiques et économiques.
À l’inverse, Jean-François Hoffelt, secrétaire général de la Fédération belge des coopératives (Febecoop) précisait, il y apeu, dans le magazine « Traverses » : « Il faut conforter les structures européennes de l’économie sociale, comme la CEP-CMAF (Conférence permanente européennedes coopératives, mutualités, associations et fondations), parce qu’elles sont des lieux de dialogue importants », ajoutant qu’« il est important de biendéfinir les secteurs d’activités de l’économie sociale susceptibles d’entrer dans une directive sur les services » et de les distinguer de ceux quirelèvent de l’intérêt général.
À terme, la Commission espère que ce nettoyage profitera aux petites et moyennes entreprises avec l’objectif, au-delà, de simplifier et mettre à jour quelque80.000 pages de législation européenne. En octobre, les États membres, les entreprises et les citoyens pourront donner leur avis sur ces opérations.
Directive services
La Commission européenne devra attendre plus longtemps que prévu ,puisque le vote en commission marché intérieur du Parlement européen sur le rapport del’eurodéputé socialiste Evelyne Gebhardt, fixé les 4 et 5 octobre, a été annulé à huis clos et reporté au 21 novembre prochain.
Alors même qu’un consensus avait été trouvé sur la majorité des quelque 1.600 amendements. Le compromis a achoppé sur le fameux principe du paysd’origine (PPO) par lequel un prestataire peut fournir un service dans un autre État membre selon les règles de son pays d’origine (voir ce numéro, page 6).
L’inclusion des services d’intérêt général et la distinction entre le droit général de fournir un service dans un autre État membre quele sien par une entreprise légalement établie dans son pays d’origine et la prestation effective et soumise au pays d’accueil, que propose la rapporteur, posent toujoursproblème.