Le Service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale1 a remis aux communes ses recommandations à l’approche des élections d’octobre 2012.
Les communes, au lendemain des élections, auront du pain sur la planche. Des décisions à prendre. Et des actions à mener en adéquation avec les compétences qui sont les leurs.
Le défi posé par la jeunesse
Le « fossé continue de se creuser entre l’univers des familles en situation de pauvreté et la « norme » », constate le Service. L’implication des familles de milieux défavorisés dans la vie de l’école permettrait de diminuer ces exclusions. L’enseignement, un droit, n’est par ailleurs pas exempt de frais. Le collectif plaide donc pour la gratuité de l’enseignement, à favoriser dès la maternelle puisque c’est « là que se constituent les fondements de la scolarité future ». En termes de formation, il est préconisé que soient organisés suffisamment de stages pour les jeunes dans la formation en alternance.
Un groupe croissant de jeunes est confronté au risque d’exclusion et de pauvreté. Qui les accompagne dans leur transition vers l’âge adulte, avec tous les changements et la prise des responsabilités que cela comporte (emploi, logement, etc.) ? Les CPAS sont cités en première ligne. Quid d’un service en leur sein qui serait destiné aux jeunes et qui développerait une approche adaptée sur mesure ? Justement…
La commune fait office de lien entre un public vulnérable et les acteurs socioéconomiques locaux. Elle est un vecteur et un acteur clé en termes d’insertion. Ici encore, les CPAS sont visés en tant que pouvoir organisateur et initiateur. « Si le parcours mène à un emploi, celui-ci doit assurer un revenu et une protection sociale suffisants et des conditions de travail décentes », prévient le Service. Le projet individualisé évoqué plus haut doit donc faire office d’outil pédagogique et non d’une « forme de contrôle ». Attention au serpent qui se mordrait la queue, ou quand la précarité entraîne le non-respect du contrat, synonyme de sanctions, elles-mêmes menant à davantage de pauvreté.
Le logement au centre des préoccupations
Les compétences en matière de logement sont pour la plupart régionales. Cela dit, « la commune y joue un rôle fondamental ». Une politique locale du logement « participative et à la mesure du citoyen, favorisant la concertation et la cohésion », devrait dès lors être instituée.
Le Service pointe le manque de solidarité dont font preuve certaines communes favorisées, réticentes à accueillir des populations précaires. Or la solidarité est « le premier fondement d’une politique visant à promouvoir l’accès pour tous à un logement décent ». Une « attention accrue » devrait donc être consacrée aux populations « les plus faibles ».
Les logements publics manquent cruellement, en nombre et en qualité d’offre. Le Service voit donc une solution simple : investir pour augmenter le nombre et la mise à disposition de terrains. Si l’offre de logements publics n’est pas suffisante, l’accès au logement privé n’est pas, non plus, la panacée. Mais les raisons y sont plutôt d’ordre financier. Le service fait le constat d’un marché locatif en hausse et les ménages ne suivent pas. Le droit à un logement décent et abordable est pourtant consacré. Il convient dès lors de « mettre en place des outils de régulation des loyers privés ». Un rôle que pourraient assumer les Agences immobilières sociales (AIS), acteurs de régulation du marché locatif mettant l’aspect social au centre de leur mission, à condition d’en faire mieux connaître l’existence.
La lutte contre le sans-abrisme se fait au niveau des communes. Des politiques adéquates devraient donc être mises en place, à la lumière d’un recensement, afin « d’apporter des réponses aux besoins vitaux des personnes dans la rue (…), d’adopter des mesures touchant à la dignité ». La réquisition des immeubles vides pour loger les sans-abri, une solution ? Convenue dans les codes de logement régionaux, « elle n’est pratiquement pas mise en œuvre », déplore le Service. Qui préconise alors la réalisation d’un inventaire des logements inoccupés, la mise en place d’outils permettant leur réquisition, le prélèvement d’une taxe aux propriétaires et la réhabilitation des étages inoccupés des immeubles de commerce en logement.
Expulsé ? Relogé
Les motifs et la forme d’une expulsion peuvent être divers. Dans tous les cas, « la commune a le devoir de lutter contre les immeubles insalubres ». Attention : « Lutter contre l’insalubrité sans aggraver la précarité : pas d’expulsion sans engagement de relogement ». Dans les cas où celui-ci ne peut être assuré directement, l’hébergement, conçu comme un tremplin vers un relogement décent et durable, doit être assuré dans « des délais raisonnables ».
Ne rentrant pas dans les formats communs, les formes de logement alternatif sont rarement vues d’un bon oeil par les autorités communales. Pourtant, le Service plaide « pour une politique diversifiée, qui favorise l’innovation sociale et éviter une « pensée unique » ». Cela via le respect et la sécurisation de ces types de logement.
Permettre l’accès de tous à l’énergie et à l’eau
« L’énergie et l’eau sont des biens de première nécessité essentiels pour pouvoir mener une vie conforme à la dignité humaine », souligne le Service. Paradoxalement, ils constituent une partie conséquente du budget des ménages et leur prix ne cesse d’augmenter. Notons à cet égard que le gel des prix a été décidé par le ministre de l’Economie, Johan Vande Lanotte. Dans ce domaine, le Service préconise une meilleure information et un accompagnement des familles vivant dans la précarité, assumé par les acteurs publics comme privés.
Lutte contre les inégalités de santé
Les conditions de vie des plus précaires les exposent à des problèmes de santé. Outre l’amélioration de l’accès aux soins, il faudrait « surtout lutter contre les inégalités sociales dans d’autres domaines tels que le Logement, la jeunesse, l’Enseignement, le Sport ». Soit les domaines soulevés ci-dessus. La solution se situe donc en amont : prendre en compte « les facteurs qui sont à la base des inégalités économiques et sociales face à la santé ».
La commune n’a pas en main tous les leviers dans ces différents domaines, mais elle peut « y contribuer activement », ponctue le rapport. Le large panel lance de sérieuses pistes à destination des pouvoirs locaux. Le Service et les acteurs associés espèrent ainsi que les promesses politiques ne resteront pas de vains mots de campagne.
1. Service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale :
– adresse : rue Royale, 138 à 1000 Bruxelles
– tél. : 02 212 31 73
– site : http://www.luttepauvrete.be
– courriel : luttepauvrete@cntr.be