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Regard critique · Justice sociale

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La localisation de la sécurité sociale comme effet collatéral du « Plan d'activation »

Le Plan d’accompagnement et de suivi des chômeurs (PAS) n’en finit pas de produire des conséquences, non seulement sur les chômeurs eux-mêmes, mais également surdes institutions qui pouvaient s’en penser immunisées. Derniers en date : les CPAS wallons.

14-12-2007 Alter Échos n° 242

Le Plan d’accompagnement et de suivi des chômeurs (PAS) n’en finit pas de produire des conséquences, non seulement sur les chômeurs eux-mêmes, mais également surdes institutions qui pouvaient s’en penser immunisées. Derniers en date : les CPAS wallons.

Réunis à l’occasion de l’assemblée générale de leur fédération, ce vendredi 7 décembre, ils ont tiré un premier bilan global ducoût induit par le PAS pour leur budget1. Les résultats obtenus indiquent que 46 % des personnes sanctionnées par l’Onem deviennent bénéficiaires duRevenu d’intégration sociale (RIS). Le coût de celui-ci n’est que partiellement remboursé aux CPAS par le fédéral : à hauteur de 50 % pour les CPASconnaissant moins de 500 ayants droit, 60 % entre 500 et 1000, et 65 % au-dessus de 1000.

Un transfert dénué de sens mais pas de conséquences

Dans bien des cas, précise Claude Emonts, président du CPAS de Liège et de la fédération, la sanction financière est minimale pour les personnesconcernées – les allocations de chômage étant notoirement peu élevées en Belgique en proportion du dernier salaire. Qui plus est, le transfert d’uneinstitution à l’autre est dépourvu de sens pour ces ex-chômeurs. Pour les CPAS, elle est en revanche synonyme de coûts financiers et de charges administrativessupplémentaires non négligeables. D’après l’étude de la fédération, ces nouveaux bénéficiaires représentent en effet désormaispas moins de 6,3 % de l’ensemble des bénéficiaires du RIS en Wallonie. Et Claude Emonts de s’en prendre à l’Onem qui, via un système de sanction jugé tropmanichéen et pas assez modalisé, opère un transfert de charges et se lave les mains des conséquences.

Invité à répondre, l’administrateur général adjoint de l’Onem, Jean-Marie Delrue a décliné l’invitation dans une lettre précisant que« l’Onem n’est pas un bon interlocuteur pour un tel débat, et que c’est donc aux autorités politiques qui ont conçu le Plan qu’il appartient de procéder àcette évaluation ». Une interprétation que ne partage pas le président de la fédération des CPAS qui précise que les circulaires administratives del’Onem ne sont pas prises par le politique.

12 millions d’euros de transfert!

En procédant à des estimations a minima du coût induit par le PAS pour les CPAS, Ricardo Cherenti, chef du service Insertion professionnelle de lafédération des CPAS parvient à un chiffre annuel de 11 860 000 euros, nettement sous-estimé, de son propre aveu. En y ajoutant les frais administratifs et chargessalariales liés à l’ouverture annuelle de 6 682 dossiers, il aboutit à une estimation conservatrice de près de 12,6 millions d’euros. Un chiffre qui devrait encoreaugmenter lorsque toute la tranche des 40-50 ans (qui sont les derniers à être entrés dans le processus de contrôle) auront parcouru l’ensemble des trois entretiens etauront pu connaître les sanctions définitives prononcées lors du troisième entretien. De façon presque rhétorique, Ricardo Cherenti s’interroge donc sur lefait de savoir « si on cherche à lutter contre le chômage ou plutôt contre les chiffres du chômage ».

Ces chiffres, s’ils sont sans doute particulièrement dramatiques en Wallonie (la Région rassemble près de 50 % des chômeurs sanctionnés), ne devraient pasêtre sensiblement différents dans les deux autres régions. Des enquêtes similaires sont d’ailleurs menées par les fédérations de CPAS flamands etbruxellois et devraient permettre de le vérifier prochainement. Parmi les souhaits déjà exprimés par les CPAS wallons, on retiendra celui d’une solution structurelle pourréduire ou éviter les sanctions, et, en attendant, un renfort financier qui rendrait le PAS budgétairement neutre pour eux.

Parmi les réactions, Thierry Bodson, secrétaire régional de la FGTB s’est dit « ahuri de la proposition, qui figurait dans l’accord de la défunte Orange bleued’étendre le contrôle aux 50-58 ans ». Quant à Jean-Claude Marcourt (PS), ministre wallon de l’Économie et de l’Emploi, il a dénoncé dans le Plan un« système bureaucratique qui produit des effets inacceptables ».

Et l’ensemble des participants au débat de s’inquiéter d’une « localisation larvée » de la sécurité sociale (puisque dans le cadre d’un passaged’allocation de chômage au RIS, c’est un montant compris entre 35 et 50 % qui passe à charge des communes), en même temps que de la transformation de cette sécuritésociale en aide sociale.

1. Fédération wallonne des CPAS:
– adresse : rue de l’Étoile, 14 à 5000 Namur
– tél : 081 24 06 51
-courriel : federation.cpas@uvcw.be
– site : www.uvcw.be/cpas

Edgar Szoc

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